La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/04/2017 | FRANCE | N°16MA04020

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 13 avril 2017, 16MA04020


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 1604833 du 27 septembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2016, Mme D..., représentée par Me

B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 septembre 2016 du tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 1604833 du 27 septembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2016, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 septembre 2016 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'ordonner au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur son droit au séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier ;

- le refus de séjour n'était pas fondé sur les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les premiers juges ont statué " ultra petita " ;

- le refus de séjour méconnaît l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- en refusant de lui octroyer un délai supérieur à trente jours pour quitter le territoire, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Paix.

1. Considérant que Mme D..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 27 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants tunisiens, l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail stipule que : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. b / Chaque État délivre notamment aux ressortissants de l'autre État tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation" ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation (...) / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code dans sa rédaction alors applicable : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que Mme D..., entrée en France le 22 octobre 2012, a obtenu plusieurs autorisations provisoires de séjour entre le 26 février 2014 et le 27 février 2015 en qualité de parent d'enfant malade puis s'est vu refuser un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'état de santé de son enfant ne nécessitait plus son maintien en France, le suivi médical pouvant être réalisé dans le pays d'origine ; que l'avis du 20 novembre 2015 du médecin de l'agence régionale de santé, qui indique que l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié en Tunisie où le patient peut voyager sans risque, n'est pas remis en cause par le certificat médical établi le 22 juillet 2014 par le professeur ayant suivi l'enfant à l'hôpital de la Timone à Marseille, qui mentionne que l'enfant " peut mener une vie tout à fait normale et n'a besoin d'aucun traitement " et que son état de santé nécessite une " surveillance spécifique une fois par an " ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu légalement refuser à Mme D... le titre de séjour qu'elle sollicitait sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que Mme D..., entrée en France en 2012 comme il a été dit au point 4, a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de vingt-huit ans ; que si elle soutient être à présent séparée de son mari et élever seule ses trois enfants, elle ne l'établit nullement ; que, de plus, eu égard au jeune âge des enfants, aucune circonstance ne s'oppose à ce que la vie familiale se poursuive en Tunisie ; qu'enfin si l'intéressée soutient ne plus avoir de liens avec sa mère et ses soeurs, opposées à son projet de vie en France, ces circonstances ne suffisent pas, en l'espèce, à établir qu'elle serait isolée dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, auxquelles se référait implicitement le préfet des Bouches-du-Rhône en examinant la situation familiale de Mme D... et que les premiers juges ont pu citer sans statuer au-delà des conclusions dont ils étaient saisis, n'ont pas été méconnues ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 6, l'arrêté litigieux n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention du 26 janvier 1990 ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " II - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ; que si Mme D... se prévaut de la scolarisation de ses enfants, de sa durée de présence en France et du bail d'habitation qu'elle a souscrit, ces éléments ne suffisent pas à établir qu'en ne lui accordant pas un délai de départ supérieur à trente jours, le préfet des Bouches-du-Rhône aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes raisons que celles exposées au point 6, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...épouse D...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 avril 2017.

2

N° 16MA04020


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04020
Date de la décision : 13/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : ETTORI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-04-13;16ma04020 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award