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16/05/2017 | FRANCE | N°15MA01302

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 16 mai 2017, 15MA01302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL MS Cars Company a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 18 février 2009 au 8 avril 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203276 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2015, la SARL MS Cars Company, représentée par Me A.

.., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 janvier...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL MS Cars Company a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 18 février 2009 au 8 avril 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203276 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2015, la SARL MS Cars Company, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 janvier 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a échangé des informations avec les autorités allemandes dans le cadre de la procédure d'assistance administrative internationale alors que la société intermédiaire et venderesse des véhicules en litige était chypriote ;

- les principes du respect du contradictoire et de l'égalité des armes ont été méconnus dès lors que l'administration a procédé à des interventions auprès de son expert-comptable, sans que celui-ci soit mandaté ;

- elle ignorait que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti-revendeur et n'était pas autorisé lui-même à faire application du régime de taxation sur la marge ;

- pour les mêmes raisons, elle ne peut se voir appliquer une pénalité pour manquement délibéré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL MS Cars Company, qui avait pour activité le négoce de véhicules d'occasion, s'est placée, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sous le régime de taxation sur la marge à compter de sa constitution en 2009 ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet pour la période du 18 février 2009 au 8 avril 2010, l'administration a remis en cause l'application de ce régime à des véhicules acquis auprès d'une société chypriote et a taxé les opérations de cession de ces véhicules sur le prix de vente total ; que la société relève appel du jugement du 22 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de pénalités, qui lui ont été réclamés pour un montant total de 515 706 euros au titre de la période vérifiée ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que les véhicules d'occasion acquis par la SARL MS Cars Company auprès d'une société chypriote ont été précédemment immatriculés en Allemagne ; que l'administration a formulé, sur le fondement des articles L. 81 et L. 76 B du livre des procédures fiscales, une demande d'assistance administrative auprès des autorités allemandes, en vue de connaître le régime selon lequel ces véhicules ont été cédés ; qu'aucun texte ne lui faisait obligation, contrairement à ce que soutient la société requérante, de présenter la même demande auprès des autorités chypriotes ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que la SARL MS Cars Company a demandé à ce que la vérification de comptabilité dont elle faisait l'objet se déroule au cabinet de son expert-comptable ; qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a donné mandat à ce dernier, le 3 août 2010, pour recevoir le vérificateur, lui communiquer tous documents sollicités et agir en son nom et pour son compte ; que si la société appelante soutient que ce mandat aurait été antidaté et n'aurait été en réalité établi que le jour de la clôture de la procédure de vérification, elle ne le démontre pas, alors que le document en cause a été signé par son gérant et l'expert-comptable ; que, par suite, la SARL MS Cars Company n'est pas fondée à soutenir que les principes du contradictoire et de l'égalité des armes auraient été méconnus, du fait qu'elle n'aurait pas été valablement représentée lors des opérations de vérification ;

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 bis du code général des impôts alors applicable : " 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises (...) / 2° bis Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre articles 312 à 325 ou 333 à 341 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 297 A du même code : " 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) " ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code : " Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre Etat membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions de l'article 297 E de ce code, et dont le fournisseur, situé quant à lui dans un autre Etat membre, a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur la marge prévu par l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 désormais repris à l'article 313 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 ;

5. Considérant que lorsqu'une entreprise produit des factures émanant de ses fournisseurs qui mentionnent que les ventes de véhicules s'effectuaient sous le régime de la taxe sur la marge mentionné ci-dessus, il incombe à l'administration, si elle s'y croit fondée, de démontrer, d'une part, que les mentions portées sur ces factures sont erronées, d'autre part, que le bénéficiaire de ces achats de véhicules savait ou aurait dû savoir que les opérations présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients, et sans que pèse sur le contribuable l'obligation de vérifier la qualité d'assujetti revendeur de ses fournisseurs ;

6. Considérant, d'une part, que s'il est constant que les factures qui ont été délivrées à la SARL MS Cars Company par un fournisseur chypriote mentionnaient que les ventes ont donné lieu à l'application du régime de taxation sur la marge, la procédure d'assistance administrative exercée par l'administration auprès des autorités allemandes a permis de découvrir que les véhicules en cause avaient été cédés par des sociétés allemandes sous le régime des livraisons intracommunautaires ; que, d'autre part, l'administration fait valoir, sans être sérieusement contredite, que la société requérante ne pouvait ignorer l'origine exacte des véhicules achetés auprès du fournisseur chypriote dès lors qu'elle était en possession des déclarations modèle 1993 souscrites en vue de l'immatriculation des véhicules ainsi que des cartes grises correspondantes, ni que ces documents étaient établis au nom de sociétés de location ou de professionnels de l'automobile allemands, dont l'activité avait pu ouvrir droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société requérante ne conteste pas avoir correctement comptabilisé l'achat des véhicules en cause en 2009 et 2010 sous le régime des acquisitions intracommunautaires et n'avoir appliqué le régime de taxation sur la marge que lors de la souscription des déclarations CA3 ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que les mentions portées sur les factures émises par le fournisseur chypriote de la SARL MS Cars Company étaient inexactes et que la société appelante avait connaissance de cette situation ; que, dès lors, le service était fondé à remettre en cause l'application par la SARL MS Cars Company du régime de taxation sur la marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts ;

7. Considérant que si la SARL MS Cars Company soutient que l'administration aurait validé les documents fournis par la société chypriote et indiqué qu'elle avait appliqué correctement la législation, elle n'assortit pas ce moyen des précisions et justifications permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'ainsi, en tout état de cause, elle n'est pas fondée à se prévaloir de ce que l'administration aurait pris formellement position sur sa situation au sens des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

Sur les pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

9. Considérant que, ainsi qu'il a été dit précédemment, la SARL MS Cars Company ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnel de l'achat et de la vente de véhicules d'occasion, qu'elle n'était pas en droit d'appliquer le régime de taxation sur la marge prévu à l'article 297 A du code général des impôts ; que, par suite, compte tenu du caractère volontaire et répété de ses agissements, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve d'un manquement délibéré à ses obligations déclaratives ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL MS Cars Company n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la SARL MS Cars Company au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL MS Cars Company est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MS Cars Company et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2017, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Boyer, premier conseiller,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mai 2017.

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N° 15MA01302

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01302
Date de la décision : 16/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : MANDRUZZATO

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-05-16;15ma01302 ?
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