Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 18 décembre 2013 par laquelle le préfet de la Corse-du-Sud a refusé de lui accorder l'autorisation d'implanter son lieu de sépulture et celui de son épouse dans sa propriété du Lazaret à Aspretto, et d'enjoindre au préfet sous astreinte de lui délivrer l'autorisation sollicitée.
Par un jugement n° 1400134 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 juillet 2015, M. B...représenté par Me C... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 13 mai 2015 ;
2°) d'annuler la décision du préfet de la Corse-du-Sud du 18 décembre 2013 ;
4°) d'enjoindre au préfet de prendre une nouvelle décision autorisant l'implantation d'une tombe sur la propriété du Lazaret dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision en litige vise de manière erronée les articles L. 2223-1 et L. 2223-9 du code général des collectivités territoriales, qui ne peuvent être appliqués au cas du cimetière privé existant sur le terrain où il demande à être enterré, et est donc dépourvue de motivation juridique ;
- une sépulture supplémentaire dans un cimetière privé existant peut être ajoutée dérogatoirement à une distance de moins de 35 mètres des habitations voisines ;
- il se prévaut de manière opérante d'autorisations d'inhumation délivrées par le préfet pour des chapelles funéraires en centre-ville d'Ajaccio ;
- il existe un droit à l'inhumation dans un cimetière privé dès lors que les conditions prévues par l'article R. 2213-32 du code général des collectivités territoriales sont remplies, or il dispose de l'avis favorable d'un hydrogéologue et du maire de la commune ;
- aucun lien de famille avec les personnes déjà inhumées sur sa propriété ne peut être juridiquement exigé en pareil cas ;
- la décision en litige est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 24 août 2015, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête de M.B....
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par l'appelant à l'encontre du jugement et de la décision contestés n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de M.B..., et s'approprie le contenu des écritures produites dans l'instance par le préfet de la Corse-du-Sud.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hameline,
- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...B...a formé le 29 juillet 2013 une demande au préfet de la Corse-du-Sud tendant à ce que soient autorisées sa future sépulture, ainsi que celle de son épouse, dans sa propriété du Lazaret d'Aspretto sur le territoire de la commune d'Ajaccio ; que le préfet a rejeté cette demande par une lettre en date du 18 décembre 2013 ; que M. B... a saisi le tribunal administratif de Bastia d'un recours contentieux tendant à l'annulation de cette décision de refus, qui a été rejeté par jugement du 13 mai 2015 : que l'intéressé interjette appel de ce jugement, et demande à nouveau à la Cour d'annuler la décision préfectorale en litige ainsi que d'enjoindre au préfet de la Corse-du-Sud sous astreinte de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;
Sur le bien-fondé du jugement contesté :
En ce qui concerne la base légale de la décision du préfet de la Corse-du-Sud :
2. Considérant que le droit de toute personne d'avoir une sépulture et de régler librement, directement ou par l'intermédiaire de ses ayants-droits, les conditions de ses funérailles s'exerce dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales : " Chaque commune (...) dispose d'au moins un cimetière comprenant un terrain consacré à l'inhumation des morts (...). La création, l'agrandissement et la translation d'un cimetière sont décidés par le conseil municipal. Toutefois, dans les communes urbaines et à l'intérieur des périmètres d'agglomération, la création, l'agrandissement et la translation d'un cimetière à moins de 35 mètres des habitations sont autorisés par arrêté du représentant de l'Etat dans le département, pris après une enquête publique (...). " ;
4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 2223-9 du code général des collectivités territoriales : " Toute personne peut être enterrée sur une propriété particulière, pourvu que cette propriété soit hors de l'enceinte des villes et des bourgs et à la distance prescrite " ; qu'aux termes de l'article R. 2213-32 du même code : " L'inhumation dans une propriété particulière du corps d'une personne décédée est autorisée par le préfet du département où est située cette propriété sur attestation que les formalités prescrites par l'article R. 2213-17 et par les articles 78 et suivants du code civil ont été accomplies et après avis d'un hydrogéologue agréé. " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a acquis en 1996 par le biais d'une société civile immobilière, puis personnellement en 2009, un terrain bâti comportant un ancien lazaret édifié au milieu du dix-neuvième siècle à des fins sanitaires au lieu-dit d'Aspretto, propriété de l'Etat jusqu'en 1920, dont il a fait sa résidence principale ; qu'il n'est ni établi ni même soutenu que la commune d'Ajaccio, compétente en matière de police des cimetières, ou l'Etat, aurait créé sur ce terrain un cimetière régi par les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ou par d'autres dispositions spécifiques ; que la circonstance que quatre à cinq victimes d'une épidémie de choléra hébergées au lazaret aient été inhumées vers 1855 dans la partie nord-est du terrain et que leurs dépouilles mortelles se trouvent toujours sur celui-ci, si elle grève la propriété d'un droit réel immobilier découlant du respect dû aux sépultures, ne saurait en revanche faire regarder par elle-même l'assiette de tout ou partie du terrain concerné comme un cimetière communal au sens des dispositions précitées, ni comme un " cimetière privé " dont le requérant ne précise au demeurant pas quelle serait le fondement légal ou réglementaire ; que, par suite, c'est sans erreur de droit ni défaut de base légale que le préfet de la Corse-du-Sud, qui a suffisamment motivé sa décision sur ce point, a regardé la demande formée par M. B...en vue de pouvoir être enterré ainsi que son épouse au sein de sa propriété du lazaret d'Aspretto comme formée sur le fondement de l'article L. 2223-9 précité du code général des collectivités territoriales relatif aux sépultures sur des propriétés particulières ;
En ce qui concerne le respect par le demandeur des conditions prévues par les articles L. 2223-9 et R. 2213-32 du code général des collectivités territoriales :
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que le Lazaret d'Aspretto, désormais inclus dans la partie agglomérée de la commune d'Ajaccio, ne se situait pas hors de l'enceinte des villes et bourgs au sens de l'article L. 2223-9 précité du code général des collectivités territoriales à la date à laquelle le préfet s'est prononcé sur la demande, et que l'inhumation projetée devrait être réalisée à une distance inférieure à celle de 35 mètres par rapport aux habitations existantes prescrite en application des dispositions combinées des articles L. 2223-9 et L. 2223-1 de ce code ; que le préfet n'a donc pas commis d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation en refusant la demande pour ce motif ; que M. B... ne peut utilement contester celui-ci en se prévalant des possibilités dérogatoires d'agrandissement de cimetières communaux à proximité des habitations, dès lors que, comme il a été dit au point 5, le lieu de sépulture déjà situé sur sa propriété ne constitue pas un tel cimetière ; que demeure également sans influence le fait que le requérant ait sur sa demande obtenu l'avis d'un hydrogéologue sur le projet ; que n'est pas davantage opérante sur ce point la circonstance, à la supposer établie, que le préfet aurait précédemment accordé d'autres autorisations d'inhumation sur des propriétés privées en centre-ville d'Ajaccio ;
7. Considérant, au surplus et en tout état de cause, que l'autorisation d'inhumation sur un terrain privé instituée par les dispositions précitées ne peut être délivrée par le préfet, selon les termes mêmes de l'article R. 2212-32 du code général des collectivités territoriales, qu'au vu d'un acte de décès délivré en application de l'article 78 du code civil, et de l'autorisation de fermeture du cercueil par l'officier d'état-civil prévue par l'article R. 2213-17 du code général des collectivités territoriales ; qu'une telle autorisation ne saurait ainsi être accordée sur demande de la personne concernée antérieurement à son décès, celle-ci disposant par ailleurs de la faculté de préciser ses volontés à ce sujet à toute personne habilitée à pourvoir à son inhumation le moment venu ; que, dès lors, le préfet de la Corse-du-Sud ne pouvait en toute hypothèse que refuser, en application de ces dispositions, l'autorisation d'implantation de sépulture sur une propriété privée sollicitée en l'espèce par M. B...pour lui-même et son épouse ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Corse-du-Sud du 18 décembre 2013 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de la décision en litige du préfet de la Corse-du-Sud, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, en toute hypothèse, à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. B...la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 septembre 2016.
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N° 15MA02761