Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 14 avril 2015 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination de son pays d'origine.
Par un jugement n° 1501686 du 17 juillet 2015, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 août 2015, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 avril 2015 du préfet du Var ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " salarié" ou " travailleur temporaire " sous astreinte de 75 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir et, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me C..., la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les conditions posées par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers sont remplies ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Evelyne Paix, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bédier, président de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Sur sa proposition, le rapporteur public, désigné par le président de la cour en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du même code par le président de la formation de jugement.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Markarian,
- et les observations de Me C... représentant M. A....
1. Considérant que M. A..., ressortissant de Guinée Conakry, a sollicité, le 12 juin 2013, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après l'annulation par un jugement du 6 novembre 2014 de la décision de refus qui lui avait été opposée le 16 juillet 2014, le préfet du Var a de nouveau rejeté la demande de l'intéressé par une décision du 14 avril 2015 assortie d'une obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ; que M. A... relève appel du jugement du 17 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;
3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. " ; que selon l'article R. 313-1 du même code : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : / 1° Les indications relatives à son état civil (...) " ; que l'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'entré en France le 29 octobre 2011 selon ses déclarations, M. A... a indiqué être né le 10 mai 1995 et a été pris en charge par le service de l'aide à l'enfance du département du Var le 16 novembre 2011, son placement ayant été maintenu jusqu'à sa majorité alléguée le 10 mai 2013 par un jugement du tribunal pour enfants de Toulon du 7 novembre 2012, puis prolongé en tant que majeur de moins de vingt-et-un ans ; que le précédent refus de séjour opposé au requérant, le 16 juillet 2014, à sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été annulé par un jugement du 6 novembre 2014 au motif que si le préfet du Var soutenait que la prise en charge de M. A... par le service de l'aide sociale à l'enfance avait été obtenue au moyen d'un acte de naissance apocryphe, qui ne permettait pas d'établir qu'il était né le 10 mai 1995, en se fondant sur un rapport établi le 3 juillet 2014 par les services de l'ambassade de France à Conakry faisant état de mentions inexactes dans la rédaction de cet acte, il ne contestait pas l'authenticité du jugement supplétif du tribunal de grande instance de Kaloum en date du 30 juillet 2014 produit par le requérant à l'instance et n'arguait pas davantage que cet acte serait entaché de fraude ; que pour refuser à M. A... le bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 313-15 dans le cadre du réexamen de sa demande de titre de séjour, le préfet du Var conteste de nouveau l'âge déclaré par l'intéressé en indiquant que la consultation du fichier Visabio permet d'établir, en se fondant sur la correspondance des empreintes digitales, que le requérant a sollicité la délivrance de visas sous l'identité de DembaA..., né le 2 janvier 1982, sa seconde demande ayant donné lieu à la délivrance d'un visa valable du 17 octobre 2011 au 16 novembre 2011, et en conclut que le requérant est âgé de trente-trois ans à la date de l'arrêté attaqué ; que si cette fraude commise dans l'obtention d'un visa peut être de nature à entraîner un doute sérieux sur l'âge du requérant et si l'examen de test osseux effectué le 25 mars 2015 ne présente pas de réelle valeur probante dès lors qu'il y est fait état " d'un garçon de 17 ans ou plus ", le préfet du Var n'a toutefois effectué aucune diligence pour vérifier l'authenticité du jugement supplétif d'acte de naissance conformément aux dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que le passeport que le requérant produit, et dont l'authenticité n'est pas contestée, porte également une date de naissance au 10 mai 1995 ; qu'en l'état de l'instruction, il doit être tenu pour établi que M. B... A...a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance alors qu'il était âgé de dix-sept ans et qu'il a célébré son dix-huitième anniversaire le 10 mai 2013 ; qu'il en résulte que c'est à tort que les premiers juges ont, au seul motif que M. A... ne remplissait pas les conditions d'âge exigées par l'article L. 131-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rejeté sa demande ;
5. Considérant qu'il y a lieu de statuer par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur la demande de M. A... ;
6. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'après avoir été scolarisé à Toulon au collège Django Reinhart puis au lycée Cisson en vue de l'obtention d'un bac professionnel en électrotechnique obtenu en juin 2014, le requérant a, après avoir satisfait à des tests d'évaluation, poursuivi une formation en alternance au lycée Arago de Lyon et au centre technique Rhône-Alpes de la SNCF ; que le requérant justifie poursuivre ses études avec assiduité et sérieux ainsi qu'en attestent ses bulletins de notes et fait preuve d'un investissement personnel souligné par ses formateurs ; que, par ailleurs, il soutient, sans être contredit, être orphelin ; que M. A... entrait dans le champ d'application de l'article L. 313-15 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; qu'il est, par suite, fondé à demander l'annulation du refus qui lui a été opposé par le préfet du Var le 14 avril 2015 à sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'eu égard aux motifs énoncés ci-dessus, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Var de délivrer à M. A... la carte de séjour prévue aux dispositions de l'article L. 313-15 15 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que le requérant n'a pas demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que les conclusions tendant à l'allocation d'une somme au bénéfice de Me C... ne peuvent être accueillies ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 juillet 2015 ainsi que l'arrêté du préfet du Var en date du 14 avril 2015 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Var de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré à l'issue de l'audience du 23 juin 2016, où siégeaient :
- Mme Paix, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Markarian, premier conseiller,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 juillet 2016.
''
''
''
''
2
N° 15MA03570