Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1403221 du 5 janvier 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 février 2016 et le 22 septembre suivant, M. B..., représenté par Me A... et Roca, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 janvier 2016 ;
2°) à titre principal de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) à titre subsidiaire de prononcer la réduction des impositions et pénalités en litige ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les opérations de cession immobilière qu'il a réalisées en 2010 ne présentent ni le caractère habituel ni le caractère spéculatif permettant de les regarder comme relevant du régime d'imposition des bénéfices industriels et commerciaux ;
- l'administration a méconnu les énonciations de la doctrine administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-40-10 et BOI TVA-CHAMP-20-10-10 n° 70 ;
- les rectifications relatives à une insuffisance de facturation de matériaux et de travaux de construction reposent sur l'application de taux de marge excessifs ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boyer,
- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public ;
- et les observations de M. B....
1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de l'activité de maçonnerie générale exercée par M. B..., l'administration fiscale a notifié à ce dernier des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, à raison d'une part de la vente, en 2010, de deux logements dont le produit a été regardé par le vérificateur comme constituant un profit de construction taxable, et d'autre part, d'une insuffisance de facturation par l'entreprise de M. B... de travaux immobiliers relatifs aux immeubles comprenant ces logements ; que M. B... relève appel du jugement du 5 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires auxquelles il a ainsi été assujetti ;
Sur le bien-fondé de la taxation des profits de construction :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Considérant, qu'aux termes du 6° de l'article 257 du code général des impôts, sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : " Les opérations qui portent sur des immeubles, des fonds de commerce ou des actions ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux " ; qu'aux termes du I de l'article 35 du code général des impôts : " Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce (...) " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que l'application du régime d'imposition relatif aux bénéfices industriels et commerciaux est subordonnée à la réalisation de telles opérations à titre habituel dans une intention spéculative ;
3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. B... a acquis en 2007 deux terrains nus sur le territoire de la commune de Corbère pour un montant global de 172 880 euros dans le but d'édifier un immeuble composé de deux logements sur chacun de ces terrains ; qu'il a cédé un premier logement ainsi construit en avril 2010 et un deuxième en octobre 2010 au prix de 110 000 euros chacun ; que le ministre fait valoir sans être contredit que M. B... avait précédemment effectué deux opérations similaires en achetant en 2003 et 2004 deux terrains nus sur le territoire de la commune de Terrats, sur lesquels il avait fait construire deux maisons d'habitation qu'il a revendues, l'une en 2004 et l'autre en 2005 ; qu'entre 2003 et 2010, M. B... a ainsi acquis quatre terrains nus, a édifié des constructions sur ces terrains, et a procédé à la cession, dès leur achèvement, de la plupart des logements construits ; que si M. B... soutient que les ventes réalisées en 2003 et 2004 étaient liées à la séparation du couple qu'il formait avec son épouse, il ressort du jugement de divorce du 9 juin 2008 qu'il a versé aux débats que les immeubles en cause ne constituaient pas la résidence des intéressés, laquelle n'a été vendue qu'en 2007, et que la date de résidence séparée a été fixée au mois de novembre 2004, alors qu'étaient déjà intervenues la première vente et l'acquisition du terrain d'assiette de la seconde opération ; que le ministre fait également valoir, sans être contredit que les deux logements dont M. B... était resté propriétaire à la suite des cessions effectuées en 2010, ont été vendus en 2014 et 2015 ;
que, dans ces conditions, les opérations réalisées par M. B... en 2010, à raison desquelles ont été mis à sa charge les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qu'il conteste, doivent être regardées comme faisant partie d'une série d'opérations d'achat et de revente de biens immobiliers réalisées de manière habituelle ; qu'il résulte, d'autre part, de l'instruction que, compte tenu de la brièveté du délai qui s'est écoulé entre l'achat des terrains et la revente des immeubles en cause et alors que les cessions réalisées en 2010 ont permis à M. B... d'acquérir un nouveau terrain à bâtir, ce dernier ne peut être regardé comme ayant procédé à la simple gestion de son patrimoine personnel ; que le requérant n'apporte pas de pièces probantes au soutien de ses allégations selon lesquelles les opérations de cession réalisées en 2010 auraient été motivées par des difficultés financières liées à des travaux supplémentaires, alors notamment que le ministre relève que ces travaux ne représentaient qu'un peu plus de 5 % du budget prévisionnel de l'opération de construction, et que le produit des ventes lui a permis, ainsi qu'il vient d'être dit, d'acquérir un nouveau terrain constructible d'une valeur de 90 000 euros ; que, eu égard à l'ensemble de ces éléments, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance, à la supposer établie, qu'un prêt à long terme ait été souscrit lors de l'acquisition des terrains, les opérations immobilières en litige doivent être regardées comme procédant d'une intention spéculative ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que M. B... exerçait une activité relevant du régime d'imposition relatif aux bénéfices industriels et commerciaux et a soumis les profits retirés de cette activité à la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées du 6° de l'article 257 du code général des impôts ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
4. Considérant que M. B... se prévaut, d'une part, des énonciations de la documentation administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-40-10, selon lesquelles une opération de construction portant sur moins de dix appartements ou cinq maisons individuelles réalisée par une personne physique est présumée relever de la gestion du patrimoine privé en réservant l'hypothèse où les circonstances de fait permettent de démontrer que le cédant a réalisé une opération qui s'intègre dans un ensemble d'opérations visées aux 1° et 1°bis du I de l'article 35 du code général des impôts, et d'autre part celles de la documentation administrative référencée BOI TVA-CHAMP-20-10-10 n° 70, qui indiquent que la cession d'immeubles construits depuis moins de quinze ans peut être exclue du champ d'application du 1°bis du I de l'article 35 du code général des impôts si le cédant est en mesure de prouver qu'il a construit sans intention de revendre ; que la doctrine exprimée par ces énonciations ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt ; que, dès lors, elle ne saurait être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Sur l'insuffisance de facturation :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. (..) " ;
6. Considérant que lors de la vérification de comptabilité de l'activité de M. B..., le vérificateur a relevé que les facturations des travaux immobiliers effectués pour le compte du requérant sur les terrains situés à Corbère, soit directement par son entreprise soit par des sous-traitants, avaient été sous-évaluées ; que pour déterminer le coût de revient de ces travaux, il a appliqué un coefficient de marge de 1,20 sur le montant hors taxes des travaux de sous-traitance et un coefficient de 1,5 sur les marchandises facturées à l'entreprise ; qu'il a, par suite, retenu au titre des années 2009 et 2010 un chiffre d'affaires supplémentaire générant une taxe sur la valeur ajoutée collectée à hauteur de 2 907 euros et 9 850 euros ; que pour demander l'abandon de ces rectifications ou à défaut leur réduction par application de coefficients respectivement ramenés à 1,05 et 1,1, M. B... se borne à faire valoir que les remises de ses fournisseurs, qui ont été imputées sur les prix pratiqués par son entreprise, n'ont pas été prises en compte ; que, toutefois M. B... ne produit aucun élément au soutien de ses allégations alors que le ministre fait valoir sans être contredit que les coefficients retenus par le service ont été déterminés à partir des indications fournies au cours des opérations de contrôle par l'appelant, dans la mesure où ce dernier n'a pu justifier du montant des refacturations, ni apporter des éléments probants sur la nature exacte des travaux réalisés par son entreprise ainsi que sur la détermination des montants refacturés, ni préciser la marge moyenne de son entreprise ; qu'ainsi, et alors au demeurant que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a estimé que les taux de marge de 1,05 et 1,1 revendiqués par M. B... " seraient de nature à rendre son activité structurellement déficitaire ", le requérant n'est pas fondé à contester la rectification ci-dessus analysée ;
Sur les pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscales dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ; " ;
8. Considérant que la majoration de 40 % prévue par ces dispositions a été appliquée aux seules rectifications correspondant à l'insuffisance de refacturation des travaux effectués pour le compte de M. B... ; qu'en retenant à juste titre que ce dernier ne pouvait ignorer que son entreprise ne lui facturait pas la totalité des matériaux utilisés et des prestations réalisées, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré reproché au requérant ; que, dès lors, il ne peut être fait droit aux conclusions de M. B... tendant à la décharge de la pénalité qui lui a été infligée sur le fondement du a) de l'article 1729 du code général des impôts ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, être accueillies ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2017, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 mai 2017.
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N° 16MA00740
nc