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09/02/2017 | FRANCE | N°15MA02991

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 09 février 2017, 15MA02991


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) BEBE a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif du 9 décembre 2013 que lui a délivré le maire de la commune de Grans.

Par un jugement n° 1308193 du 18 juin 2015 le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 juillet 2015, et les 5 et 28 septembre 2016, la SCI BEBE, représentée par Me C..

., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) BEBE a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif du 9 décembre 2013 que lui a délivré le maire de la commune de Grans.

Par un jugement n° 1308193 du 18 juin 2015 le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 juillet 2015, et les 5 et 28 septembre 2016, la SCI BEBE, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 juin 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2013 du maire de Grans ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Grans une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'a pas ou insuffisamment répondu au moyen tiré de ce que le plan de prévention des risques d'inondation n'était pas exécutoire ;

- le maire s'est cru lié par l'avis des services de l'Etat ;

- par sa seule publication au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département, le plan de prévention des risques naturels et prévisibles n'était pas exécutoire à la date de l'arrêté en litige ;

- il n'est pas établi que le plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) a été annexé au plan local d'urbanisme ;

- la commune ne démontre pas que la parcelle AP 62 se situe en zone rouge du PPRI ;

- la substitution de base légale demandée par la commune ne peut être accueillie, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en l'absence de risque d'inondation avéré, ne pouvant fonder légalement l'arrêté en litige.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 juillet et 20 septembre 2016, la commune de Grans conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SCI BEBE une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- une substitution de base légale pourra être opérée sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Josset,

- les conclusions de Mme Giocanti,

- et les observations de Me C..., représentant la SCI BEBE, et de Me B..., représentant la commune de Grans.

1. Considérant que le maire de la commune de Grans a délivré à la SCI BEBE un certificat d'urbanisme en date du 9 décembre 2013 selon lequel son projet de division d'une construction existante en quatre logements sur un terrain situé 14 cours Camille Pelletan n'était pas réalisable ; que la société relève appel du jugement du 18 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal a répondu de manière suffisante au point 8 de son jugement au moyen tiré de l'inopposabilité du plan de prévention des risques d'inondation ; que, par suite, la SCI n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'insuffisance de motivation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme doivent comporter en annexe les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol et qui figurent sur une liste dressée par décret en Conseil d'Etat. (...) Après l'expiration d'un délai d'un an à compter, soit de l'approbation du plan, soit, s'il s'agit d'une servitude nouvelle, de son institution, seules les servitudes annexées au plan peuvent être opposées aux demandes d'autorisation d'occupation du sol (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 562-4 du même code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme. " ; que, d'autre part, aux termes de l'article R. 562-9 du code de l'environnement : " A l'issue des consultations prévues aux articles R. 562-7 et R. 562-8, le plan, éventuellement modifié, est approuvé par arrêté préfectoral. Cet arrêté fait l'objet d'une mention au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ainsi que dans un journal diffusé dans le département. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'ensemble des servitudes d'utilité publique instituées par un plan de prévention des risques naturels prévisibles sont immédiatement opposables aux décisions relatives à l'occupation du sol pendant une durée d'un an à compter de l'approbation de ce plan ; que, cependant, seules les servitudes expressément annexées au plan local d'urbanisme demeurent opposables au-delà de ce délai; que l'opposabilité de la servitude instituée par un PPRI aux demandes d'autorisation d'occuper le sol est ainsi subordonnée à son annexion dans le délai d'un an au plan local d'urbanisme et à la régularité de sa publication ;

4. Considérant que si le PPRI des Bouches-du-Rhône approuvé par arrêté préfectoral du 17 avril 2002 est mentionné au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait fait procéder à sa diffusion dans un journal diffusé dans le département, ainsi que l'exigent les dispositions sus-rappelées de l'article R. 562-9 du code de l'environnement ; que, dans ces conditions, et alors même que les servitudes instituées par ce plan ont été annexées au plan d'occupation des sols (POS) de la commune qui a fait l'objet en 2004 des mesures de publicité requises, la SCI BEBE est fondée à soutenir que les prescriptions du PPRI ne lui étaient pas opposables à la date de la décision en litige ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté la demande de la SCI BEBE au motif que le projet en cause ne pouvait pas être autorisé au regard des prescriptions du PPRI applicables à la commune de Grans ;

5. Considérant, toutefois, que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

6. Considérant que la commune de Grans fait valoir que la décision en litige aurait pu être légalement fondée sur le motif tiré des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme selon lesquelles : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réservé de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;

7. Considérant que la SCI BEBE n'établit pas par les seules énonciations de sa demande de certificat d'urbanisme que son projet ne nécessitait pas une autorisation d'urbanisme ; qu'il ressort de la carte du plan de prévention des risques inondation des Bouches-du-Rhône, qui, bien que non opposable ainsi qu'il a été dit au point 3, peut être pris en compte comme élément d'information, ainsi que de la carte de travail fournie par la direction départementale du territoire et de la mer (DDTM) reprenant le zonage de ce plan, que la parcelle en litige n° AP 62 se situe en zone rouge du plan ; que le projet en cause, qui consiste à créer quatre logements au lieu d'un seul au 1er étage de l'immeuble appartenant à la SCI, a pour objet d'augmenter le nombre de logements ; qu'il accroît ainsi la population exposée au risque d'inondation alors même que l'entrée de l'immeuble se situerait en zone d'aléa modéré ; que, dans ces conditions, en estimant que ce projet méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire de la commune ne fait pas une appréciation erronée de ces dispositions ; que, par suite, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de motif sollicité par la commune de Grans, laquelle n'a pas pour effet de priver la requérante d'une garantie procédurale ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commune aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur ce seul motif ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI BEBE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2013 par lequel le maire de la commune de Grans lui a délivré un certificat d'urbanisme négatif ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Grans, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse quelque somme que ce soit à la SCI BEBE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

11. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu de mettre à la charge de la SCI BEBE une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Grans au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI BEBE est rejetée.

Article 2 : La SCI BEBE versera à la commune de Grans une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI BEBE et à la commune de Grans.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2017, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 février 2017.

2

N° 15MA02991


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02991
Date de la décision : 09/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. CERTIFICAT D'URBANISME. - INOPPOSABILITÉ D'UNE SERVITUDE INSTITUÉE PAR UN PLAN DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS PRÉVISIBLES (PPRI) AUX DEMANDES D'AUTORISATION D'OCCUPATION DU SOL EN L'ABSENCE DE PUBLICITÉ RÉGULIÈRE DE CE PLAN.

68-025 A défaut d'accomplissement des mesures de publicité du PPRI requises par les dispositions de l'article R. 562-9 du code de l'environnement, une servitude qu'il institue n'est pas opposable à une autorisation de construire alors même qu'elle a été annexée au plan local d'urbanisme (PLU) de la commune.,,Ainsi, le PPRI des Bouches-du-Rhône, qui a fait l'objet d'une publication dans le recueil des actes administratifs de la préfecture mais pas dans un journal local, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 562-9 du code de l'environnement, n'est pas opposable à la demande de permis de construire de la SCI Bebe alors même qu'il a été annexé au PLU de la commune de Grans.,,[RJ1].


Références :

[RJ1]

Rappr. CE 19 novembre 2010 n° 331640.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SCP AMIEL-SUSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-02-09;15ma02991 ?
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