La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/10/2016 | FRANCE | N°16MA01709

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 17 octobre 2016, 16MA01709


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 mai 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 1504246 du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2016, et

un mémoire complémentaire enregistré le 13 juillet 2016, M. B..., représenté par Me A..., deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 mai 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 1504246 du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 juillet 2016, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2015 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2015 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai de deux mois sous astreinte, passé ce délai, de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me A..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa demande de sa demande de titre de séjour ;

- la décision portant refus de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a également commis une erreur de droit en lui opposant l'absence de visa de long séjour ;

- la décision porte atteinte à l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français, fondée sur la décision de refus de séjour illégale, est elle-même illégale ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- et elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire, enregistré le 22 septembre 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête et s'en remet à son mémoire de première instance.

Par décision du 21 mars 2016, M. B..., a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé par le président de la formation de jugement de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Markarian ;

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

1. Considérant que M. D... B..., ressortissant arménien né le 17 février 1984, relève appel du jugement du 23 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mai 2015 du préfet de l'Hérault lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français à destination de l'Arménie ;

Sur la décision portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse mentionne que le requérant vit en concubinage avec une ressortissante de nationalité russe qui a présenté une demande d'asile et avec laquelle il a un enfant né le 16 août 2012 ; que la circonstance que l'arrêté en litige ne fasse mention que de la présence de sa mère et d'une de ses soeurs en omettant celle de son père ainsi que les problèmes de santé de ses parents n'établit pas que le préfet de l'Hérault, qui a pris en compte l'unité de la cellule familiale constituée du requérant et de sa compagne, n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de sa demande de titre de séjour dont le refus est suffisamment motivé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant, qui déclare être entré en France en janvier 2009, vit en couple avec une ressortissante russe avec laquelle il a un enfant ainsi qu'il vient d'être dit, un second étant né postérieurement à la décision litigieuse le 4 mars 2016, M. B... et sa compagne sont tous deux en situation irrégulière sur le territoire français ; que la circonstance alléguée que le requérant et sa compagne sont de nationalités différentes et qu'ils ont fui chacun leur pays respectif est sans incidence sur la légalité de la décision portant refus de séjour ; que la décision litigieuse ne peut être regardée comme entachée d'erreur manifeste d'appréciation alors même que la mère et la soeur du requérant ont obtenu un titre de séjour et que son père est soigné en France ; que, pour les mêmes motifs, la décision litigieuse ne méconnaît ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le requérant n'est pas pourvu d'un visa de long séjour exigé par la réglementation en vigueur pour prétendre à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ; que le préfet de l'Hérault était dès lors en droit, pour ce seul motif, de rejeter la demande de titre de séjour présentée en qualité de salarié par M. B... ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent le enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

6. Considérant que la décision litigieuse n'ayant pas pour objet de séparer le requérant de ses enfants, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut toutefois qu'être écarté ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de séjour n'étant pas illégale, M. B... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le requérant et sa compagne sont de deux nationalités distinctes est sans incidence sur la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif qu'il existerait des risques de séparation du couple ne peut être utilement soulevé à l'encontre de la décision en litige ;

9. Considérant que pour les motifs exposés précédemment au point 6, dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, la décision litigieuse, qui n'a pas pour objet de séparer le requérant de ses enfants, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'ainsi, le moyen tiré de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant que le requérant fait valoir que la décision fixe l'Arménie comme pays à destination duquel il sera éloigné alors que la décision fixant le pays de renvoi de sa compagne indique qu'elle sera éloignée vers la Russie ; que l'exécution d'une mesure éloignant l'intéressé vers l'Arménie et sa compagne vers la Russie aurait pour effet de séparer la famille et conduirait nécessairement à la séparation des enfants d'avec un de leurs parents pour une durée indéterminée ; que le préfet de l'Hérault n'établit pas que M. B..., de nationalité arménienne, serait admissible en Russie, pays dont sa compagne à la nationalité ou que cette dernière serait admissible en Arménie ; que, dans ces conditions, la décision fixant le pays à destination duquel M. B... doit être renvoyé doit être regardée comme méconnaissant les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en tant seulement qu'elle tend à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault fixant le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions de M. B... dirigées contre les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'implique pas, alors même qu'il prononce par ailleurs l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, que la Cour ordonne au préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ou de réexaminer sa situation ; que les conclusions présentées à cette fin ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

13. Considérant que M. B... a obtenu l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 mars 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Montpellier ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1504246 du 23 novembre 2015 du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il rejette les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault fixant le pays de renvoi et la décision du préfet de l'Hérault du 7 mai 2015 fixant le pays à destination duquel M. B... doit être renvoyé sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à Me A... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 octobre 2016, où siégeaient :

M. Moussaron, président,

Mme Steinmetz-Schies, président-assesseur,

Mme Markarian, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 17 octobre 2016.

''

''

''

''

5

N° 16MA01709


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01709
Date de la décision : 17/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-17;16ma01709 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award