Vu la procédure suivante :
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 décembre 2015 et le 20 mai 2016, la société immobilière Carrefour et Carmila France, représentées par MeA..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler la décision du 8 octobre 2015 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a refusé de régulariser la création d'une galerie marchande de 1 200 m² et l'extension de son magasin Carrefour pour une surface de 4 570 m² ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.
Elles soutiennent que :
- le recours préalable de l'association " en toute franchise " et de M. B...n'était pas recevable faute de motivation et d'intérêt pour agir des intéressés ;
- la procédure suivie devant la commission nationale est irrégulière faute de justification de la régularité de la convocation de ses membres ;
- la galerie commerciale créée en 1973 ne nécessitait pas d'autorisation ;
- les demandes, contrairement aux affirmations de la commission, n'ont pas été irrégulièrement scindées ;
- le motif de la commission tiré des encombrements routiers est erroné.
Par un mémoire, enregistré le 5 août 2016, l'association " en toute franchise " et M. B... concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par la société immobilière Carrefour et Carmila France ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour l'association " en toute franchise " a été enregistré le 29 mars 2017, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marcovici,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la société immobilière Carrefour et Carmila France et de Me C...représentant l'association en toute franchise Bouches-du-Rhône ;
Une note en délibéré présentée par Me C...a été enregistrée le 5 avril 2017.
1. Considérant que par une décision du 28 avril 2015, la commission départementale d'aménagement commercial des Bouches-du-Rhône a autorisé les sociétés immobilières Carrefour et Carmila France à procéder à Châteauneuf-les-Martigues à l'extension de 4 570 m² d'un ensemble commercial par la création de 25 boutiques, de moins de 300 m² chacune, d'une surface totale de vente de 3 370 m², et d'une moyenne surface spécialisée dans l'équipement de la personne ou dans l'équipement du foyer ou en sport et loisirs, d'une surface de vente de 1 200 m² ; que par décision n° 2756 T du 8 octobre 2015, la Commission nationale d'aménagement commercial a infirmé cette autorisation et refusé le projet présenté par la société immobilière Carrefour et la société Carmila France ; que ces sociétés demandent l'annulation de la décision du 8 octobre 2015 ;
Sur la légalité de la décision du 8 octobre 2015 :
2. Considérant qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code ; que l'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs ;
3. Considérant que pour refuser l'autorisation sollicitée par les sociétés immobilière Carrefour et Carmila France, la Commission nationale d'aménagement commercial s'est fondée sur ce " que, selon les estimations des pétitionnaires, le projet engendrera une augmentation du trafic routier de l'ordre de 8 % ; que les flux de circulation sur la RD 638, au niveau de l'ensemble commercial de Châteauneuf-les-Martigues, est estimé à environ 23 000 véhicules par jour en moyenne ; que le projet entrainera donc une augmentation de la circulation routière sur un axe déjà fortement emprunté " ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que cette augmentation de 8% ne concerne pas la route départementale RD 638, mais la fréquentation du centre commercial, soit environ 50 véhicules par jour, dont l'impact sur le trafic de la route départementale sera très faible ; qu'ainsi, le motif retenu par la commission est erroné ; qu'il en résulte que la décision du 8 octobre 2015 est illégale et ne peut qu'être annulée ;
4. Considérant que si la décision devait être également regardée comme fondée sur le motif tiré de ce que les sociétés pétitionnaires auraient irrégulièrement scindé leur demande en présentant tout d'abord une demande de régularisation pour une surface de vente de 8 500 m², autorisée par décision de la commission départementale du 6 décembre 2013 et confirmée par la commission nationale le 23 avril 2014, puis par leur demande concernant la présente décision de la Commission, les sociétés n'ont pas commis d'irrégularité dès lors que la commission nationale a pu, lors de l'examen auquel elle a procédé le 8 octobre 2015, apprécier les incidences globales des installations existantes et de la demande d'extension faisant l'objet de la demande d'autorisation ; qu'ainsi, ce motif est également erroné ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision du 8 octobre 2015 ne peut qu'être annulée ;
Sur la demande à fin d'injonction :
6. Considérant que le présent arrêté implique nécessairement que la commission nationale procède à un nouvel examen du recours dirigé contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial des Bouches-du-Rhône, dans un délai qu'il y a lieu de fixer à 4 mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'association " en toute franchise ", dès lors que les sociétés immobilière Carrefour et Carmila France n'ont pas la qualité de partie perdante à l'instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser aux sociétés requérantes au titre des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 8 octobre 2015 est annulée.
Article 2 : La commission nationale d'aménagement commercial procèdera à un nouvel examen du recours dirigé contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial du 28 avril 2015 dans un délai de 4 mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros aux sociétés immobilière Carrefour et Carmila France au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 4 : Les conclusions de l'association " en toute franchise " tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société immobilière Carrefour, à la société Carmila France, à l'association " en toute franchise ", à la commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie des finances et du budget.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2017, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 avril 2017.
4
N° 15MA04922