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28/09/2017 | FRANCE | N°15MA03081

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 28 septembre 2017, 15MA03081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour l'éco-développement harmonieux de Carros (APEHC) a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le maire de Carros a délivré un permis de construire tacite à la société Les Roses de Carros.

Par un jugement n° 1300490 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 juillet 2015 et 31 octobre 2016, l'APEHC, représentée par Me A.

.., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 7 mai 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour l'éco-développement harmonieux de Carros (APEHC) a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le maire de Carros a délivré un permis de construire tacite à la société Les Roses de Carros.

Par un jugement n° 1300490 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 juillet 2015 et 31 octobre 2016, l'APEHC, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 7 mai 2015 ;

2°) d'annuler le permis de construire tacite délivré à la société Les Roses de Carros ;

3°) de lui allouer la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis défavorable émis par l'établissement public d'aménagement de la plaine du Var est antérieur au permis de construire et aurait dû conduire l'administration à le refuser ;

- le défaut de notification d'une décision expresse valait décision implicite de rejet, en application de l'article R*424-2 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de demande n'indique pas les modalités de raccordement des bâtiments aux réseaux ;

- le dossier de demande n'indique pas les cotes du terrain naturel et les cotes périmétriques des bâtiments ;

- le dossier de demande ne comprend pas l'attestation de prise en compte de la règlementation thermique ;

- le dossier de demande ne comprend pas d'étude d'impact ;

- le dossier de demande ne comprend pas la notice exigée par l'article R*431-27-1 du code de l'urbanisme ;

- le projet entre dans le champ de l'article L. 752-3 du code de commerce et une demande d'autorisation d'exploitation commerciale aurait dû être déposée et jointe au dossier de permis de construire ;

- la décision méconnaît les dispositions des articles 3, 4, 10, 11 et 12 du règlement de la zone UE du plan d'occupation des sols et les dispositions de l'article R*111-21 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2016, la société Les Roses de Carros conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'APEHC ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2016, la ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable ;

- les moyens soulevés par l'APEHC ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille qui désigne Mme Muriel Josset, présidente assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Alain Poujade, président de la 1ère chambre.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gonneau,

- et les conclusions de Mme Giocanti.

1. Considérant que le maire de Carros a tacitement délivré au nom de l'État un permis de construire un ensemble immobilier à la société Les Roses de Carros ; que l'APEHC relève appel du jugement du 7 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la nature de la décision en litige :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 425-7 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Conformément à l'article L. 752-1 du code de commerce, lorsque le permis de construire porte sur un projet soumis à une autorisation d'exploitation commerciale, le permis ne peut être accordé avant la délivrance de cette autorisation. Sa mise en oeuvre ne peut être entreprise avant l'expiration des recours entrepris contre elle. " ; qu'aux termes de l'article L. 751-1 du code de commerce dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : (...) 4° La création d'un ensemble commercial tel que défini à l'article L. 752-3 et dont la surface de vente totale est supérieure à 1 000 mètres carrés ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 752-3 du même code : " I. - Sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui : 1° Soit ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou en plusieurs tranches ; (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R*424-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Par exception au b de l'article R. 424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet dans les cas suivants : (...) g) Lorsque la délivrance du permis est subordonnée, en application des articles L. 752-1 à L. 752-3 du code de commerce, à une autorisation d'exploitation commerciale ou, en application de l'article 30-2 du code de l'industrie cinématographique, à une autorisation de création, d'extension ou de réouverture au public d'établissements de spectacles cinématographiques et que la demande a fait l'objet d'un refus de la commission départementale compétente ;(...) " ; qu'il résulte des dispositions des articles L. 424-2, R.*423-19, R.*423-22, et R.*423-38 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige, qu'une décision de permis de construire tacite naît à l'issue du délai d'instruction de la demande de permis de construire, en l'absence de notification d'une décision expresse de l'administration ou d'une demande de pièces complémentaires ; que ce délai est interrompu par une demande de pièces manquantes adressée au pétitionnaire, à la condition toutefois que cette demande intervienne dans le délai d'un mois et qu'elle porte sur l'une des pièces limitativement énumérées par le code de l'urbanisme ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorisation de construire en litige porte sur un ensemble immobilier constitué de huit bâtiments d'habitation collective, dont les rez-de-chaussée sont occupés par neuf commerces, d'une surface hors oeuvre nette de 1 693 m² ; qu'il ressort du rapport sur la conformité du projet avec les règles relatives à la sécurité incendie des commerces, qui constitue la pièce PC 40 du dossier de demande de permis de construire, que la surface accessible au public, qui constitue la surface de vente au sens de l'article L. 751-1 précité, est de 1 106 m² ; qu'ainsi le projet était soumis à une autorisation d'exploitation commerciale dont il est constant que la société pétitionnaire ne l'a pas demandée ; que sa demande de permis de construire ne pouvait, par suite, en l'absence de toute décision de la commission compétente, faire l'objet d'une décision implicite de rejet en application des dispositions de l'article R*424-2 du code de l'urbanisme précitées ;

5. Considérant que la modification mineure de la demande de permis et la production de pièces supplémentaires par la société pétitionnaire le 23 juillet 2012 n'ont pas été de nature à proroger le délai d'instruction qui était en l'espèce de six mois à compter du 3 avril 2012 ; qu'en l'absence de décision expresse dans ce délai, le permis de construire tacite en litige est dès lors intervenu le 3 octobre 2012 ;

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

6. Considérant que lorsque le juge de l'excès de pouvoir est saisi par un tiers d'une décision d'autorisation qui est, en cours d'instance, soit remplacée par une décision de portée identique soit modifiée dans des conditions qui n'en altèrent pas l'économie générale, le délai ouvert au requérant pour contester le nouvel acte ne commence à courir qu'à compter de la notification qui lui est faite de cet acte ; que le permis de construire tacite en litige, portant sur une opération totalisant 35 500 m² de surface hors oeuvre nette et 543 logements, est intervenu au cours de l'instance devant le tribunal administratif de Nice relative à un permis de construire du 16 décembre 2011 autorisant la société Les Roses de Carros à construire, sur le même terrain, 38 000 m² de surface hors oeuvre nette et 593 logements ; que cette dernière autorisation a ainsi été remplacée par une décision de portée identique qui n'a pas été notifiée à l'APEHC ; que, dans ces conditions, les conclusions de l'association tendant à l'annulation du permis de construire en litige, alors même qu'elles ont été présentées le 15 février 2013, plus de deux mois après son affichage le 7 décembre 2012, n'étaient pas tardives ;

En ce qui concerne la légalité du permis de construire en litige :

7. Considérant, comme il a été dit au point 4, que le projet en cause était soumis à une autorisation d'exploitation commerciale dont il est constant que la société pétitionnaire ne l'a pas demandée ; que, dans ces conditions, le maire de Carros ne pouvait légalement délivrer le permis de construire en litige ;

8. Considérant que pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme aucun autre moyen n'est de nature, en l'état de l'instruction, à conduire à l'annulation de la décision en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'APEHC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'APEHC, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Les Roses de Carros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Les Roses de Carros le versement à l'APEHC de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 mai 2015 et le permis de construire tacite délivré le 3 octobre 2012 par le maire de Carros à la société Les Roses de Carros sont annulés.

Article 2 : La société Les Roses de Carros versera à l'association pour l'éco-développement harmonieux de Carros la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la société Les Roses de Carros présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour l'éco-développement harmonieux de Carros, au ministre de la Cohésion des territoires et à la société Les Roses de Carros.

Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Grasse.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Josset, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Gonneau, premier conseiller,

Mme B..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2017.

2

N° 15MA03081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03081
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis. Permis tacite. Existence ou absence d'un permis tacite.


Composition du Tribunal
Président : Mme JOSSET
Rapporteur ?: M. Pierre-Yves GONNEAU
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-09-28;15ma03081 ?
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