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30/05/2017 | FRANCE | N°16MA00741

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 30 mai 2017, 16MA00741


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'années 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1403220 du 5 janvier 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 février 2016 et le 22 septembre suivant, M. B..., représe

nté par Me A... et Roca, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'années 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1403220 du 5 janvier 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 février 2016 et le 22 septembre suivant, M. B..., représenté par Me A... et Roca, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 janvier 2016 ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge de l'imposition et des pénalités contestées ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction de l'imposition et des pénalités en litige ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur ses conclusions subsidiaires tendant à ce que le coefficient de marge concernant les fournisseurs et les sous-traitants soit limité respectivement à 1,1 et 1,05 ;

- les opérations de cession immobilière qu'il a réalisées en 2010 ne présentent ni le caractère habituel ni le caractère spéculatif permettant de les regarder comme relevant du régime d'imposition des bénéfices industriels et commerciaux ;

- l'administration a méconnu les énonciations de la doctrine administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-40-10 et BOI TVA-CHAMP-20-10-10 n° 70 ;

- les rectifications relatives à une insuffisance de facturation de matériaux et de travaux de construction reposent sur l'application de taux de marge excessifs ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas fondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boyer,

- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,

- et les observations de M. B....

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de l'activité de maçonnerie générale exercée par M. B..., l'administration fiscale a notifié à ce dernier un rehaussement de l'impôt sur le revenu de l'année 2010, en raison d'une part de la vente de deux logements dont le produit a été regardé par le vérificateur comme constituant un profit de construction, et d'autre part, d'une insuffisance de facturation par l'entreprise de M. B... de travaux immobiliers relatifs aux immeubles comprenant ces logements ; que M. B... relève appel du jugement du 5 janvier 2016 du tribunal administratif de Montpellier rejetant sa demande de décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a ainsi été assujetti ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement contesté que le tribunal administratif de Montpellier n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, soulevé par M. B... et tiré de ce que les rectifications relatives à une insuffisance de facturation de matériaux et de travaux immobiliers reposent sur l'application de taux de marge excessifs ; que, par suite, ce jugement doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur le bien-fondé de l'imposition de profits de construction :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. Considérant, qu'aux termes du I de l'article 35 du code général des impôts : " Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'application du régime d'imposition relatif aux bénéfices industriels et commerciaux est subordonnée à la réalisation de telles opérations à titre habituel dans une intention spéculative ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. B... a acquis en 2007 deux terrains nus sur le territoire de la commune de Corbère pour un montant global de 172 880 euros dans le but d'édifier un immeuble composé de deux logements sur chacun des terrains ; qu'il a cédé un premier logement ainsi construit en avril 2010 et un deuxième en octobre 2010 pour le prix de 110 000 euros chacun ; que le ministre fait valoir sans être contredit que M. B... avait précédemment effectué deux opérations similaires en achetant en 2003 et 2004 deux terrains nus sur le territoire de la commune de Terrats, sur lesquels il avait fait construire deux maisons d'habitation, qu'il a revendues, l'une en 2004, et l'autre en 2005 ; qu'entre 2003 et 2010 M. B... a ainsi acquis quatre terrains nus, a édifié des constructions sur ces terrains, et a procédé à la cession, dès leur achèvement, de la plupart des logements construits ; que si M. B... soutient que les ventes réalisées en 2003 et 2004 étaient en relation avec la séparation du couple qu'il formait avec son épouse, il ressort des termes du jugement de divorce du 9 juin 2008 qu'il a versé au débats que les immeubles en cause ne constituaient pas la résidence des intéressés, laquelle n'a été vendue qu'en 2007 et que la date de résidence séparée a été fixée au mois de novembre 2004, alors qu'étaient déjà intervenues la première vente et l'acquisition du terrain d'assiette de la seconde opération ; que le ministre fait également valoir sans être contredit que les deux logements dont M. B... était resté propriétaire à la suite des cessions effectuées en 2010 ont été vendus en 2014 et 2015 ; que, dans ces conditions, les opérations réalisées par M. B... en 2010, à raison desquelles a été mis à sa charge le supplément d'impôt sur le revenu qu'il conteste, doivent être regardées comme faisant partie d'une série d'opérations d'achats et de reventes de biens immobiliers réalisées de manière habituelle ; qu'il résulte, d'autre part, de l'instruction que, compte tenu de la brièveté du délai qui s'est écoulé entre l'achat des terrains et la revente des immeubles en cause et alors que les cessions réalisées en 2010 ont permis à M. B... d'acquérir un nouveau terrain à bâtir, ce dernier ne peut être regardé comme ayant procédé à la simple gestion de son patrimoine personnel ; que M. B... n'apporte pas de pièces probantes au soutien de ses allégations selon lesquelles la vente des immeubles aurait été motivée par des difficultés financières liées à des travaux supplémentaires, alors notamment que le ministre relève que ces travaux ne représentaient qu'un peu plus de 5 % du budget prévisionnel de l'opération de construction, et que le produit des ventes lui a permis, ainsi qu'il vient d'être dit, d'acquérir un nouveau terrain constructible d'une valeur de 90 000 euros ; que, eu égard à l'ensemble de ces éléments, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance, à la supposer établie, qu'un prêt à long terme ait été souscrit lors de l'acquisition des terrains, les opérations immobilières en litige doivent être regardées comme procédant d'une intention spéculative ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que M. B... exerçait une activité imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application des dispositions précitées de l'article 35-I du code général des impôts ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine :

5. Considérant que M. B... se prévaut, d'une part, des énonciations de la documentation administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-40-10, selon lesquelles une opération de construction portant sur moins de dix appartements ou cinq maisons individuelles réalisée par une personne physique est présumée relever de la gestion du patrimoine privé en réservant l'hypothèse où les circonstances de fait permettent de démontrer que le cédant a réalisé une opération qui s'intègre dans un ensemble d'opérations visées aux 1° et 1°bis du I de l'article 35 du code général des impôts, et, d'autre part, celles de la documentation administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-10-10 n° 70, qui indiquent que la cession d'immeubles construits depuis moins de quinze ans peut être exclue du champ d'application du 1°bis du I de l'article 35 du code général des impôts si le cédant est en mesure de prouver qu'il a construit sans intention de revendre ; que la doctrine exprimée par ces énonciations ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt ; que, dès lors, elle ne saurait être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur l'insuffisance de facturation :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature, effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. Les travaux en cours sont évalués au prix de revient. " ;

7. Considérant que lors de la vérification de comptabilité de l'activité de M. B..., le vérificateur a relevé que les facturations des travaux immobiliers effectués pour le compte du requérant sur les terrains situés à Corbère, soit directement par son entreprise soit par des sous-traitants, avaient été sous-évaluées ; que pour déterminer les coûts de revient de ces travaux il a appliqué un coefficient de 1,20 sur le montant hors taxes des travaux de sous-traitance et un coefficient de 1,5 sur les marchandises facturées à l'entreprise ; que pour demander l'abandon de ces rectifications ou à défaut leur réduction par application de coefficients respectivement ramenés à 1,05 et 1,1, M. B... se borne à faire valoir que les remises des fournisseurs, qui ont été imputées sur les prix pratiqués par son entreprise, n'ont pas été prises en compte ; que, toutefois, M. B... ne produit aucun élément au soutien de ses allégations alors que le ministre fait valoir sans être contredit que les coefficients retenus par le service ont été déterminés à partir des indications fournies au cours des opérations de contrôle par l'appelant, dans la mesure où ce dernier n'a pu justifier du montant des refacturations, ni apporter des éléments probants sur la nature exacte des travaux réalisés par son entreprise ainsi que sur la détermination des montants refacturés, ni préciser la marge moyenne de son entreprise ; qu'ainsi, et alors au demeurant que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a estimé que les taux de marge de 1,05 et 1,1 revendiqués par M. B... " seraient de nature à rendre son activité structurellement déficitaire ", le requérant n'est pas fondé à contester la rectification ci-dessus analysée ;

Sur les pénalités :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscales dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ; " ;

9. Considérant que la majoration de 40 % prévue par ces dispositions a été appliquée aux seules rectifications correspondant à l'insuffisance de refacturation des travaux effectués pour le compte de M. B... ; qu'en retenant à juste titre que ce dernier ne pouvait ignorer que son entreprise ne lui facturait pas la totalité des matériaux utilisés et des prestations réalisées, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré reproché au requérant ; que, dès lors, il ne peut être fait droit aux conclusions de M. B... tendant à la décharge de la pénalité qui lui a été infligée sur le fondement du a) de l'article 1729 du code général des impôts ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander la décharge, même partielle, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'années 2010, ainsi que des pénalités correspondantes ; que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, être accueillies ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1403220 du 5 janvier 2016 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions d'appel et la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2017, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 mai 2017.

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N° 16MA00741

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00741
Date de la décision : 30/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BOYER
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : CABINET HERVE GERMA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-05-30;16ma00741 ?
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