Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M.A... C...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté en date du 26 mai 2014 par laquelle le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1402862 du 19 juin 2015, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 août 2015, M. C..., représenté par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 19 juin 2015 ;
2°) d'annuler la décision du préfet du Var du 26 mai 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard, à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa demande dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros à lui verser en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il ne constitue plus, à la décision de la décision contestée, une menace à l'ordre public, qu'il est marié à une ressortissante française, qu'il contribue à l'entretien de leurs trois enfants de nationalité française et qu'il a un comportement exemplaire en détention ;
- que le préfet s'est fondé sur la seule circonstance qu'il a fait l'objet d'une condamnation pénale sans rechercher si, au jour où il a statué, le risque de menace à l'ordre public existait toujours ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 novembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chevalier-Aubert,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant que M. C..., ressortissant tunisien né en 1979, a sollicité le 20 octobre 2011, alors qu'il était placé en détention provisoire au centre de détention de Toulon-la Farlède, le renouvellement de son titre de séjour en qualité de parent d'enfants français ; que par un arrêté du 26 mai 2014, le préfet du Var a refusé de procéder au renouvellement de ce titre de séjour ; que M.C... relève appel du jugement du 19 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
3. Considérant que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement un refus de titre de séjour et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public ; que lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour refuser un titre de séjour, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision ;
4. Considérant qu'il est constant que M. C..., qui est père d'enfants de nationalité française, a été condamné par un arrêt rendu le 7 juin 2012 par la Cour d'assises du Var à une peine de dix années d'emprisonnement pour tentative de meurtre sur la personne de M. B... et pour blessures volontaires commises par arme blanche sur la personne de son épouse qui se trouvait alors en état de grossesse ; que par la décision contestée du 26 mai 2014, le préfet du Var a refusé de renouveler son titre de séjour en raison de la menace que sa présence en France représentait pour l'ordre public ; qu'il ressort des pièces du dossier que pour caractériser une telle menace le préfet s'est exclusivement fondé sur la condamnation prononcée le 7 juin 2012 par la Cour d'Assises du Var, sans examiner l'ensemble des éléments relatifs au comportement de l'intéressé à la date de la décision attaquée ; qu'en s'abstenant de procéder à un examen complet des circonstances de l'affaire, le préfet s'est mépris sur l'étendue de sa compétence et a ainsi commis une erreur de droit au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Var du 26 mai 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;
7. Considérant qu'eu égard à ses motifs, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement le réexamen de la demande de M. C... ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet d'y procéder dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme au conseil de M. C... sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1402862 du 19 juin 2015 du tribunal administratif de Toulon et l'arrêté du préfet du Var du 26 mai 2014 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Var de réexaminer la demande de M. C... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., à Me D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2016.
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N° 15MA03500