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12/07/2016 | FRANCE | N°15MA04849

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2016, 15MA04849


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Bastia :

- d'annuler l'arrêté en date du 20 février 2014 par lequel le président de l'université de Corse Pasquale Paoli a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des troubles de santé dont elle est atteinte ;

- d'enjoindre au président de l'université de Corse de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie, en y comprenant les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre ;

- de mettre à la charge de

l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Bastia :

- d'annuler l'arrêté en date du 20 février 2014 par lequel le président de l'université de Corse Pasquale Paoli a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des troubles de santé dont elle est atteinte ;

- d'enjoindre au président de l'université de Corse de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie, en y comprenant les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre ;

- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1400290 du 22 octobre 2015, le tribunal administratif de Bastia a :

- annulé l'arrêté du 20 février 2014 ;

- enjoint au président de l'université de Corse de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service des troubles cervicaux avec névralgies d'Arnold dont est atteinte Mme D... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement ;

- mettre à la charge de'université de Corse la somme de 1 500 euros à verser à

Mme D...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire récapitulatif enregistrés les 18 décembre 2015 et 11 mars 2016, l'université de Corse Pasquale Paoli, représentée par Me E...et

MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia ;

2°) de mettre à la charge de Mme D...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de Mme D...était irrecevable faute pour l'intéressée d'avoir contesté les décisions la plaçant en congé de longue maladie ;

- les conditions fixées par les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas remplies pour reconnaître la maladie contractée par Mme D...comme maladie professionnelle ;

- le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que la maladie de Mme D...était imputable à sa surcharge de travail ;

- l'expertise diligentée par le tribunal lui est inopposable faute d'avoir été contradictoire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2016, Mme C...B...épouse D...représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas admis l'imputabilité au service des troubles anxio-dépressifs et respiratoires dont elle souffre et d'enjoindre à l'université de Corse Pasquale Paoli de reconnaître l'imputabilité au service de ces maladies ; elle demande, enfin, que soit mise à la charge de l'université de Corse Pasquale Paoli, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de l'université n'est pas fondée ;

- sa requête de 1ère instance était recevable ;

- la reconnaissance d'une maladie contractée au service n'est pas subordonnée à l'inscription de cette maladie sur les tableaux des maladies professionnelles mais à la preuve du lien de causalité entre l'affection et l'exécution du service ;

- il existe un lien direct et certain entre ses troubles anxio-dépressifs et le service.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions présentées par Mme D...et demandant à la Cour de réformer le jugement du 22 octobre 2015 en tant qu'il n'a pas admis l'imputabilité au service des troubles anxio-dépressifs et respiratoires dont elle souffre sont irrecevables faute d'avoir été présentées dans le délai d'appel.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraites ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Baux,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me F...représentant Mme B...épouseD....

1. Considérant que Mme B... épouseD..., adjointe administrative, affectée au sein du service de la scolarité de l'institut universitaire de technologie de l'Université de Corse, souffrant de cervicalgies, a été placée en congé de maladie ordinaire, à compter du 27 février 2010 ; que, par une décision du 14 mars 2012, le président de l'université de Corse a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette affection ; que le tribunal administratif de Bastia a prononcé, par jugement du 21 janvier 2014, l'annulation de cette décision ; que, le 20 février 2014, le président de l'université de Corse a de nouveau refusé la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de Mme D...; que le tribunal administratif de Bastia a, par jugement du 22 octobre 2015, dont l'Université de Corse relève appel, prononcé l'annulation de cette décision ; que, par la voie de l'appel incident, Mme D...sollicite la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas admis l'imputabilité au service des troubles anxio-dépressifs et respiratoires dont elle souffre ;

Sur la recevabilité de la demande de 1ère instance :

2. Considérant que la décision portant reconnaissance d'une maladie contractée en service a un objet distinct de celui des décisions de placement en congé de longue maladie ou en disponibilité et des effets juridiques propres ; que l'Université de Corse ne peut donc utilement soutenir que Mme D...serait irrecevable à solliciter l'annulation de l'arrêté du 20 février 2014 qui a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des cervicalgies dont elle est atteinte, au motif qu'elle n'aurait pas contesté les décisions la plaçant en congé de longue maladie, à plein traitement puis à demi-traitement, ainsi que celle la plaçant en position de disponibilité d'office pour raison de santé et qu'elle aurait ainsi " acquiescé auxdits arrêtés " ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu'à supposer même que les opérations d'expertise critiquées par l'Université de Corse aient été conduites dans des conditions irrégulières, cette irrégularité ne fait pas obstacle à ce que le rapport d'expertise remis le 20 décembre 2012 soit retenu à titre d'élément d'information ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...)./ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit en outre au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service, (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé, si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " (...) Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau (...) " ;

5. Considérant qu'aucune disposition ne rend applicables aux fonctionnaires relevant de la fonction publique de l'Etat, qui, sollicitant la reconnaissance de l'imputabilité au service d'affection dont ils souffrent, demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, celles de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau ; que, par suite, l'Université de Corse ne saurait utilement soutenir qu'en méconnaissant les dispositions susmentionnées de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, les premiers juges auraient entaché le jugement du 22 octobre 2015 d'une erreur de droit ;

6. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport daté du 1er mars 2012, établi par le supérieur hiérarchique de Mme D...ainsi que de deux rapports médicaux des 31 janvier 2011 et 22 décembre 2012, dont le premier a été diligenté à la demande de l'Université, d'une part, que l'intéressée a été soumise au cours du mois de février 2010 à une importante surcharge de travail, et contrainte d'effectuer la saisie informatique de 17 368 notes d'examens, d'autre part, qu'elle souffre depuis cette date de cervicalgies avec névralgies d'Arnold droites ainsi que d'hémicrânies droites et de sensations vertigineuses invalidantes et rebelles aux différentes thérapeutiques, enfin, que cette pathologie a été déclenchée par ce travail intensif sur ordinateur et est en lien direct et certain avec l'exercice de son activité professionnelle ; que, dans ces conditions, alors même que l'Université produit l'avis de la commission de réforme en date du 31 mai 2010 et un " dire " présenté lors de l'expertise diligentée en référé par le tribunal administratif de Bastia, le premier ne faisant état que de ce que " il n'y a pas de tableau pour la maladie d'Arnold " et le second, de ce que l'environnement ergonomique de travail ne fait pas apparaître d'anomalie de posture, dès lors que ces éléments ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation des médecins experts consultés, l'existence d'un lien de causalité direct entre les troubles cervicaux avec névralgies d'Arnold dont souffre Mme D...et l'exercice de ses fonctions au sein de l'IUT de l'Université de Corse doit être regardé comme établie ; que, par suite, en refusant de reconnaître ces pathologies comme imputables au service, le président de l'Université de Corse a fait une inexacte application des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susmentionnées ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Université de Corse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du 20 février 2014 par laquelle le président de l'Université de Corse a refusé de reconnaître comme imputables au service les troubles cervicaux dont souffre MmeD... ;

Sur l'appel incident de Mme B...épouseD... :

8. Considérant que Mme D...demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a rejeté par son article 4, le surplus des conclusions de sa requête ; que de telles conclusions soulèvent un litige distinct de celui faisant l'objet de l'appel principal de l'Université de Corse dirigé contre les trois premiers articles du jugement ; que les conclusions d'appel incident ont été présentées le 26 février 2016, plus de deux mois après la notification du jugement faite le 24 octobre 2015 et, donc, postérieurement à l'expiration du délai d'appel ; qu'étant de ce fait irrecevables, les conclusions de Mme D...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeD..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par l'Université de Corse au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Université de Corse la somme demandée par MmeD..., au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'Université de Corse Pasquale Paoli est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de Mme B...épouse D...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Université de Corse Pasquale Paoli et à Mme C...B...épouseD....

Délibéré après l'audience du 21 juin 2016, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. Renouf, président-assesseur,

- Mme Baux, premier conseiller,

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N° 15MA04849 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04849
Date de la décision : 12/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers. Allocation temporaire d'invalidité. Notion d'accident de service.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Anne BAUX
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL POLI MONDOLONI ROMANI et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-07-12;15ma04849 ?
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