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12/06/2017 | FRANCE | N°15MA01894

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 12 juin 2017, 15MA01894


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Scotto a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le centre hospitalier de Montfavet à lui verser la somme de 54 397,82 euros, augmentée des intérêts de droit, au titre du solde du marché.

Le centre hospitalier de Montfavet a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement Mme K...F...G..., la société Agence d'architecture JL Lauriol, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Coteba développement, la société Aviva assurances, la

société QBE Insurance France, la société Ventoux peinture, la compagnie d'assurance AXA...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Scotto a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le centre hospitalier de Montfavet à lui verser la somme de 54 397,82 euros, augmentée des intérêts de droit, au titre du solde du marché.

Le centre hospitalier de Montfavet a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement Mme K...F...G..., la société Agence d'architecture JL Lauriol, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Coteba développement, la société Aviva assurances, la société QBE Insurance France, la société Ventoux peinture, la compagnie d'assurance AXA, la société Scotto, la société MMA Iard et la société Socotec au paiement de la somme de 1 884 170,99 euros majorée des intérêts légaux.

Par un jugement n° 1202097, 1301198 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, condamné solidairement Mme F...G..., la société Agence d'architectures J.-L. Lauriol, la société Artelia bâtiment et industrie, la société Socotec, la société Scotto et la société Ventoux à payer au centre hospitalier de Montfavet la somme de 46 701,91 euros TTC en réparation des dommages causés par les malfaçons affectant les salles de bains de l'unité pour malades difficiles " Pavillon Esquirol ", assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2013, et de la capitalisation des intérêts, d'autre part, condamné la société Scotto à garantir les autres sociétés condamnées à hauteur de 27 % des sommes dues, la société Ventoux peinture à hauteur de 33 %, Mme F...G..., la société Agence d'architecture J.-L. Lauriol, la société Artelia bâtiment et industrie à hauteur de 30 %, la société Socotec à hauteur de 10 %, par ailleurs, a condamné le centre hospitalier de Montfavet à verser à la société Scotto la somme de 54 937,32 euros au titre du solde de son marché, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 février 2011, enfin a condamné le centre hospitalier de Montfavet à payer, au titre du solde de maîtrise d'oeuvre, les sommes de 12 469,02 euros TTC à Mme F... G...et 1 385,45 euros TTC à la société Agence d'architecture J.-L. Lauriol, assorties des intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2014, et la somme de 7 793,14 euros TTC à la société Artelia bâtiment et industrie, venant aux droits de la société Coteba, au titre du solde du marché de maîtrise d'oeuvre, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2014, et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2015, complétée par des mémoires des 4 août 2016, 18 août 2016, 10 mai 2017 et 19 mai 2017, le Centre hospitalier de Montfavet, représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 12 mars 2015 ;

2°) à titre principal, de condamner solidairement Mme F...G..., la SARL agence architecture J.-L. Lauriol, la SAS Artelia bâtiment et industrie (venant aux droits de la société Coteba développement, venant elle-même aux droits de Thales Inginnering et consulting) à lui verser une somme de 1 884 170,99 euros TTC augmentée des intérêts légaux à compter de la date de saisine du premier juge, et de mettre solidairement à leur charge une somme de 25 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner Mme F...-G..., l'agence d'architecture Lauriol, Artelia Bâtiment et industrie, Ventoux Peintures, la SARL Scotto, la SA Socotec à lui verser les sommes de 83 306,24 euros et 403 180,50 euros ou 360 490,80 euros ou 330 517,92 euros et de mettre solidairement à leur charge une somme de 25 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de rejeter l'appel incident de la société Scotto.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de se prononcer sur le décompte général définitif et ses conséquences sur les comptes entre les parties ;

- chaque notification de décompte général aux entreprises a été acceptée tacitement ;

- son préjudice immatériel doit être réparé et peut s'évaluer au travers de la perte du ticket modérateur et du forfait journalier portant sur les 30 chambres impactées par l'exécution des travaux de reprise des désordres, les journées de déménagement et de réaménagement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 août 2015, 9 mars 2016, 4 avril 2016, 10 juin 2016 et 22 mai 2017, Mme F...-G... et la société d'architecture Lauriol, représentés par la société d'avocats Albertini et Alexandre, concluent au rejet de la requête, à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné le centre hospitalier à verser, au titre des honoraires de l'équipe de maitrise d'oeuvre, les sommes de 12 469,02 euros TTC et 1 385,45 euros TTC à la société agence architecture J.-L. Auriol, et à ce que le centre hospitalier de Montfavet leur verse une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les premiers juges se sont prononcés sur le rôle et les conséquences du décompte général et définitif ;

- les demandes indemnitaires formées par le centre hospitalier ne sont pas justifiées ;

- un partage de responsabilité entre les membres de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, en fonction du tableau de répartition des missions, peut être prononcé ;

- la société Ventoux ne saurait nier la part de responsabilité qui lui est imputable, à hauteur de 33 %, et ne peut reprocher au maitre d'oeuvre un manquement au titre de l'assistance aux opérations de réception.

Par des mémoires, enregistrés les 21 décembre 2015 et 26 février 2016, la SARL Scotto, représentée par la société d'avocats Rivière et Associés, conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête, et par la voie de l'appel incident et provoqué à ce que la somme de 54 397,32 euros TTC mise à la charge du centre hospitalier, soit augmentée des intérêts capitalisés à compter du 22 février 2012, à l'annulation du jugement en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec la société Ventoux Peinture, les maîtres d'oeuvre et le bureau de contrôle à payer au centre hospitalier la somme de 46 701,91 euros TTC et en ce qu'il l'a condamnée à garantir les autres sociétés à hauteur de 27 % des sommes dues, au rejet de toutes les demandes formulées à son encontre et à défaut de dire et juger que les autres sociétés seront condamnées à la garantir de l'ensemble des condamnations et à ce que le centre hospitalier lui verse une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé que les dommages et intérêts dus au centre hospitalier de Montfavet ne sauraient excéder 27 % de la somme de 46 701,91 euros TTC et à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le rapport d'expertise rendu par M. H... est irrégulier ;

- sa responsabilité n'est pas établie dès lors que la société Ventoux peinture a accepté l'ouvrage réalisé par la société Scotto ;

- les désordres résultent de la défaillance de la maîtrise d'oeuvre, du bureau de contrôle technique en phases de conception et de réalisation, des malfaçons imputables à la société Ventoux Peinture, voire d'un défaut d'entretien du centre hospitalier ;

- le centre hospitalier ne verse aucun élément permettant de démontrer la réalité de la perte d'exploitation alléguée ;

- la société Scotto n'a émis aucune réserve et a accepté le décompte général et définitif qui lui a été notifié.

Par des mémoires enregistrés les 1er février, 18 mars et 17 juin 2016, la SARL Ventoux Peinture, représentée par Me D..., conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête, et par la voie de l'appel incident à la condamnation du centre hospitalier au paiement de la somme de 3 000 euros TTC au titre du solde du marché de travaux, somme assortie des intérêts à compter du 1er juin 2010, et à la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à titre subsidiaire, à ce que sa responsabilité ne soit engagée qu'à concurrence de 10 % de la somme de 46 701,91 euros TTC, à la condamnation de la société AXA à la garantir de toute condamnation et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'action en garantie exercée à l'encontre de son assureur décennal AXA relève de la compétence de la juridiction administrative ;

- la responsabilité de la société ne peut être recherchée que sur le fondement de la garantie décennale, sans que le maitre d'ouvrage puisse invoquer le report contractuel de la date de prise d'effet du procès-verbal de réception ;

- la responsabilité de la maitrise d'oeuvre est engagée pour manquement à son obligation d'assistance ;

- la responsabilité des intervenants à la construction, les sociétés Scotto, Ventoux Peinture et le bureau de contrôle Socotec, est engagée ;

- la responsabilité du constructeur peut être engagée en raison de la nature contractuelle des désordres intermédiaires ;

- l'action en garantie exercée par la société à l'encontre de son assureur décennal AXA relève de la compétence de la juridiction administrative ;

- le maître d'ouvrage ne peut invoquer le report contractuel de la date de prise d'effet du procès-verbal de réception ;

- la responsabilité de la maîtrise d'oeuvre est engagée pour manquement à son obligation d'assistance ;

- la responsabilité du constructeur peut être engagée en raison de la nature contractuelle des désordres intermédiaires.

Par des mémoires enregistrés les 27 juin 2016, 30 septembre 2016 et 18 mai 2017, la société Artelia Bâtiment et Industrie, représentée par Me C..., conclut :

- à titre principal au rejet de la requête ;

- à titre subsidiaire, à ce que le préjudice du centre hospitalier soit fixé à la somme de 38 796,44 euros TTC et à la condamnation in solidum de la société Scotto, de la société Ventoux bâtiment second oeuvre, de la société agence architecture J.-L. Auriol, de Mme F...-G... et de la société Socotec à la relever et garantir de toutes condamnations ;

- à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Montfavet et de tout succombant une somme de 10 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le centre hospitalier ne précise pas le fondement juridique de ses demandes ;

- le décompte général et définitif n'a pas été accepté tacitement par chacun des intervenants dès lors que le groupement de maitrise d'oeuvre n'a pas été mis en demeure de produire le projet de décompte final ;

- l'article 12.3 du CCAG PI s'applique ;

- elle n'a commis aucune faute contractuelle ;

- la quote-part de responsabilité de chacun des membres du groupement est de 10 % ;

- l'évaluation du préjudice par le centre hospitalier n'est pas fondée.

Par des mémoires enregistrés les 30 mars 2016 et 11 mai 2017, la société Socotec, représentée par MeB..., conclut :

- à titre principal, aux mêmes fins que la requête, au rejet de la demande du centre hospitalier de Montfavet et à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Montfavet une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à titre subsidiaire, à ce qu'elle soit mise hors de cause ;

- à titre infiniment subsidiaire, de condamner Mme F...-G..., l'agence d'architecture Lauriol, la société Coteba Développement, la société Ventoux Peintures, la SARL Scotto à la relever et la garantir de toutes condamnations ;

Elle soutient que :

- les désordres étaient apparents à la réception des travaux ;

- elle n'est tenue d'aucune obligation à l'égard des entreprises et n'a pas à compenser leur carence ;

- les griefs retenus par l'expert à son encontre ne sont pas fondés ;

- la maîtrise d'oeuvre doit être tenue pour responsable des désordres.

Par un mémoire enregistré le 2 novembre 2016, la société AXA France Iard, représentée par Me I...L..., conclut au rejet des conclusions dirigées à son encontre par la société Ventoux peinture et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société Ventoux Peinture au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les demandes présentées à son encontre sont portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

- les travaux réalisés par la société Ventoux relèvent de la responsabilité contractuelle ; elle n'a commis aucune faute et sa responsabilité ne pourra être engagée au-delà de 10 %.

Un moyen d'ordre public, aux termes duquel " l'appel incident de la société Scotto, tendant à la capitalisation des intérêts à compter de février 2012 soulève un litige distinct de l'appel principal et est par suite irrecevable " a été adressé aux parties.

La société Scotto a répondu au moyen d'ordre public par un courrier du 18 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur ;

- les conclusions de M. Thiéle, rapporteur public ;

- et les observations de Me J... pour le centre hospitalier de Montfavet, de Me A...'hostis pour Mme F...-G..., de Me I... pour Axa France Iard. .

1. Considérant que le centre hospitalier de Montfavet a engagé une opération de reconstruction de l'unité pour malades difficiles (UMD) " Pavillon Esquirol " ; que le contrôle technique de l'opération a été assuré par la société Socotec, selon acte d'engagement du 18 octobre 2001 ; que, par acte d'engagement du 5 mars 2002, la maîtrise d'oeuvre de l'opération a été confiée à un groupement constitué notamment de Mme F...-G..., mandataire, de la société Agence d'architecture J.-L. Lauriol, de la société Thalès aux droits de laquelle se sont substituées la société Coteba puis la société Artelia bâtiment et industrie ; que les travaux de gros oeuvre (lot n° 2) ont été confiés à la société Scotto, par acte d'engagement accepté le 28 septembre 2005 ; que les travaux relatifs aux revêtements de sols souples, peintures et revêtements muraux (lots n° 10 et 12) ont été assurés par la société Ventoux peinture, selon acte d'engagement du 31 janvier 2007 ; que les travaux de gros-oeuvre ont été réceptionnés le 26 juillet 2007, alors qu'un report de réception a été fixé pour les travaux de peinture ; que des désordres, affectant certaines chambres de l'unité se sont manifestés lors de la mise en service des bâtiments, conduisant le maître d'ouvrage à mettre en demeure les sociétés Scotto et Ventoux peinture de reprendre leurs travaux, par courrier du 14 mai 2008 ; qu'à la demande du centre hospitalier, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a désigné M. H... en qualité d'expert, par ordonnance du 8 septembre 2008, aux fins de déterminer notamment la nature et l'étendue des dommages, leur cause, et les travaux utiles pour y remédier ; que M. H... a remis son rapport au tribunal le 25 mars 2009 ; que le centre hospitalier de Montfavet relève appel du jugement du 12 mars 2015 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a partiellement rejeté ses conclusions et en tant que, par ses articles 3 et 4, il l'a condamné à payer à la société Scotto et à Mme F...-G..., à la société Agence d'architecture J.-L. Lauriol, la société Thalès aux droits de laquelle se sont substituées la société Coteba puis la société Artelia bâtiment et industrie le solde de leurs marchés respectifs ;

Sur l'appel principal du centre hospitalier de Montfavet :

S'agissant des décomptes généraux :

2. Considérant que les décomptes généraux notifiés aux constructeurs en novembre 2011 et septembre 2012 ont été établis sans que le maître d'ouvrage ait reçu préalablement des projets de décompte final ni mis en demeure les entreprises concernées de les lui adresser, n'ont pas été signés par le maître d'oeuvre, et ont inclus une somme de 18 884 170,99 euros, correspondant au préjudice que le centre hospitalier estime avoir subi au titre des désordres affectant les douches des chambres du pavillon reconstruit ; que cette somme est exigée au titre de la garantie décennale et ne saurait figurer dans le décompte général, lequel ne retrace que les créances et dettes contractuelles; que pour chacun de ces motifs, ces décomptes généraux sont irréguliers ; qu'en conséquence, le centre hospitalier de Montfavet ne peut, ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges qui se sont prononcés sur ce moyen aux points 8 et 28 de leur jugement, se prévaloir d'une créance sur les intervenants à l'acte de construire à raison de décomptes généraux définitifs ;

S'agissant de l'évaluation du préjudice :

3. Considérant en premier lieu, que le centre hospitalier ne démontre pas avoir dû exposer des frais supplémentaires excédant ses charges normales de fonctionnement ; que, par suite, ses conclusions tendant au remboursement de frais liés au temps passé par les personnels de l'établissement concernés par la gestion des désordres pour un montant de 36 875,77 euros doivent être rejetées ;

4. Considérant en deuxième lieu, que le centre hospitalier se prévaut de journées d'hospitalisation perdues pendant les travaux de reprise pour un montant total de 1 082 728,50 euros ; que toutefois, dès lors qu'il n'établit pas que la perte de recettes correspondante excèderait le montant des charges courantes supplémentaires qui auraient dû être exposées en cas de mise en service des locaux, il ne justifie pas de l'existence d'un manque à gagner à ce titre ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes concernant ces chefs de préjudice ; qu'il y a lieu par suite de rejeter ses conclusions d'appel principal ;

Sur l'appel incident de la société Scotto :

6. Considérant en premier lieu, que l'appel incident de la société Scotto, tendant à la capitalisation des intérêts à compter du 22 février 2012, soulève un litige distinct de celui que soulève l'appel principal du centre hospitalier de Montfavet contestant l'évaluation retenue par les premiers juges ; que, par suite ces conclusions ne sont pas recevables ;

7. Considérant en deuxième lieu, qu'il ressort du rapport d'expertise que l'insuffisance de la pente des chapes réalisées par la société Scotto est à l'origine des désordres qui affectent les salles de bains de l'unité pour malades difficiles ; que, d'une part, la circonstance que la chape ait été coulée conformément à la position du siphon mis en place par la société Ventoux Peinture et que le support ait été accepté par ladite société n'est pas de nature à exonérer la société Scotto de sa responsabilité ; que, d'autre part, à supposer même que les conditions d'entretien des siphons bouchés ultérieurement par des cheveux aient pu contribuer à l'apparition ou à l'ampleur des désordres, cette circonstance est sans incidence dès lors que les désordres préexistaient ; qu'enfin, le défaut de pente, dont l'expert a relevé le caractère difficilement perceptible, doit être regardé comme inapparent lors de la réception des travaux ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Scotto n'est pas fondée à soutenir que sa responsabilité n'est pas établie et ne peut être engagée in solidum avec les autres constructeurs au titre de la garantie décennale des constructeurs ;

Sur l'appel incident de la société Ventoux Peinture :

9. Considérant en premier lieu qu'il résulte de ce qui a été dit au point 8 ci-dessus que les défauts d'exécution des pentes de douche n'étaient pas apparents lors de la réception ; que la société Ventoux Peinture ne peut dès lors soutenir que les désordres ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs ;

10. Considérant en second lieu, que chacun des coauteurs d'un même dommage doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilités entre les coauteurs, lequel affecte les rapports réciproques de ces derniers mais non le caractère et l'étendue de leur obligation à l'égard de la victime du dommage ; que, par suite, les conclusions de la société tendant à ce que sa responsabilité à l'égard du centre hospitalier ne soit engagée qu'à hauteur de 10 % de la somme de 46 701,91 euros ne peuvent qu'être rejetées ;

11. Considérant en troisième lieu que la société Ventoux peinture n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'elle détient une créance sur le centre hospitalier, pour une somme de 3 000 euros, au titre du solde du marché ;

Sur l'appel incident de Mme F...-G... :

12. Considérant que les frais engagés au titre des mesures conservatoires pour l'achat de seuils d'étanchéité et d'aspirateurs à eau et pour le nettoyage supplémentaire de draps, ainsi que ceux liés à l'accident du travail d'un agent, retenus par l'expert, sont la conséquence des désordres relevés ci-dessus et ne peuvent être regardés comme relevant du fonctionnement normal de l'établissement ; que dans ces conditions, Mme F... G...n'est pas fondée à soutenir que ces frais n'étaient pas indemnisables au titre de la responsabilité décennale des constructeurs ;

Sur l'appel incident de la société Socotec :

13. Considérant que la société Socotec, qui demande à être mise hors de cause, ne peut invoquer le caractère apparent des désordres, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 ; que par ailleurs, la société, investie de la mission " F " de contrôle du fonctionnement des installations, ne peut soutenir que les désordres ne lui sont pas imputables ;

Sur l'appel incident de la société Artelia :

14. Considérant d'une part, que la société Artelia, membre du groupement de maîtrise d'oeuvre chargé de la direction de l'exécution des travaux ne peut soutenir utilement qu'elle n'a pas commis de faute dès lors que les membres d'un groupement solidaire sont solidairement tenus à l'ensemble des obligations s'imposant à chacun des membres du groupement, et en particulier à l'obligation de la garantie décennale ; que, d'autre part, la société Artelia n'apporte aucun élément de nature à établir que les travaux de reprise ayant donné lieu à indemnisation excèdent ceux désignés par l'expert comme nécessaires à la réparation des désordres ;

Sur les appels provoqués de la maîtrise d'oeuvre et des sociétés Scotto et Ventoux Peinture :

15. Considérant que le présent arrêt n'emporte aucune aggravation de la situation de la maîtrise d'oeuvre et des sociétés Scotto et Ventoux Peinture; que leurs conclusions présentées par la voie de l'appel provoqué ne sont donc pas recevables ;

16. Considérant que les conclusions d'appel provoqué de la société Ventoux Peinture à l'encontre de la société Axa doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître dès lors que ce litige a pour fondement le contrat de droit privé liant le constructeur à la compagnie Axa ; que dans cette mesure, le jugement du tribunal administratif, qui s'est prononcé au fond sur de telles conclusions, doit être annulé ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif est annulé en tant que les premiers juges se sont prononcés sur les conclusions dirigées contre la société Axa.

Article 2 : La demande présentée par la société Ventoux Peinture et dirigée contre la compagnie Axa Iard France est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Montfavet, à Mme K... F...G..., à la société Agence d'architecture J.-L. Lauriol, à la SAS Artelia Bâtiment et Industrie, à la SARL Ventoux Peinture, à la SARL Scotto, à la SA Socotec et à la société Axa France Iard.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2017, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Steinmetz-Schies, président-assesseur,

- M. Gautron, conseiller,

Lu en audience publique, le 12 juin 2017.

8

N° 15MA01894


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01894
Date de la décision : 12/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : SCP RIVIERE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-12;15ma01894 ?
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