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03/11/2016 | FRANCE | N°15MA02515

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 03 novembre 2016, 15MA02515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA La Plage a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 9 février 2011 par laquelle le conseil municipal de Cassis a approuvé le choix des attributaires des sous-traités d'exploitation des plages naturelles du Bestouan et de la Grande Mer et a autorisé le maire à signer les contrats correspondants.

Par un jugement n° 1102548 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et a mis à sa charge, en application de l'article L. 761-1 du

code de justice administrative, les sommes de 1 500 euros à verser, respective...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA La Plage a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 9 février 2011 par laquelle le conseil municipal de Cassis a approuvé le choix des attributaires des sous-traités d'exploitation des plages naturelles du Bestouan et de la Grande Mer et a autorisé le maire à signer les contrats correspondants.

Par un jugement n° 1102548 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et a mis à sa charge, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les sommes de 1 500 euros à verser, respectivement, à la commune de Cassis et à la SARL Pam.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2015, la SA La Plage, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 avril 2015 ;

2°) d'annuler la délibération du 9 février 2011 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cassis la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ce jugement est irrégulier en ce qu'il ne se prononce pas sur l'un des moyens qu'elle a soulevés ;

- la régularité de la convocation des membres du conseil municipal n'est pas établie ;

- la commission des délégations de service public était irrégulièrement composée lors de la séance du 21 décembre 2010 ;

- la commune ne pouvait, sans méconnaître les mentions de l'avis d'appel à concurrence, retenir comme attributaire du lot n° 3 un candidat ayant déposé une demande de permis de construire ;

- le conseil municipal n'a pas accompli son office ;

- l'arrêté préfectoral du 13 janvier 2011 ayant accordé à la commune la concession des plages situées sur son territoire est illégal ;

- en vertu de l'article 1er du décret du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage, elle seule avait la faculté, en sa qualité de concessionnaire de la plage du Bestouan, d'accorder une sous-concession ;

- la plage du Bestouan ne fait pas partie du domaine public maritime mais du domaine public communal de sorte que la commune ne pouvait conclure un sous-traité d'exploitation ;

- le sous-traité d'exploitation concernant le lot n° 3 viole la servitude non aedificandi dont elle bénéficie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2015, la SARL Pam, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, que la SA La Plage lui verse une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en faisant valoir qu'aucun des moyens n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2016, la commune de Cassis, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête, et demande, en outre, que la SA La Plage lui verse une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable, dès lors que la société requérante ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la délibération contestée ;

- aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2006-608 du 26 mai 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant la commune de Cassis et de Me E..., représentant la SARL Pam.

1. Considérant que la SA La Plage, qui loue à la commune de Cassis un terrain situé aux abords de la plage du Bestouan afin d'y exploiter des installations de plage, fait appel du jugement en date du 9 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Cassis du 9 février 2011 ayant approuvé le choix des attributaires des sous-traités d'exploitation des plages naturelles de la Grande Mer et du Bestouan concédées à la commune par l'Etat ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, dans ses écritures de première instance, la SA La Plage relevait que l'avis d'appel à la concurrence publié dans le cadre de la procédure d'attribution des sous-traités de d'exploitation des plages de la Grande Mer et du Bestouan indiquait, en son paragraphe II.1.5, que " les installations projetées dans le cadre des activités de restauration et de location de matelas devront être démontables ou transportables et ne présenter aucun élément de nature à les ancrer durablement au sol " ; que la société faisait valoir que l'attributaire du lot n° 3 avait obtenu un permis de construire, délivré le 10 mars 2011, pour un aménagement saisonnier ; qu'elle soutenait que, dans la mesure où une demande de permis de construire suppose une construction ancrée durablement au sol, le choix de cet attributaire avait nécessairement méconnu les conditions d'attribution du sous-traité prévues dans l'avis d'appel à la concurrence ; qu'en appel, la SA La Plage fait grief au jugement de ne pas avoir répondu à ce moyen ;

3. Considérant toutefois que la demande de permis de construire déposée par la SARL Pam, le 15 février 2011, est postérieure à la délibération contestée et est par suite sans incidence sur sa légalité ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen inopérant, après l'avoir visé, les premiers juges n'ont dès lors pas entaché leur jugement d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Après décision sur le principe de la délégation, il est procédé à une publicité et à un recueil d'offres dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 1411-1. /Les plis contenant les offres sont ouverts par une commission composée : / a) Lorsqu'il s'agit (...) d'une commune de 3 500 habitants et plus (...), par l'autorité habilitée à signer la convention de délégation de service public ou son représentant, président, et par cinq membres de l'assemblée délibérante élus en son sein à la représentation proportionnelle au plus fort reste (...). /Il est procédé, selon les mêmes modalités, à l'élection de suppléants en nombre égal à celui de membres titulaires. /Le comptable de la collectivité et un représentant du ministre chargé de la concurrence siègent également à la commission avec voix consultative (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Cassis a désigné un nombre de membres titulaires et suppléants pour siéger au sein de la commission des délégations de service public conforme aux exigences de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales précité ; que la société requérante n'allègue pas que les membres de la commission et le comptable de la commune auraient été irrégulièrement convoqués à la séance du 21 décembre 2011 au cours de laquelle les offres ont été examinées ; que ni les dispositions précitées, ni aucun autre texte, ni aucun principe n'imposent de quorum lors de la réunion de cette commission ; que, dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce que la commission n'aurait pas siégé dans une composition régulière lors de la séance du 21 décembre 2011 au motif que seuls trois membres du conseil municipal étaient présents et que le comptable de la commune, qui n'a au demeurant qu'une voix consultative, était absent ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales, l'autorité habilitée à signer la convention transmet à l'assemblée délibérante de la collectivité le rapport de la commission présentant notamment la liste des entreprises admises à présenter une offre et l'analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l'économie générale du contrat ; que l'article L. 1411-7 du même code prévoit que les documents sur lesquels se prononce l'assemblée délibérante doivent lui être transmis quinze jours au moins avant sa délibération ; que, selon l'article L. 2121-10 de ce code, toute convocation est faite par le maire, indiquant les questions portées à l'ordre du jour, et est adressée par écrit, sous quelque forme que ce soit, au domicile des conseillers municipaux, sauf s'ils font le choix d'une autre adresse ; que l'article L. 2121-12 dudit code précise enfin que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal ; que, si la délibération concerne un contrat de service public, le projet de contrat ou de marché accompagné de l'ensemble des pièces peut, à sa demande, être consulté à la mairie par tout conseiller municipal dans les conditions fixées par le règlement intérieur ; qu'enfin, le délai de convocation est fixé à cinq jours francs ;

7. Considérant qu'il ressort des attestations produites en première instance par la commune de Cassis que les membres du conseil municipal ont reçu, le 21 janvier 2011, l'ensemble des pièces devant être transmises à l'assemblée délibérante en vue de lui permettre de se prononcer utilement sur le choix du délégataire ; que la SA La Plage n'apporte aucun élément de nature à établir que les conseillers municipaux auraient été insuffisamment informés de l'objet et des modalités de la convention, ainsi que des offres présentées et des motifs du choix proposé par le maire ; qu'il ressort des mentions de la délibération contestée que seuls trois membres étaient absents, ceux-ci ayant donné pouvoirs à d'autres conseillers ; que le choix du délégataire a été approuvé à une large majorité des voix ; qu'ainsi, et à supposer même que les membres du conseil municipal auraient été irrégulièrement convoqués, cette irrégularité n'a pu exercer d'influence sur le sens de la délibération ; qu'elle n'a pu, non plus, priver d'une quelconque garantie la société requérante, qui ne s'était pas porté candidate à l'attribution de l'un sous-traités relatif à l'exploitation des plages de la Grande Mer et du Bestouan ; qu'elle ne soutient pas qu'une irrégularité de la consultation l'aurait dissuadée de se porter candidate ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du vice de procédure ;

8.

Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors applicable, il appartenait au maire de Cassis, au vu de l'avis rendu par la commission des délégations de service public, d'engager librement toute discussion utile avec la ou les entreprises ayant présenté une offre, de sélectionner lui-même les délégataires pressentis parmi les entreprises avec lesquelles il avait négocié et, enfin, de soumettre son choix à l'approbation de l'assemblée délibérante ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le conseil municipal ne se serait pas prononcé sur le choix effectué par la commission manque en droit ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil municipal se soit estimé en situation de compétence liée pour entériner le choix effectué par le maire, de sorte que le moyen tiré de ce que l'assemblée délibérante aurait méconnu l'étendue de sa compétence manque en fait ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que, comme il a été dit au point 3, le moyen tiré de ce que les mentions de l'avis d'appel à la concurrence faisaient obstacle à ce que le lot n° 3 soit attribué à la SARL Pam, dépositaire le 15 février 2011 d'une demande de permis de construire, est inopérant et doit donc être écarté ;

10. Considérant, en cinquième lieu, qu'en vertu du I de l'article 1er du décret du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage, l'Etat peut accorder sur le domaine public maritime des concessions ayant pour objet l'aménagement, l'exploitation et l'entretien de plages ; que le concessionnaire est autorisé à occuper une partie de l'espace concédé, pour y installer et exploiter des activités destinées à répondre aux besoins du service public balnéaire ; que le II du même article prévoit que le concessionnaire peut confier à un ou plusieurs sous-traitants, par des conventions d'exploitation, tout ou partie des activités mentionnées au I, ainsi que la perception des recettes correspondantes ; que le III de l'article précise qu'aucune autorisation d'occupation temporaire ne pourra être délivrée sur les plages concédées, dans les limites communales, pour une ou des activités ayant un rapport direct avec l'exploitation de la plage ;

11. Considérant que, par un arrêté du 13 janvier 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a concédé à la commune de Cassis les plages naturelles de la Grande Mer et du Bestouan pour une durée de douze ans ; que, si cet arrêté constitue l'une des bases légales de la délibération contestée, un tel acte ne revêt pas un caractère réglementaire ; que son illégalité ne peut dès lors être invoquée par voie d'exception que dans le délai de recours contentieux ; que l'arrêté du 13 janvier 2011 a été publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Bouches-du-Rhône le 14 janvier 2011 ; que la SA La Plage en a excipé l'illégalité pour la première fois dans son mémoire enregistré au greffe du tribunal le 28 janvier 2013 ; qu'à cette date, le délai de recours contentieux ouvert contre cet arrêté était expiré ; qu'ainsi, l'exception d'illégalité soulevée est tardive et, par suite, irrecevable ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la commune de Cassis n'aurait pas la qualité de concessionnaire de la plage de Bestouan et qu'elle n'était pas, par voie de conséquence, compétente pour accorder à un sous-traitant une convention d'exploitation sur cette plage ;

12. Considérant, en sixième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'affirme la SA La Plage, la plage du Bestouan fait partie, non pas du domaine public communal, mais du domaine public maritime ; qu'ainsi, la commune a légalement pu conclure un sous-traité pour l'exploitation de cette plage sur le fondement du II du décret du 26 mai 2006 ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la servitude non aedificandi dont bénéficie la SA La Plage porte sur la parcelle anciennement cadastrée F 899 située au droit de la limite sud de sa propriété ; que la parcelle F 899, devenue par la suite CO 32 et CO 33 puis CO 52 et CO 53, n'est pas comprise dans l'emprise de la concession accordée à la commune ; que la société requérante n'établit pas que la servitude invoquée grève également la plage du Bestouan ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le sous-traité d'exploitation concernant le lot n° 3 viole ladite servitude doit, en tout état de cause, être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la SA La Plage n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que la SARL Pam, bénéficiaire de la délibération attaquée, qui a été invitée par la Cour à présenter des observations dans la présente instance et qui, si elle ne l'avait pas été, aurait eu qualité pour former tierce opposition contre le présent arrêt, a la qualité de partie à cette instance pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cassis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SA La Plage demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés respectivement par la commune de Cassis et la SARL Pam et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA La Plage est rejetée.

Article 2 : La SA La Plage versera respectivement à la commune de Cassis et à la SARL Pam la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA La Plage, à la commune de Cassis et à la SARL Pam.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Lascar, président,

M. Guidal, président assesseur,

M. Coutier, premier conseiller,

Lu en audience publique le 3 novembre 2016.

N°15MA025152

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02515
Date de la décision : 03/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Domaine - Domaine public - Régime - Occupation - Utilisations privatives du domaine - Contrats et concessions.

Marchés et contrats administratifs - Notion de contrat administratif - Diverses sortes de contrats - Délégations de service public - Concession de service public.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SELARL SINDRES - AVOCATS MARSEILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-11-03;15ma02515 ?
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