Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1604949 du 9 décembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 10 mars 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut de réexaminer sa demande et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous huit jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, lequel renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français:
- les décisions ne sont pas suffisamment motivées ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu l'intérêt supérieur des enfants et a méconnu le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions portent gravement atteinte à sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,
1. Considérant que M. B..., né le 28 novembre 1976, de nationalité arménienne, a déclaré être entré en France le 5 janvier 2012, avec son épouse et ses deux enfants ; que le 16 mars 2012, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ayant rejeté sa demande d'asile, il a fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 10 avril 2012 ; que, le 12 février 2013, la Cour nationale du droit d'asile (Cnda) a rejeté son recours ; que, le 25 mars 2013, il a fait l'objet d'un nouveau refus assorti d'une obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par un jugement du 23 juillet 2013 ; que l'Ofpra ayant rejeté le 6 mai 2013 sa demande de réexamen, il a fait l'objet d'une nouvelle décision de refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par un arrêt de la cour administrative d'appel le 22 octobre 2015 ; que, le 19 mai 2016, il a présenté une nouvelle demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ; que M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B..., entré en France en 2012, s'est immédiatement inscrit à des cours de français, parle couramment le français, s'est parfaitement intégré et travaille depuis juin 2012 à la communauté d'Emmaüs de Saint-Aunes, en tant que cuisinier et bénéficie d'une promesse d'embauche ; que ses deux filles, âgées de 17 et 16 ans, scolarisées de façon continue depuis cinq ans, sont de brillantes élèves ainsi que l'attestent les bulletins scolaires produits et les attestations des enseignants et du proviseur du collège ; que la cadette, inscrite en 3ème, va passer le brevet, alors que l'aînée, en terminale S, va passer le baccalauréat en 2017 ; qu'elles ont ainsi, depuis leur entrée en France, un parcours scolaire exemplaire ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 313-14 ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un délai déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
6. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à M. B... un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
8. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... de la somme de 1 000 euros ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 décembre 2016 et l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet de l'Hérault sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. B... un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt.
Article 3 : L'Etat versera, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros à Me A....
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 28 août 2017, où siégeaient :
- M. Moussaron, président,
- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,
- M. Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 septembre 2017.
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N° 17MA01225