Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...F..., épouseE..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté en date du 15 avril 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 1504786 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 avril 2016, Mme F..., épouseE..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 septembre 2015 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 15 avril 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dès notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 800 euros en application des articles 37 et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'un défaut de motivation ;
- sa motivation est contradictoire et inopérante ;
- l'arrêté attaqué ne répond pas aux exigences de motivation fixées par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale dès lors qu'elle a subi des violences conjugales ;
- il a commis une erreur de droit en ne l'admettant pas au séjour pour des motifs exceptionnels et des considérations humanitaires ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle a été prise sans considération de la durée de son séjour et de sa situation personnelle actuelle alors qu'elle est suivie par des associations d'aide aux victimes de violences conjugales.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme E... a été rejetée par une décision du 29 février 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Portail a été lu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme F... épouseE..., ressortissante algérienne née le 2 septembre 1995, est entrée en France le 15 août 2013 sous couvert d'un visa portant la mention " famille de français " ; qu'elle s'est vue délivrer un certificat de résidence algérien valable du 24 septembre 2013 au 23 septembre 2014 ; qu'elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français le 10 octobre 2014 ; que, par arrêté du 15 avril 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que Mme E... relève appel du jugement du 17 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu aux moyens soulevés par Mme E... dans sa demande, et notamment celui tiré de ce qu'elle aurait droit, eu égard aux violences conjugales dont elle prétend avoir été victime, et compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, à une mesure de régularisation ; qu'en outre, le jugement n'est entaché d'aucune contradiction entre ses motifs et son dispositif ; que, par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé ou entaché de contradiction ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée, désormais codifié à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
4. Considérant que l'arrêté du 15 avril 2015 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il vise notamment les dispositions de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, précise que Mme E... ne justifie pas d'une communauté de vie effective avec son époux de nationalité française, n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'elle ne peut bénéficier d'une des protections prévues par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...). Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2 ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. " ; que ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France ; que si une ressortissante algérienne ne peut dès lors utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E... a déposé plainte contre son conjoint, M. D... E..., pour violences le 9 décembre 2014 et a indiqué aux services de police avoir quitté le domicile conjugal un mois auparavant ; que, par une main courante du 3 décembre 2014, M. E... a également indiqué aux services de police que son épouse avait quitté le domicile conjugal et de ce qu'il la soupçonnait d'avoir contracté mariage avec un ressortissant français dans le seul but d'obtenir un titre de séjour ; qu'ainsi, il est constant qu'à la date à laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a pris son arrêté, Mme E... était séparée de son époux et ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux lui ouvrant droit au renouvellement de son certificat de résidence en qualité de conjoint d'un ressortissant français ; que si le rappel à la loi prononcé contre M. E... le 28 juillet 2015 par le substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille atteste de la réalité des violences subies par Mme E..., cette seule circonstance n'est pas de nature à la faire bénéficier de plein droit du renouvellement de son titre de séjour ; que Mme E..., qui est entrée récemment sur le territoire français en août 2013, ne justifie pas d'une présence continue sur le territoire ni d'une insertion dans la société française ; qu'elle n'exerce aucune activité professionnelle et n'apporte aucune précision sur les liens qu'elle aurait pu tisser sur le territoire français ; que, par ailleurs, née en 1995, elle ne soutient pas être dépourvue de tout lien en Algérie où elle a vécu la majeure partie de sa vie ; que, dans ces conditions, et eu égard aux conditions de séjour en France de l'intéressée, et du court délai qui s'est écoulé entre la rupture de la vie commune en décembre 2014 et la décision contestée du 15 avril 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de sa situation personnelle en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour ;
7. Considérant, en troisième lieu, que, si les ressortissants algériens ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à la circonstance que leur situation est exclusivement régie par les stipulations de l'accord bilatéral franco-algérien précité, le préfet peut également, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, délivrer un titre de séjour à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'ainsi, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas examiné la possibilité de faire bénéficier Mme E... d'une mesure de régularisation en prenant en considération l'ensemble des éléments de sa situation personnelle ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle doit être écarté comme manquant en fait ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision d'obligation de quitter le territoire français du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, ne peut qu'être écarté ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
9. Considérant, d'une part, que le moyen soulevé contre la décision fixant à Mme E... un délai de départ volontaire de trente jours et tiré de l'exception d'illégalité de la décision du même jour portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté dès lors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, cette décision n'est pas entachée d'illégalité ;
10. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;
11. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme E... aurait demandé au préfet des Bouches-du-Rhône à bénéficier d'une prolongation du délai prévu par ces dispositions ; qu'en se bornant à alléguer que la durée de trente jours contestée était insuffisante au regard notamment de sa prise en charge par l'association SOS femmes et par le pôle réseau pour l'insertion (REPI) de l'association nationale d'entraide féminine (ANEF), sans apporter d'autres justifications, elle n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui octroyant pas un délai de départ volontaire plus long ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais non compris dans les dépens doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... F...épouse E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2017, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Massé-Degois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2017.
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N° 16MA01404