La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2016 | FRANCE | N°15MA03826

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 15MA03826


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse sur le recours administratif préalable obligatoire formé le 30 mai 2014 à l'encontre de la décision de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone du 19 mai 2014 lui infligeant une sanction de treize jours de cellule disciplinaire, d'enjoindre à l'administration pénitentiai

re, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de retirer de son dossie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse sur le recours administratif préalable obligatoire formé le 30 mai 2014 à l'encontre de la décision de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone du 19 mai 2014 lui infligeant une sanction de treize jours de cellule disciplinaire, d'enjoindre à l'administration pénitentiaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de retirer de son dossier administratif la mention de la sanction en litige, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en faveur de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1404315 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 23 juin 2014 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. C... contre la décision de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone du 19 mai 2014, enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de retirer la mention de la sanction en litige du dossier administratif de M. C..., dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 juillet 2015 ;

2°) de rejeter la demande formulée par M. C... devant le tribunal.

Il soutient que la décision attaquée n'est pas irrégulière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2016, M. C..., représenté par le cabinet AARPI Themis, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de Maître A...D..., par application combinée de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.

Il soutient que le moyen soulevé par le garde des sceaux, ministre de la justice

n'est pas fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

1. Considérant que le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 23 juin 2014 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. C... contre la décision de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone du 19 mai 2014, et enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de retirer la mention de la sanction en litige du dossier administratif de M. C..., dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale : " La personne détenue qui entend contester la sanction prononcée à son encontre par la commission de discipline doit, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur interrégional des services pénitentiaires préalablement à tout recours contentieux. Le directeur interrégional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour répondre par décision motivée. L'absence de réponse dans ce délai vaut décision de rejet " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un détenu n'est recevable à déférer au juge administratif que la seule décision, expresse ou implicite, du directeur interrégional des services pénitentiaires, qui arrête définitivement la position de l'administration et qui se substitue ainsi à la sanction initiale prononcée par le chef d'établissement ; que toutefois, eu égard aux caractéristiques de la procédure suivie devant la commission de discipline, cette substitution ne saurait faire obstacle à ce que soient invoquées, à l'appui d'un recours dirigé contre la décision du directeur régional, les éventuelles irrégularités de la procédure suivie devant la commission de discipline préalablement à la décision initiale ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs " ; qu'aux termes de l'article R. 57-7-7 du même code : " Les sanctions disciplinaires sont prononcées, en commission, par le président de la commission de discipline. Les membres assesseurs ont voix consultative " ; qu'aux termes de l'article R. 57-7-8 de ce code : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs. Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement. Le second assesseur est choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance territorialement compétent. La liste de ces personnes est tenue au greffe du tribunal de grande instance " ; qu'enfin l'article R. 57-7-12 du même code dispose : " Il est dressé par le chef d'établissement un tableau de roulement désignant pour une période déterminée les assesseurs extérieurs appelés à siéger à la commission de discipline. " ;

4. Considérant qu'il est constant que la commission de discipline a siégé le 19 mai 2014 en présence de son président et du premier assesseur, choisi parmi les membres du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement, le second assesseur étant absent ; que, contrairement aux affirmations du garde des sceaux, les dispositions précitées imposent la présence de deux membres assesseurs lors de la commission de discipline, et non pas seulement la convocation régulière de ses membres ; que les circonstances que cet assesseur aurait été convoqué dans des délais lui permettant d'assister à la réunion de la commission, soit selon l'administration le jour même de la tenue de la commission, et qu'il ne se serait excusé qu'après la séance ou encore que les autres membres de la commission, qui ont siégé, sont soumis au principe d'impartialité, comme d'ailleurs l'ensemble des agents publics, n'est pas de nature à pallier l'illégalité de la composition de la commission ; que si l'administration invoque l'expiration du délai de deux jours prévu à l'article R. 57-7-19 du code de procédure pénale pour un placement préventif, le dépassement d'un tel délai n'est pas de nature à caractériser une situation d'urgence autorisant à méconnaître les dispositions précitées du code de procédure pénale, dès lors que l'administration ne justifie pas de la nécessité d'appliquer la sanction disciplinaire en cause en continuité avec la mesure préventive et ne justifie pas de l'impossibilité d'une tenue régulière ultérieure de la commission ;

5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'irrégularité de la composition de la commission de discipline a privé M. C... d'une garantie de procédure, alors même que l'assesseur absent n'aurait eu qu'une voix consultative ; qu'elle est donc de nature à entacher d'illégalité la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires rejetant implicitement le recours administratif préalable obligatoire formé par M. C... contre la décision de la commission de discipline du 19 mai 2014 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande de M. C... ; qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me D..., la perception de cette somme valant renonciation à l'aide juridictionnelle ;

D É C I D E :

Article 1er : Le recours susvisé du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejeté.

Article 2 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à Me D..., la perception de cette somme valant renoncement à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, et à M. B... C....

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2016, où siégeaient :

- Mme Erstein, président de la Cour,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.

2

N° 15MA03826


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03826
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-02-01 Juridictions administratives et judiciaires. Exécution des jugements. Exécution des peines. Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme ERSTEIN
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CABINET DGK AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-20;15ma03826 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award