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20/10/2016 | FRANCE | N°16MA02346;16MA02367

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 20 octobre 2016, 16MA02346 et 16MA02367


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2016, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1600983 du 23 mai 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 13 juin 2016 s

ous le n° 16MA02346, Mme B...A..., représentée par Me Passet, demande à la Cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2016, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1600983 du 23 mai 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 13 juin 2016 sous le n° 16MA02346, Mme B...A..., représentée par Me Passet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mai 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2016, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ou " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Passet, avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le motif par lequel le tribunal a écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de l'Hérault en l'obligeant à quitter le territoire est insuffisamment motivé ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation tant au regard du caractère sérieux de ses études que de son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de l'article 3-1 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant.

II. Par une requête, enregistrée le 13 juin 2016 sous le n° 16MA02367, Mme B...A..., représentée par Me Passet, demande à la Cour :

1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mai 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2016, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ou " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Passet, avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soulève les mêmes moyens que ceux précédemment visés au titre de la requête n° 16MA02346.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet des requêtes en soutenant que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B... A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Gonneau a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B...A..., de nationalité congolaise, a présenté le 5 août 2015 une demande de renouvellement de titre de séjour que le préfet de l'Hérault a rejetée par une décision du 19 janvier 2016 ; qu'il a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, la situation personnelle de l'intéressée ne nécessitant pas qu'un délai supérieur lui soit accordé, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement en cas d'exécution d'office ; que, par sa requête n° 16MA02346, Mme B... A...relève appel du jugement du 23 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ; qu'elle demande, par sa requête n° 16MA02367, le sursis à exécution de ce même jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

2. Considérant que les deux requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu d'y statuer par un même arrêt ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant qu'en se référant aux pièces du dossier pour estimer que l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de l'Hérault en obligeant Mme B... A...à quitter le territoire français alors qu'elle était enceinte n'était pas établie, les premiers juges n'ont pas entaché le jugement attaqué d'une insuffisance de motivation ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...A..., entrée en France le 14 août 2011, est inscrite depuis l'année universitaire 2011-2012 en licence " administration économique et sociale " ; qu'à la date de la décision contestée, le 19 janvier 2016, la requérante n'avait validé que la première année de ce cursus ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que les études suivies par Mme B... A...n'avait pas de caractère sérieux ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;

7. Considérant qu'il n'est pas contesté par le préfet de l'Hérault qu'à la date de la décision en litige Mme B... A...se trouvait en concubinage depuis novembre 2015 avec un ressortissant français et était enceinte depuis le 28 juillet 2015 ; qu'en considérant que celle-ci était célibataire et sans charge de famille pour lui refuser le bénéfice des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Hérault a commis une erreur de fait ;

8. Considérant toutefois que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

9. Considérant que le préfet de l'Hérault fait valoir dans son mémoire en défense communiqué à la requérante que le caractère récent du concubinage de celle-ci avec un ressortissant français et la naissance de son enfant postérieurement à la décision querellée ne sont pas de nature à lui ouvrir un droit au séjour au titre de la vie privée et familiale ;

10. Considérant que la vie familiale alléguée par la requérante ne durait que depuis moins de trois mois à la date de la décision contestée ; que son enfant est né postérieurement à cette même date ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour en cause aurait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette décision et aurait par suite méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

12. Considérant que la naissance, le 19 avril 2016, de l'enfant de Mme B... A...est une circonstance postérieure à l'arrêté en litige et n'a dès lors pas d'influence sur sa légalité ;

13. Considérant que la requérante, à qui le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, entrait dans le champ d'application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pouvait donc faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de l'article 3-1 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant, en tant qu'ils visent la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement, doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux énoncés relativement au refus de titre de séjour ; , que, par voie de conséquence, le moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit également être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... A...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

15. Considérant que la Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de Mme B... A...tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 16MA02367 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer ; que doivent être rejetées, au vu de ce qui précède, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant au sursis à exécution présentées dans la requête n° 16MA02367.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête n° 16MA02367 est rejeté.

Article 3 : La requête n° 16MA02346 présentée par Mme B... A...est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Pocheron, président de chambre,

Mme Josset, présidente assesseure,

M. Gonneau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2016.

2

N° 16MA02346, 16MA02367


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02346;16MA02367
Date de la décision : 20/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Pierre-Yves GONNEAU
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : PASSET ; PASSET ; PASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-20;16ma02346 ?
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