Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par un jugement n° 17MA00376, 17MA00377, en date du 21 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 15 décembre 2016 en tant qu'il refuse d'accorder à M. A... B... un délai de départ volontaire et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017 sous le n° 17MA00376, M. A... B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 décembre 2016 en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Hérault du 15 décembre 2016 portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour ;
3°) d'enjoindre à titre principal au préfet de lui délivrer un titre de séjour lui ouvrant droit au travail dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre à titre subsidiaire au préfet de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- le préfet a méconnu l'étendue de son pouvoir de régularisation ;
- la décision portant interdiction de retour est insuffisamment motivée, ne procède pas d'un examen particulier de sa situation personnelle, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2017 sous le n° 17MA00377, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du 21 décembre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui ouvrant droit au travail dans l'attente de la décision au fond à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 juin 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Chevalier-Aubert, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Cherrier, président de la 4ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chevalier-Aubert ;
- et les observations de MeC..., représentant M. A... B....
1. Considérant que, par requête enregistrée sous le n° 17MA00376, M. A... B..., ressortissant colombien, relève appel du jugement n° 1606231, 1606232 en date du 21 décembre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 décembre 2016 du préfet de l'Hérault portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ; que par requête enregistrée sous le n° 17MA00377, il demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les requêtes n° 17MA00376 et 16MA00377 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;
Sur la requête n° 17MA00376 :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., né le 22 septembre 1968, est entré en France en 2001 muni d'un passeport en cours de validité et d'un visa ; qu'à la suite de son mariage avec une ressortissante française le 29 novembre 2003, il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français ; que la communauté de vie ayant cessé et une procédure de divorce ayant été engagée en juin 2006, il a fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours en date du 8 novembre 2006 ; que le requérant s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français en falsifiant la date de validité de son titre de séjour ; que si M. A... B... se prévaut de sa présence depuis 2001 et de ce qu'il y a exercé une activité professionnelle, il est divorcé et sans charge de famille, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident son père et sa soeur et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de vie privée et familiale, en violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait méconnu l'étendue de sa compétence ni qu'il aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'exercer le pouvoir de régularisation qu'il tient notamment de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que M. A... B... ne peut être regardé, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, comme faisant valoir une circonstance humanitaire ou un motif lui permettant d'être admis à titre exceptionnel au séjour en France ;
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ; qu'il ressort des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères que ces dispositions énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour ;
7. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué vise les textes qui fondent l'interdiction de retour sur le territoire français, notamment les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables à la situation de M. A... B... ; que cet arrêté mentionne les éléments qui ont été pris en considération par le préfet, notamment les circonstances que l'intéressé, s'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public et s'il est entré en France en 2002, y a séjourné irrégulièrement sans effectuer de démarches pour régulariser sa situation, qu'il n'a pas établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, et n'a pas exécuté un précédent arrêté portant refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'une telle motivation énonce suffisamment les considérations de fait et de droit qui ont conduit le préfet à prononcer à l'encontre du requérant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et permet de vérifier que le préfet s'est livré à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé ;
8. Considérant que M. A... B... fait valoir qu'il n'a pas été poursuivi pour l'utilisation d'un titre de séjour falsifié, cette circonstance n'était pas de nature à faire obstacle, à elle seule, au prononcé de l'interdiction de retour en litige, dès lors que la situation de l'intéressé, au regard notamment des autres critères énumérés par les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiait légalement, dans son principe et sa durée, la décision critiquée ; que, dans ces conditions, en prenant cette décision, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies ;
Sur la requête n° 17MA0377 :
10. Considérant que, dès lors qu'il est statué par le présent arrêt sur la requête de M. A... B... tendant à l'annulation du jugement n° 1606231, 1606232 du 21 décembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier, la requête n° 17MA00377, tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement, est devenue sans objet ; qu'il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, les sommes que demande le requérant au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 17MA00377.
Article 2 : La requête n° 17MA00376 de M. A... B... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2017, où siégeaient :
- Mme Chevalier-Aubert, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Boyer, premier conseiller,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.
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N° 17MA00376, 17MA00377