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20/09/2016 | FRANCE | N°14MA03165

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 20 septembre 2016, 14MA03165


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et pénalités, du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts auquel il a été assujetti à raison de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession, le 4 mai 2006, d'un bien immobilier dont il était propriétaire à Menton.

Par un jugement n° 1103456 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

te enregistrée le 15 juillet 2014 par télécopie et régularisée par courrier le 17 juillet suivant, la b...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et pénalités, du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts auquel il a été assujetti à raison de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession, le 4 mai 2006, d'un bien immobilier dont il était propriétaire à Menton.

Par un jugement n° 1103456 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2014 par télécopie et régularisée par courrier le 17 juillet suivant, la banque Monte di Paschi, agissant au nom de M. B..., représentée par Me D... et MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 15 mai 2014 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 5 000 euros au titre des frais de première instance et la somme de 5 000 euros au titre des frais occasionnés par la présente procédure.

Il soutient que :

- le rehaussement en litige en matière de plus-value immobilière vise à sanctionner de manière détournée l'absence de dépôt de déclaration de succession à la suite du décès de son père, alors que ce manquement est prescrit ;

- l'administration a manqué à son devoir de loyauté ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a retenu, pour la détermination de la valeur vénale réelle du bien à la date d'entrée dans le patrimoine du cédant, une valeur nulle, alors que cette détermination est effectuée par le contribuable sous sa responsabilité et peut être justifiée par tous moyens ;

- il est fondé à se prévaloir des énonciations du paragraphe 15 de la fiche n°4 annexée à l'instruction administrative 8 M-1-04 du 14 janvier 2004 ;

- le bien immobilier litigieux ayant été acquis en 1989 pour un prix de 271 359,25 euros, sa valeur vénale réelle ne saurait être inférieure à ce prix ;

- le prix d'acquisition doit être majoré de 15 % en application de l'article 150 VB II-4° du code général des impôts.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour M.B....

1. Considérant qu'au décès de son père, le 1er décembre 1996, M. B..., ressortissant italien, a hérité de deux tiers d'un appartement situé sur le territoire de la commune de Menton ; que le 4 mai 2006, il a cédé ce bien pour un prix de 233 333 euros ; qu'à défaut de souscription de la déclaration de succession au dépôt de laquelle il était tenu en sa qualité d'héritier, le notaire en charge du dossier a établi, le 4 mai 2006, une attestation immobilière dans laquelle la valeur vénale de l'appartement à la date du 1er décembre 1996 est égale au prix de vente retenu pour la cession du 4 mai 2006 ; que cette évaluation ayant eu pour effet de générer une moins-value de cession, le requérant n'a pas été soumis au prélèvement de 16 % prévu par l'article 244 bis A du code général des impôts ; que par une proposition de rectification du 18 septembre 2007, l'administration, après avoir retenu une valeur d'acquisition nulle, a notifié à M. B... une plus-value nette imposable arrêtée à la somme de 136 273 euros ; que M. B... a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la décharge du prélèvement de 16 % opéré sur cette somme en application de l'article 244 bis A du code général des impôts, ainsi que des pénalités correspondantes ; que par le jugement attaqué du 15 mai 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les moyens tirés d'un détournement de procédure et d'un manquement au devoir de loyauté :

2. Considérant que la circonstance que l'administration n'a pas imposé le bien immobilier en cause au titre des droits de mutation dans le délai de reprise de dix ans prévu par l'article L. 186 du livre des procédures fiscales est, contrairement à ce que soutient le requérant, sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition de la plus-value en litige ; qu'ainsi, M. B... ne saurait sérieusement soutenir que l'imposition qu'il conteste viserait, au prix d'un détournement de procédure, à sanctionner l'inobservation de son obligation de souscrire la déclaration de succession alors que ce manquement aurait été prescrit ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'administration aurait manqué à son devoir de loyauté à l'égard de l'intéressé ;

Sur le calcul de la plus-value de cession :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) " ; qu'aux termes de l'article 150 VF du même code : " I. L'impôt sur le revenu correspondant à la plus-value réalisée sur les biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 C est versée par la personne physique, la société ou le groupement qui cède le bien ou le droit. " ; qu'enfin, aux termes de l'article 150 VB du même code : " I. Le prix d'acquisition est le prix le prix effectivement payé par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte (...) En cas d'acquisition à titre gratuit, le prix d'acquisition s'entend de la valeur retenue pour la détermination des droits à titre gratuit. " ;

4. Considérant que pour l'application des dispositions précitées de l'article 150 VB du code général des impôts aux cas dans lesquels, faute de déclaration par le contribuable, aucune valeur n'a été retenue pour la détermination des droits de mutation, l'administration peut affecter aux biens immobiliers en cause une valeur nulle à moins que le contribuable qui les a recueillis soit en mesure de justifier de leur valeur d'acquisition à la date de cette dernière ;

5. Considérant que comme il a été dit précédemment, M. B... n'a pas souscrit de déclaration de succession à la suite du décès de son père ; que par suite, il lui appartient de justifier de la valeur vénale du bien immobilier en litige au jour où il l'a acquis ; qu'afin de déterminer cette valeur à la date du 1er décembre 1996, M. B... produit une attestation immobilière qui a été publiée à la conservation des hypothèques compétente le 16 février 2007 ; que, toutefois, cette attestation a été établie plus de neuf ans après l'ouverture de la succession, concomitamment à l'opération de cession ayant généré la plus-value en cause, alors que M. B... n'apporte aucun élément de nature à établir que la valeur qui y est mentionnée, qui est égale au prix de cession, correspondrait à la valeur du bien au jour de son entrée dans le patrimoine de l'intéressé ; qu'en revanche, il résulte de l'instruction que le bien en litige a été acquis pour un montant de 1 780 000 francs, soit 271 359 euros, par le père de l'intéressé en 1989 ; qu'ainsi, et alors même que M. B... ne justifie pas de la valeur vénale de l'immeuble au 1er décembre 1996, il est fondé à soutenir, alors que le ministre n'allègue pas que les prix du marché immobilier auraient baissé entre 1989 et 1996, que la valeur du bien en litige au 1er décembre 1996 ne peut être inférieure à son prix d'acquisition en 1989 ; que, par suite, c'est à tort que l'administration a retenu, au titre de la valeur d'acquisition du bien, une valeur nulle ; que, compte tenu de la part que possédait M. B... dans le bien cédé en 2006, la plus-value en litige doit dès lors être déterminée en retenant, à ce même titre, le montant de 180 906 euros, soit deux tiers de la somme de 271 359 euros ;

6. Considérant d'autre part, qu'aux termes de l'article 150 VB du code général des impôts : " (...) II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) 2° Des frais afférents à l'acquisition à titre gratuit définis par décret ; (...) 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement, de rénovation ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un bien plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée (...) " ;

7. Considérant que M. B... ne justifie pas du montant réel des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement, de rénovation ou d'amélioration qu'il aurait supportées et qui auraient été réalisées par une entreprise ; qu'il est constant que le bien immobilier qu'il a acquis le 1er décembre 1996 a été cédé le 4 mai 2006, soit plus de cinq années après son acquisition ; que, dans ces conditions, le requérant est fondé à demander à ce que soit pratiquée une majoration forfaitaire de 15 % du prix d'acquisition du bien immobilier cédé, en application des dispositions précitées du 4e de l'article 150 VB du code général des impôts ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

8. Considérant que M. B... se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations du paragraphe 15 de la fiche n°4 annexée à l'instruction administrative 8 M-1-04 du 14 janvier 2004, selon lesquelles lorsque la valeur vénale du bien immobilier au jour de la mutation à titre gratuit qui l'a fait entrer dans le patrimoine du cédant n'est pas connue, il convient de retenir la valeur telle qu'elle figure dans l'attestation immobilière ; que toutefois, cette doctrine a été complétée et précisée par l'instruction administrative 8 M-1-05 du 4 août 2005 applicable à l'année d'imposition en litige, selon laquelle la valeur qui figure dans l'attestation immobilière peut être retenue si elle correspond à la valeur du bien au jour de la mutation à titre gratuit qui l'a fait entrer dans le patrimoine du cédant ; que la doctrine administrative ainsi complétée ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale dont il est fait application ci-dessus ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est fondé à demander la décharge du prélèvement auquel il a été assujetti au titre de l'année 2006 que dans la limite d'une plus-value de cession déterminée en retenant un prix d'acquisition de 180 906 euros majoré de 15 % ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 15 mai 2014 est annulé.

Article 2 : Pour la détermination de la plus-value réalisée par M. B... à l'occasion de la cession, le 4 mai 2006, du bien immobilier dont il était propriétaire à Menton, le prix d'acquisition est fixé à 180 906 euros majoré de 15 %.

Article 3 : Il est accordé à M. B... décharge de la différence entre le montant des droits auxquels il a été assujetti et celui qui résulte de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à la banque Monte di Paschi, et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Carotenuto, premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 septembre 2016.

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N° 14MA03165 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03165
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : CABINET PELLOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-09-20;14ma03165 ?
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