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05/10/2017 | FRANCE | N°16MA01336

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 05 octobre 2017, 16MA01336


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1400449 et 1404790 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 avril 2016 et le 16 février 2017, M. A..., représenté par MeC..., dem

ande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 2 février 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1400449 et 1404790 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 avril 2016 et le 16 février 2017, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 2 février 2016 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que:

- le jugement est irrégulier en ce qu'il se fonde sur " l'article 62 " du livre des procédures fiscales et non sur l'article L. 64 du même livre ;

- la proposition de rectification du 15 mars 2012 ne lui a pas été notifiée à titre personnel ;

- les rehaussements de l'année 2009 ne sont pas motivés ;

- l'administration, qui a substitué un motif de rehaussement au motif initial s'agissant des années 2009 et 2010, a admis que ce motif initial était mal fondé ;

- la demande de substitution de base légale de l'administration devait être écartée ;

- la proposition de rectification du 4 avril 2013 relative à l'année 2011 ne précise pas la nature et l'origine des documents en possession de l'administration fiscale qui ont servi à fonder les impositions ;

- l'administration fiscale refuse à tort la déduction des intérêts d'emprunt.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

1. Considérant que M. A... relève appel du jugement du 2 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges ont suffisamment répondu aux points 7 et 8 de leur jugement au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que la mention du jugement selon laquelle M. A... n'est pas " fondé à se prévaloir des dispositions répressives de l'article 62 du livre des procédures fiscales " résulte d'une simple erreur de plume qui est sans incidence sur sa régularité dès lors que la citation qui précédait des dispositions applicables de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales était de nature à dissiper toute ambiguïté sur la réponse apportée à ce moyen par le tribunal, qui ne s'est pas mépris sur la portée des écrits du requérant ; que, par suite, le jugement n'est entaché ni d'une omission à statuer ni d'un défaut de motivation ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le destinataire de la proposition de rectification du 15 mars 2012 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales : " (...) chacun des époux a qualité pour suivre les procédures relatives à l'impôt dû à raison de l'ensemble des revenus du foyer. Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des conjoints ou notifiés à l'un deux sont opposables de plein droit à l'autre " et qu'aux termes de l'article L. 286 A du même livre : " Les règles de contrôle de l'impôt sur le revenu (...) prévues par le présent livre pour les contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 1 de l'article 6 du code général des impôts, s'appliquent aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité qui font l'objet d'une imposition commune " ; que les contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 1 de l'article 6 du code général des impôts sont les personnes mariées soumises à une imposition commune ; que ces dispositions instituent une présomption irréfragable de représentation mutuelle entre les personnes soumises à imposition commune pour la procédure de contrôle de l'impôt dû au titre des revenus perçus au cours de la période d'imposition commune ; que le législateur a, par ces dispositions, entendu donner à chacun des époux ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité qualité pour suivre les procédures relatives à l'imposition commune due à raison de l'ensemble des revenus du foyer ;

4. Considérant que les déclarations d'impôt sur le revenu des années 2009, 2010 et 2011 ont été souscrites par M. A...et Mme B...qui ont conclu un pacte civil de solidarité le 26 mai 2008 ; que le pli contenant la proposition de rectification du 15 mars 2012 a été distribué le 17 mars 2012 à l'adresse " M. A...D...Mme B...E...10 rue Carnot 66720 Tautavel " dont il n'est pas sérieusement contesté qu'elle était alors celle du domicile de M. A... et de Mme B... ; que, dès lors qu'en application des dispositions combinées de l'article L. 54 A et de l'article L. 286 A du livre des procédures fiscales, les actes de procédure notifiés à l'un des partenaires d'un pacte civil de solidarité sont opposables de plein droit à l'autre, l'administration fiscale a pu régulièrement notifier la proposition de rectification du 15 mars 2012 à " M. A... D...Mme B...E... " ; que, par suite, les moyens tirés de ce que cette proposition de rectification aurait dû être adressée uniquement à M. A... et qu'elle ne lui serait pas parvenue ne peuvent qu'être écartés ;

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification du 15 mars 2012 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " et qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

6. Considérant, en premier lieu, que la proposition de rectification mentionne les textes applicables, l'impôt et les années d'imposition concernées ainsi que les motifs pour lesquels a été remis en cause le crédit d'impôt dont a bénéficié M. A...en 2009 et 2010 au titre des intérêts d'emprunt souscrits pour l'acquisition de l'habitation principale ; qu'elle précise à cet égard que M. A...devait prendre l'engagement d'affecter le logement à l'habitation principale au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la conclusion du contrat de prêt soit avant le 31 décembre 2010 et que cette condition n'était pas remplie lors de l'établissement en 2011 de la déclaration des revenus de 2010 ; que cette motivation était suffisante et a permis à M. A...d'engager un débat contradictoire avec l'administration fiscale ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'administration fiscale, dans son mémoire en défense de première instance enregistré le 17 mars 2014 a abandonné le motif tenant à l'absence d'engagement d'affecter le logement à l'habitation principale et sollicité le maintien des impositions sur le fondement d'un nouveau motif tiré du fait que les intérêts de l'emprunt contracté pour l'acquisition d'un terrain à bâtir ne pouvaient être retenus au titre du crédit d'impôt sur le revenu prévu à l'article 200 quaterdecies du code général des impôts ; que, si M. A... soutient que la demande de substitution de motif ainsi sollicitée par l'administration révèle que celle-ci admet que le motif initial de rectification était " faussement avancé " et qu'ainsi la proposition de rectification était irrégulière, cette critique relève du bien-fondé des motifs des rectifications et demeure sans incidence sur la motivation de la proposition de rectification ;

8. Considérant, en troisième lieu, que M. A...ne saurait utilement reprocher à l'administration fiscale de ne pas avoir explicitement étendu au rehaussement concernant l'année 2009 le motif, retenu pour l'année 2010, tiré de ce qu'aucun engagement d'affecter le logement à l'habitation principale n'avait été encore souscrit au moment de la déclaration en 2011 des revenus de l'année 2010 dès lors que cette condition, regardée comme non remplie en 2011, ne pouvait non plus, nécessairement, l'être tant en 2009 qu'en 2010 ;

En ce qui concerne la proposition de rectification du 4 avril 2013 :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76.B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76 (...) " ; que l'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée ; que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé ; que, toutefois, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie ;

10. Considérant que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été informé de la nature et de la teneur des " documents en possession du service " mentionnés dans la proposition de rectification du 4 avril 2013 dès lors qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur s'est fondé sur le seul examen des documents que M. A...avait lui-même communiqués à l'administration fiscale par courrier du 31 juillet 2012 en réponse à la demande du service du 9 février 2012, soit l'acte d'acquisition du bien immobilier, les échéanciers de 2008 et 2010 et un engagement de construire souscrit tardivement, sans faire usage d'un quelconque droit de communication auprès de tiers ; que, par suite, M.A..., qui avait nécessairement connaissance des documents qu'il avait lui-même communiqués, n'a pas été privé de la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 76 B précité du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts : " I.- Les contribuables (...) qui acquièrent un logement affecté à leur habitation principale (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu au titre des intérêts des prêts contractés auprès d'un établissement financier à raison de cette opération, tels que définis à l'article L. 312-2 du code de la consommation. / Le premier alinéa s'applique également aux contribuables qui font construire un logement destiné à être affecté, dès son achèvement, à leur habitation principale. Dans cette situation, les prêts mentionnés au premier alinéa s'entendent de ceux qui sont contractés en vue de financer l'acquisition du terrain et les dépenses de construction (...) " ;

12. Considérant, en premier lieu, que M. A...a contracté le 16 juillet 2008 un emprunt d'un montant de 129 800 euros pour l'acquisition le 28 juillet suivant d'un terrain à bâtir situé sur la commune de Rivesaltes en vue d'y édifier une maison d'habitation ; qu'après l'obtention d'un permis de construire une maison à usage d'habitation le 23 juillet 2009, il a contracté le 15 février 2010 un second emprunt d'un montant de 116 300 euros ; que l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice du crédit d'impôt attaché au premier emprunt ;

13. Considérant que, même si les dispositions de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts n'interdisent pas que le crédit d'impôt soit attaché à un emprunt contracté pour l'achat d'un terrain, c'est à la condition que l'achat de ce terrain s'inscrive dans une opération visant à la construction d'un logement destiné à être affecté à l'habitation principale ; qu'en l'espèce, l'administration fiscale a remis à bon droit en cause le bénéfice du crédit d'impôt, aux motifs, non contestés par M.A..., que, près de six années après la conclusion du contrat de prêt à raison duquel il avait bénéficié du crédit d'impôt, aucune construction n'avait été déclarée à l'adresse du terrain, présentée comme celle de sa résidence principale, et que les déclarations d'impôt sur le revenu des années 2010 à 2012 de l'intéressé mentionnaient comme adresse de l'habitation principale une autre adresse que celle de ce terrain ;

14. Considérant, en second lieu, que le tribunal a pu à bon droit, après avoir relevé que la substitution de motif demandée par l'administration fiscale ne privait le contribuable d'aucune garantie procédurale, faire droit à cette demande ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haili, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 octobre 2017.

N° 16MA01336 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01336
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : PIGUET

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-05;16ma01336 ?
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