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04/10/2016 | FRANCE | N°14MA02842

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2016, 14MA02842


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL Alu'Mière a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 2006, 2007 et 2008, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er décembre 2006 au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1205520 du 24 avril 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa dem

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Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juin 2014, l'EURL Al...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL Alu'Mière a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 2006, 2007 et 2008, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er décembre 2006 au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1205520 du 24 avril 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juin 2014, l'EURL Alu'Mière, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 avril 2014 ;

2°) de nommer un expert afin de vérifier la réalité des prestations en litige par tout moyen utile ;

3°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que, pour remettre en cause le caractère déductible de charges correspondant à des prestations facturées par la SARL AOC, l'administration a considéré que la réalité de ces prestations n'est pas établie ;

- le prix de ces prestations n'est pas excessif.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boyer,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a adressé à l'EURL Alu'Mière une proposition de rectification en date du 31 mai 2010 par laquelle lui ont été notifiés des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2007 et 2008 et en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er décembre 2006 au 31 décembre 2008, à la suite notamment de la remise en cause du caractère déductible, d'une part, de charges relatives à des prestations effectuées par la SARL AOC, et d'autre part de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante ; que l'EURL Alu'Mière relève appel du jugement du 24 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires auxquelles elle a été ainsi assujettie ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

3. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

4. Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

5. Considérant que les charges dont le caractère déductible a été remis en cause par l'administration s'élèvent à 23 829 euros au titre de l'exercice clos en 2007 et à 30 000 euros au titre de l'exercice clos en 2008 ; que si l'EURL Alu'Mière fait valoir que ces sommes constituent la contrepartie de prestations d'assistance comptable, administrative, juridique et financière servies par sa société mère, la SARL AOC, en exécution d'une convention en date du 1er janvier 2007, enregistrée le 22 mars suivant par l'administration fiscale, qui prévoit une rémunération forfaitaire mensuelle de 1 500 euros hors taxes, assortie d'une revalorisation de 5 % par an en cas de renouvellement, les factures dont se prévaut la société requérante ne comportent aucune précision sur la nature des prestations effectuées par la SARL AOC ; que par ailleurs la dépense comptabilisée au titre de l'exercice clos en 2007 est supérieure au montant de 18 000 euros porté sur la facture récapitulative produite postérieurement aux opérations de contrôle, et le montant de la rémunération forfaitaire facturée mensuellement à l'EURL Alu'Mière a été porté à 2 500 euros hors taxes à compter de 2008, cette augmentation n'étant justifiée que par une pièce intitulée " rapport spécial du gérant sur les conventions visées à l'article 50 de la loi du 24 juillet 1966-Exercice clos le 31 décembre 2008 ", faisant état d'une convention d'assistance en date du 1er janvier 2008 non produite ; que si, dans un document remis à l'administration le 4 mars 2010, M. B..., qui gérait à la fois l'EURL Alu'Mière et la SARL AOC, a indiqué que cette dernière société constituait une holding qui centralisait " les aspects fonctionnels (gestion administrative, sociale, financière, technique, commerciale) " alors que les sociétés filles assuraient la partie opérationnelle, et qu'une salariée a été recrutée à cet effet, ce recrutement n'a été effectué qu'à compter du 2 mai 2008 tandis que la société requérante d'une part employait depuis le 8 janvier 2007 une salariée dont il n'est pas contesté qu'elle était notamment chargée de la gestion administrative ainsi que des relations avec les clients et fournisseurs, et d'autre part avait recours à un cabinet d'expertise comptable, notamment pour l'établissement des comptes annuels ainsi que des déclarations fiscales et sociales ; que le numéro de téléphone mentionné sur les factures d'acomptes émises en 2007 par la SARL AOC est celui de l'EURL Alu-Mière, tandis que les factures établies en 2008 par la SARL AOC ne mentionnent aucun numéro de téléphone et qu'en réponse à un courrier du 16 février 2010 par lequel le vérificateur a demandé à l'EURL Alu'mière de produire des justificatifs, ont été communiqués des courriels émanant de la personne recrutée par la SARL AOC, qui comportaient la mention du numéro de la ligne téléphonique de l'EURL Alu'mière ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que l'administration a regardé les sommes facturées par la SARL AOC comme ne correspondant pas à des prestations réellement exécutées et a en conséquence d'une part procédé à la réintégration de ces sommes dans les résultats de l'EURL Alu'Mière, d'autre part remis en cause le caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée dans les factures en litige, sans que la société requérante puisse utilement faire valoir que le prix des prestations fournies par la SARL AOC ne serait pas excessif ni qu'elle aurait effectivement acquitté ce prix ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que l'EURL Alu'Mière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'EURL Alu'Mière est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Alu'Mière et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 octobre 2016.

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N° 14MA02842 5

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02842
Date de la décision : 04/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BOYER
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : CABINET NEXUS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-04;14ma02842 ?
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