Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2010 par lequel le maire de la commune de Marseille a délivré à la SA Unimo un permis de construire pour la réalisation d'un immeuble d'habitation comprenant 65 appartements, sur un terrain situé 70 boulevard Hilarion Boeuf dans le 10ème arrondissement à Marseille, et la décision implicite rejetant leur recours gracieux tendant au retrait dudit permis de construire.
Par un jugement n° 1104096 du 22 novembre 2012, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 13MA00370 du 21 juillet 2014, la Cour a annulé ce jugement, l'arrêté du 16 décembre 2010 et le rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par une décision n° 384786, 384790 du 16 mars 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, sur pourvois de la commune de Marseille d'une part, et d'autre part de la société Crédit Agricole immobilier entreprise venant aux droits de la société Crédit Agricole immobilier promotion, venant elle-même aux droits de la société Unimo, a annulé cet arrêt et renvoyé à la cour administrative d'appel de Marseille le jugement de la requête présentée par M. et Mme C....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, respectivement enregistrés les 22 janvier 2013, 13 mars et 4 avril 2014, et 23 mai 2016, M. et Mme C..., représentés par la société civile professionnelle d'avocats Blanc, Bérenger, Burtez-Doucède et Associés demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 novembre 2012 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2010 délivrant un permis de construire à la société Unimo et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Marseille et du pétitionnaire la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le projet ne respecte pas l'article R. UA3 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- il méconnaît l'article R. UA7 du même règlement dès lors que la voie en limite Nord n'est pas une voie publique, et ne peut donc permettre une seconde bande constructible et qu'en conséquence, un recul de 4 mètres aurait dû être observé en limite arrière ;
- quel que soit le statut de la voie, le projet méconnaît le paragraphe 2 de l'article R. UA7, qui impose un retrait minimal de 3 mètres au-delà d'une profondeur de bâtiment de 17 mètres ;
- il méconnaît aussi l'article R. UA11 du règlement, le bâtiment ne correspondant pas au bâti environnant.
Par des mémoires en défense, respectivement enregistrés les 15 avril 2013, 3 avril 2014, 13 avril et 6 juin 2016, la société Crédit Agricole immobilier entreprise, venant aux droits de la société Crédit Agricole immobilier promotion, venant elle-même aux droits de la société Unimo, représentée par la société civile professionnelle d'avocats Cabinet Rosenfeld, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge des appelants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les accès au projet satisfont aux prescriptions de l'article R. UA3 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- le Conseil d'Etat par sa décision du 16 mars 2016 a clairement établi que le bâtiment pouvait être implanté sur deux bandes constructibles dans l'hypothèse où le terrain se situe, comme en l'espèce, à l'angle de deux voies ;
- la limite Nord de la parcelle constitue un alignement sur rue, car elle borde une voie publique ;
- le projet s'insère dans l'environnement, alors que le juge pour déterminer si le maire a pu commettre une erreur d'appréciation en délivrant l'autorisation, doit se placer dans l'objectif de densification du quartier inscrit dans le règlement.
Par des mémoires en défense, respectivement enregistrés les 28 mars 2014 et 25 mai 2016, la commune de Marseille, représentée par la SELARL Sindres, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des appelants de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, la requête est irrecevable à défaut pour les appelants de prouver le respect des formalités de notification exigées par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- les ordonnances des 21 avril et 25 mai 2016 fixant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction au 17 juin 2016 à midi ;
- le mémoire, enregistré le 15 juin 2016, présenté pour M. et Mme C... et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;
- le mémoire, enregistré le 17 juin 2016, présenté pour la commune de Marseille et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Busidan,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de Me A..., représentant M. et Mme C..., Me B..., représentant la commune de Marseille et Me E..., représentant la société Crédit Agricole immobilier entreprise.
1. Considérant que M. et Mme C... relèvent appel du jugement rendu le 22 novembre 2012 par le tribunal administratif de Marseille, qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 décembre 2010 par lequel le maire de la commune de Marseille a délivré à la SA Unimo, aux droits de laquelle vient désormais la société Crédit Agricole immobilier entreprise, un permis de construire pour la réalisation d'un immeuble d'habitation comprenant 65 appartements, sur un terrain situé 70 boulevard Hilarion Boeuf dans le 10ème arrondissement à Marseille, et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux tendant au retrait dudit permis de construire ;
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne la fin de non recevoir opposée à la requête d'appel par la commune de Marseille :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire (...). La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les époux C...ont adressé en recommandé avec accusé de réception une copie de leur requête d'appel le 22 janvier 2013, d'une part, au maire de la commune de Marseille et, d'autre part, à la société Unimo ; que la fin de non recevoir tirée du non respect des formalités prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écartée ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 16 décembre 2010 :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols de Marseille : " 1- Dispositions générales : Les constructions à édifier s'inscrivent dans la perspective du renouvellement du tissu urbain et/ou de celle de sa valorisation ou dans la perspective de sa valorisation (...). 2-3 Constructions nouvelles : 2-3-1 Echelle et ordonnancement : Les constructions à édifier tiennent compte de l'échelle du bâti environnant et de l'ordonnancement des rythmes et dimensions des percements pour permettre, dans la mesure du possible, un rapport cohérent des étages entre les immeubles (...). " ; qu'en application de ces dispositions, les constructions à édifier doivent s'inscrire dans la perspective du renouvellement du tissu urbain et tenir compte de l'échelle du bâti environnant ; que cette échelle doit être appréciée au regard de l'emprise au sol et de la hauteur de la construction projetée, comparées à l'emprise au sol et à la hauteur du bâti environnant, dans l'immédiat voisinage ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'environnement immédiat du terrain d'assiette de la construction projetée est composé d'un ensemble urbain, délimité par une voie ferrée et les axes de circulation constitués par le chemin de l'armée d'Afrique et l'avenue de la Timone ; que l'îlot ainsi délimité accueille de façon quasi exclusive des pavillons individuels de un ou deux étages, présentant les mêmes caractéristiques architecturales et composant une structure urbaine traditionnelle ; que si des immeubles collectifs, pour certains de hauteur importante, sont également visibles à proximité relative du projet d'assiette du terrain, ceux-ci sont implantés dans des secteurs urbains nettement séparés par la voie ferrée précitée ; que le projet autorisé par le permis de construire en litige consiste en l'édification d'un immeuble collectif en R +6 comportant soixante-cinq appartements, d'une hauteur au faîtage de 20 mètres et développant une surface hors oeuvre nette de 3 595 m² ; que, par son emprise au sol et par sa hauteur, ce projet se distingue très nettement du bâti environnant proche et ne tient pas compte de son échelle ; que, par suite, le maire de la commune de Marseille a entaché le permis de construire en litige d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols ;
6. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen ne paraît, en l'état de l'instruction, fondé et de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté attaqué ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué, le permis de construire délivré le 16 décembre 2010 et la décision implicite rejetant leur recours gracieux tendant au retrait de ce permis de construire ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de M. et Mme C... qui, dans la présente instance, ne sont ni tenus aux dépens ni parties perdantes, les sommes que demandent la commune de Marseille et la société Crédit Agricole immobilier entreprise au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, sur le fondement de ces mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Marseille le versement à M. et Mme C... de la somme de 1 000 euros à ce titre ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 novembre 2012, l'arrêté du 16 décembre 2010 du maire de la commune de Marseille portant délivrance d'un permis de construire et le rejet implicite du recours gracieux formé contre cet arrêté sont annulés.
Article 2 : La commune de Marseille versera à M. et Mme C... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Articles 3 : Les conclusions, présentées par la commune de Marseille et par la société Crédit Agricole immobilier entreprise sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... C..., à la commune de Marseille et à la société Crédit Agricole immobilier entreprise.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille.
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Busidan, première conseillère.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2016.
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N° 16MA01219