La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2017 | FRANCE | N°15MA03781

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 06 juin 2017, 15MA03781


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 2 février 2014 par lequel le maire de la commune de Cardet a refusé de lui délivrer un permis de construire un hangar agricole.

Par un jugement n° 1401204 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 2 février 2014 du maire de la commune de Cardet.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 septembre 2015, le 18 janvier 2016 et le 8 mai

2017, la commune de Cardet, représentée par la Selarl d'avocats Juris Publica, demande à la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 2 février 2014 par lequel le maire de la commune de Cardet a refusé de lui délivrer un permis de construire un hangar agricole.

Par un jugement n° 1401204 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 2 février 2014 du maire de la commune de Cardet.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 septembre 2015, le 18 janvier 2016 et le 8 mai 2017, la commune de Cardet, représentée par la Selarl d'avocats Juris Publica, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 9 juillet 2015 ;

2°) de mettre à la charge de M. B..., outre les dépens, la somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le vice de procédure entachant l'arrêté du 2 février 2014 n'a privé M. B... d'aucune garantie ;

- ce vice doit, en tout état de cause, être neutralisé eu égard aux circonstances exceptionnelles et particulières du retrait ainsi qu'à la nécessaire préservation de l'intérêt général.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2015, M. B..., représenté par la SCP d'avocats Margall-d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Cardet la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massé-Degois,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me C... représentant la commune de Cardet et de Me D... représentant M. B....

1. Considérant que M. B... a présenté, le 4 novembre 2013, une demande de permis de construire un hangar agricole sur un terrain situé impasse des Rouvières sur le territoire de la commune de Cardet ; que le maire de la commune, par un arrêté daté du 2 février 2014, a refusé le permis sollicité ; que, par un jugement du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Nîmes, après avoir regardé l'arrêté du 2 février 2014 notifié le 6 février 2014, soit postérieurement à la date d'expiration du délai d'instruction de trois mois, comme procédant au retrait du permis de construire accordé tacitement à M. B... le 4 février 2014, l'a annulé pour méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ; que la commune de Cardet relève appel de ce jugement du 9 juillet 2015 du tribunal administratif de Nîmes ;

2. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme le permis de construire est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction et que selon l'article R. 423-19 du même code le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet ; qu'aux termes de l'article R. 423-22 de ce code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. " ; que l'article R. 423-23 dudit code dispose que : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) b) Deux mois pour les demandes (...) de permis de construire portant sur une maison individuelle, au sens du titre III du livre II du code de la construction et de l'habitation, ou ses annexes ; / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire (...) " ; que l'article R. 424-1 du même code précise que : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : (...) b) Permis de construire (...) tacite. " ; qu'en vertu de l'article R. 424-10 du même code, la décision accordant ou refusant le permis est notifiée au demandeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal ou par transmission électronique ;

3. Considérant qu'en application de ces dispositions le demandeur d'un permis de construire n'est réputé être titulaire d'un permis tacite que lorsqu'aucune décision ne lui a été notifiée avant l'expiration du délai réglementaire d'instruction de son dossier ; que cette notification doit être regardée comme étant intervenue à la date à laquelle le pli a été présenté pour la première fois à son adresse ;

4. Considérant que le courrier du 3 décembre 2013 par lequel la commune de Cardet a sollicité la production de pièces afin de compléter le dossier de demande de permis de construire déposée en mairie par M. B... le 4 novembre 2013 a été notifié à ce dernier le 10 décembre 2013, soit après l'expiration du délai d'un mois à compter du dépôt de la demande prévu par les dispositions de l'article R. 423-22 précité ; qu'il s'ensuit, le dossier de permis de construire devant être réputé complet à compter de sa réception en mairie, que le délai d'instruction de la demande a commencé à courir à compter du 4 novembre 2013 ; que si le courrier du 3 décembre 2013 a mentionné à tort un délai d'instruction de deux mois alors que le projet ne porte pas sur une maison individuelle, cette circonstance n'a pas fait obstacle à ce que le délai réglementaire de trois mois prévu par le c) de l'article R. 423-23 commence à courir à compter de la date du 4 novembre 2013 ; que dès lors que M. B... a reçu notification le 5 février 2014 de la décision du maire de la commune de Cardet, datée du 2 février 2014, lui refusant de lui délivrer le permis de construire sollicité, soit après l'expiration du délai d'instruction de sa demande, cet arrêté doit être regardé comme procédant au retrait du permis de construire tacite né le 4 février 2014 en l'absence de notification à cette date d'une décision expresse portant rejet de la demande, ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 alors en vigueur : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales.(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative compétente pour adopter une décision individuelle entrant dans leur champ de mettre la personne intéressée en mesure de présenter des observations ;

6. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté par la commune de Cardet, que la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'a pas été mise en oeuvre préalablement à l'intervention de l'arrêté portant retrait du permis tacitement accordé devant être motivé en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public alors en vigueur ;

7. Considérant, toutefois, qu'un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que le respect, par l'autorité administrative compétente, de la procédure prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, constitue une garantie pour le titulaire du permis que le maire envisage de retirer qui découle du caractère contradictoire de la procédure et du principe des droits de la défense ; que la décision de retrait prise par le maire est ainsi illégale s'il ressort de l'ensemble des circonstances de l'espèce que le titulaire du permis a été effectivement privé de cette garantie ;

8. Considérant que M. B..., qui ignorait que le maire de la commune de Cardet était susceptible de procéder au retrait du permis de construire dont il était bénéficiaire depuis le 4 février 2014, n'a ni présenté d'observations écrites ou orales, ni été mis à même de présenter de telles observations avant que n'intervienne la décision en litige ; que, dans ces conditions, une telle circonstance qui a privé M. B... d'une garantie, a constitué une irrégularité de nature à entacher d'illégalité l'arrêté contesté du maire de Cardet sans que la commune puisse utilement invoquer les circonstances particulières du retrait ou la préservation de l'intérêt général ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Cardet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 2 février 2014 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Cardet demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Cardet une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Cardet est rejetée.

Article 2 : La commune de Cardet versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cardet et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 19 mai 2017, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Massé-Degois, première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 juin 2017.

2

N° 15MA03781


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03781
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02-01-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis. Permis tacite. Retrait.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL JURIS PUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-06;15ma03781 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award