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04/10/2016 | FRANCE | N°15MA00679

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2016, 15MA00679


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... E...G...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Saint-Cyprien à lui verser la somme de 55 820,18 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis à raison de l'abstention fautive de la collectivité de la placer du 1er mars 2011 au 30 avril 2013 dans une position statutaire régulière.

Par un jugement n° 1302182 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

ête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2015 et le 9 septembre 2016, Mme E...G..., repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... E...G...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Saint-Cyprien à lui verser la somme de 55 820,18 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis à raison de l'abstention fautive de la collectivité de la placer du 1er mars 2011 au 30 avril 2013 dans une position statutaire régulière.

Par un jugement n° 1302182 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2015 et le 9 septembre 2016, Mme E...G..., représentée par la SELARL d'avocats Grimaldi-Molina, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 décembre 2014 et la décision implicite de rejet née du silence gardé par la commune de Saint-Cyprien à sa demande préalable du 29 janvier 2013 ;

2°) à titre principal, de condamner la commune de Saint-Cyprien à lui verser la somme, à parfaire, de 100 818,15 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral subis ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Saint-Cyprien à lui verser la somme, à parfaire, de 87 777,99 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral subis ;

4°) d'enjoindre à la commune de Saint-Cyprien de procéder à la liquidation des sommes demandées dans un délai de dix jours à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai et à la reconstitution des droits à pension auprès de la CNRACL ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Cyprien la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en estimant qu'elle présentait à la date des faits en litige la qualité d'attachée territoriale affectée en qualité de chef de service de l'urbanisme, les premiers juges ont commis une erreur de nature à entrainer l'annulation du jugement entrepris ;

- en estimant que l'ordonnance du 24 septembre 2010 ne lui permettait toujours pas de rencontrer M. B..., les premiers juges ont commis une erreur de nature à entrainer l'annulation du jugement entrepris ;

- l'ordonnance du 24 septembre 2010 a été rendue par le juge d'instruction afin de faire droit à sa demande de levée de l'interdiction de rencontrer le personnel communal travaillant au service de l'urbanisme dans le seul but de pouvoir reprendre ses fonctions ;

- l'ordonnance du 9 mai 2011 confirme que la précédente ordonnance rendue le 24 septembre 2010 lui permettait de réintégrer son poste à la mairie de Saint-Cyprien ;

- aucune circonstance ne faisait obstacle à ce que la commune de Saint-Cyprien procède à son changement d'affectation dans un autre service de la mairie que celui de l'urbanisme ;

- la commune de Saint-Cyprien en s'abstenant de la placer dans une position statutaire légale à compter du 1er mars 2011, malgré ses demandes répétées, a commis une illégalité fautive à l'origine d'un préjudice matériel et d'un préjudice moral ;

- à titre principal, son préjudice financier au cours de la période de mars 2011 à mai 2014 s'élève à la somme de 90 818,15 euros calculée sur la base d'un temps plein et, à titre subsidiaire, il s'élève pour la même période à la somme de 77 777,99 euros ;

- le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence qu'elle a subis du fait du caractère vexatoire et brutal de l'éviction justifient une indemnisation à hauteur de 5 000 euros pour chacun de ces postes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2016, la commune de Saint-Cyprien représentée par la SCP d'avocats HG et C, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme E... G...de la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme E... G...n'est fondé.

La commune de Saint-Cyprien a produit un nouveau mémoire, enregistré le 13 septembre 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. Portail en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massé-Degois,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D... et de Me C..., représentant Mme E...G..., et de Me A..., représentant la commune de Saint-Cyprien.

1. Considérant que Mme E... G...relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 décembre 2014 rejetant sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Cyprien à lui verser la somme de 55 820,18 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'abstention fautive de la commune de la placer dans une position statutaire régulière à compter du 1er mars 2011 pendant une durée de 26 mois ; que, dans le dernier état de ses écritures, elle sollicite la condamnation de la commune de Saint-Cyprien à lui verser, à titre principal, la somme de 100 818,15 euros et, à titre subsidiaire, la somme de 87 777,99 euros, en réparation des préjudices financier et moral subis au cours de la période du 1er mars 2011 au 21 mai 2014 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 55 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée : " Tout fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes : 1° Activité à temps complet ou à temps partiel ; 2° Détachement ; 3° Position hors cadres ; 4° Disponibilité ; 5° Accomplissement du service national ; 6° Congé parental. " ; qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou règlementaire (...) " ; que l'article 30 de la même loi dispose : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions. Le fonctionnaire qui, en raison de poursuites pénales, n'est pas rétabli dans ses fonctions peut subir une retenue qui ne peut être supérieure à la moitié de la rémunération mentionnée à l'alinéa précédent. Il continue, néanmoins, à percevoir la totalité des suppléments pour charges de famille " ;

3. Considérant, en premier lieu, que Mme E... G...a été mise en examen, puis placée sous contrôle judiciaire par ordonnance des vice-présidents chargés de l'instruction du tribunal de grande instance de Perpignan en date du 25 février 2009, laquelle lui interdisait d'entrer en contact notamment avec les élus de la mairie de Saint-Cyprien, M. B..., directeur général des services adjoint faisant fonction de directeur général des services en raison de la mise en examen de ce dernier, et le personnel communal travaillant au service de l'urbanisme ; que par une ordonnance de modification d'un contrôle judiciaire en date du 24 septembre 2010, Mme E... G...a été expressément " autorisée à rencontrer le personnel communal travaillant au service de l'urbanisme, les autres obligations du contrôle judiciaire étant maintenues " ; que, par suite, contrairement à ce que soutient l'appelante, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur en estimant que l'ordonnance judiciaire du 24 septembre 2010 maintenait, par ses dispositions, l'interdiction qui lui était faite de ne pas entrer en contact avec M. B..., directeur général des services par intérim, ainsi qu'avec l'ensemble des élus de la municipalité de Saint-Cyprien ;

4. Considérant qu'alors même que l'ordonnance de refus de modification du 9 mai 2011 du vice-président chargé de l'instruction précise que l'ordonnance rendue le 24 septembre 2010 permettait à Mme E... G...de réintégrer son poste à la mairie de Saint-Cyprien, eu égard aux modalités de l'exercice de ses fonctions qui impliquent des contacts tant avec la direction générale des services qu'avec les élus délégataires de compétence, l'intéressée se trouvait dans l'impossibilité effective d'accomplir ses fonctions d'attachée territoriale au service d'urbanisme de la mairie de Saint-Cyprien, alors même qu'elle n'était pas chef de ce service, sans méconnaître l'interdiction judiciaire qui lui était faite d'entrer en contact avec M. B..., directeur général des services par intérim, ainsi qu'avec l'ensemble des élus de la municipalité de Saint-Cyprien ; qu'en outre, Mme E... G...n'établit pas et il ne résulte pas de l'instruction que, malgré les contraintes du contrôle judiciaire dont elle faisait l'objet, elle aurait pu être affectée en sa qualité d'attachée territoriale, agent de catégorie A, dans un autre service de la commune qui lui aurait permis d'en respecter les termes ; que, dans ces circonstances, et même si Mme E... G...a été regardée comme médicalement apte à reprendre le travail à compter du 1er mars 2011, comme l'a jugé le tribunal, en raison des mesures de contrôle judiciaire dont elle était l'objet la mettant dans l'impossibilité d'accomplir son service, c'est à bon droit que le maire de la commune de Saint-Cyprien, qui était tenu de respecter les prescriptions des ordonnances judiciaires, a rejeté les demandes de réintégration successives qu'elle lui avait adressées ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'obligation légale de l'administration de placer tout agent public dans une position statutaire régulière ne lui impose pas de rémunérer l'agent qui est empêché, à raison d'une mesure de contrôle judiciaire, d'exercer ses fonctions ; que l'administration peut ainsi, en l'absence de service fait, décider de priver l'agent de tout traitement ;

6. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3 et rappelé au point 4, si l'ordonnance de modification du 24 septembre 2010 a expressément autorisé Mme E... G...à rencontrer le personnel communal travaillant au service de l'urbanisme, elle a également expressément maintenu les obligations du contrôle judiciaire telles que définies par l'ordonnance judiciaire du 25 février 2009, et notamment l'interdiction qui lui était faite d'entrer en contact avec les élus de la commune et M. B... directeur général des services adjoint faisant fonction de directeur général des services ; que, d'autre part, Mme E... G...a, parallèlement à cette procédure de contrôle judiciaire, été suspendue de ses fonctions du 23 juin jusqu'au 21 décembre 2009, date à laquelle elle a été rétroactivement placée en congé de longue maladie jusqu'au 1er mars 2011 ; que, le 24 février 2011, la commune de Saint-Cyprien l'a informée de la fin de son congé de longue maladie en lui précisant qu'elle ne pourrait reprendre ses fonctions du fait de son empêchement professionnel inhérent au contrôle judiciaire dont elle continue à faire l'objet ; qu'en suspendant son traitement du fait de l'interdiction judiciaire de rencontrer les élus de la commune et le directeur général des services adjoint faisant fonction de directeur général des services, la commune de Saint-Cyprien n'a pas privé Mme E... G...du droit d'être placée dans une position régulière ;

7. Considérant que le refus de réintégration de Mme E... G...n'étant pas illégal, les conclusions à fin d'annulation du rejet implicite de sa demande préalable du 29 janvier 2013 et celles à fin d'indemnité de la requérante qui se fondent sur l'abstention fautive de la commune de Saint-Cyprien de la placer dans une situation régulière à compter du 1er mars 2011 et de la réintégrer ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... G...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Saint-Cyprien, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser une quelconque somme à Mme E... G...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'appelante le versement à la commune de Saint-Cyprien de la somme de 2 000 euros qu'elle demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... G...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Cyprien sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... E...G...et à la commune de Saint-Cyprien.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Portail, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme F..., première conseillère,

- Mme Massé-Degois, première conseillère.

Lu en audience publique, le 4 octobre 2016.

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N° 15MA00679 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00679
Date de la décision : 04/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : GRIMALDI - MOLINA et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-04;15ma00679 ?
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