Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 26 juin 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes lui a retiré sa carte professionnelle permettant l'exercice des activités privées de sécurité délivrée le 3 juillet 2009.
Par un jugement n° 1304793 du 20 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 20 avril 2015 et le 3 mars 2016, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 20 février 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 26 juin 2013 ;
3°) d'ordonner la restitution de sa carte professionnelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- sa motivation est insuffisante, tant en fait qu'en droit ;
- la mesure était inutile car, au moment où elle a été prise, il faisait l'objet d'une mesure de contrôle judiciaire lui interdisant l'exercice d'une activité de sécurité ;
- la juridiction répressive l'a relaxé et il n'a jamais porté atteinte à l'ordre public ;
- la décision, qui conduit à le priver de tout revenu, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le décret n° 2009-137 du 9 février 2009 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Menasseyre, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant M. A....
1. Considérant que, par arrêté du 26 juin 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de la carte professionnelle permettant l'exercice des activités privées de sécurité délivrée le 3 juillet 2009 à M. A... ; que ce dernier relève appel du jugement du 20 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre cette décision ;
Sur la légalité de l'arrêté du 20 février 2015 :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans la nuit du 2 au 3 février 2013, un violent incident a opposé trois clients de la discothèque " Le Bâoli ", située à Cannes, à son service de sécurité, dont fait partie M. A... ; qu'à la suite d'une plainte déposée par ces clients, M. A... a été mis en examen pour les chefs de " violences commises en réunion suivies d'une incapacité n'excédant pas huit jours " et de " destruction de document ou objet concernant un crime ou un délit pour faire obstacle à la manifestation de la vérité " et a fait l'objet d'un renvoi devant le tribunal correctionnel de Grasse ;
3. Considérant que l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure énumère les conditions auxquelles est subordonné l'exercice d'une activité privée de sécurité, et dont le respect est attesté par la détention d'une carte professionnelle délivrée, en vertu des dispositions du décret du 9 février 2009 alors applicables, par une commission régionale ou interrégionale d'agrément et de contrôle, également compétente, selon l'avant dernier alinéa de cet article, pour retirer cette carte lorsque son titulaire cesse de remplir l'une des conditions prévues aux 1°, 2° et 3° ; que le dernier alinéa de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure donne compétence au président de cette commission pour retirer la carte professionnelle en cas d'urgence et prévoit qu'" en outre, le représentant de l'Etat peut retirer la carte professionnelle en cas de nécessité tenant à l'ordre public " ; que l'existence d'une nécessité tenant à l'ordre public de nature à justifier le retrait de la carte professionnelle d'un agent de sécurité privée, au titre du pouvoir de police du représentant de l'Etat dans le département, doit être appréciée objectivement ;
4. Considérant que pour procéder au retrait de la carte professionnelle de M. A..., à la suite de l'incident rappelé au point 2, le préfet des Alpes-Marimes a estimé, selon les termes de la décision critiquée, que les agissements de l'intéressé, de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens et à troubler l'ordre public, étaient incompatibles avec l'exercice de l'activité d'agent de sécurité ;
5. Considérant, que pour justifier en l'espèce de la nécessité tenant à l'ordre public, le préfet des Alpes-Maritimes s'est fondé sur les faits, relatés dans un compte-rendu qui lui a été transmis en mars 2013 par les services de police chargés de l'enquête judiciaire, et qui se sont déroulés quatre mois avant la décision de retrait d'agrément en litige ; que ce document, qui mentionne l'imprégnation alcoolique des clients de l'établissement, fait état d'une méthode inappropriée et disproportionnée employée par le service de sécurité de l'établissement pour les évincer ; que cependant, si ce rapport mentionne des coups portés par un agent de sécurité identifié comme étant M. E..., relève qu'une des clientes a été molestée, et qu'un téléphone portable a été jeté à l'eau, il ne comporte aucune indication sur les actes précisément reprochés à M. A... et sur la part qu'il aurait prise dans les agissements qui sont ainsi globalement imputés au service de sécurité de l'établissement ; qu'il n'est ni établi ni allégué que l'intéressé se serait livré, postérieurement à cet épisode, à des actes ayant troublé l'ordre public ; qu'il ressort enfin des pièces du dossier que, le 22 mai 2014, le tribunal correctionnel du tribunal de grande instance de Grasse, après avoir jugé qu'il n'était pas démontré que M. A... était allé au-delà des gestes lui permettant d'empêcher que les trois jeunes gens ne rentrent de nouveau dans l'établissement et qu'il avait eu des gestes proportionnés pour repousser Ophélie Martin, l'a relaxé des fins de la poursuite dont il était l'objet ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, M. A... est fondé à soutenir que les éléments retenus par le préfet des Alpes-Maritimes n'étaient pas de nature à caractériser une nécessité tenant à l'ordre public de nature à justifier le retrait de l'agrément prononcé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que le jugement et l'arrêté contesté doivent, par suite, être annulés ;
Sur les conclusions tendant à la restitution de la carte professionnelle illégalement retirée :
7. Considérant que la durée de validité d'une carte professionnelle est, en vertu des dispositions de l'article R. 622-11 du code de la sécurité intérieure, qui reprennent désormais celles de l'article 2 du décret du 9 février 2009, de cinq ans à compter de la date de sa délivrance ; que la carte illégalement retirée à M. A... lui ayant été initialement délivrée le 3 juillet 2009, sa durée de validité est, à présent, expirée ; que cette péremption fait obstacle à ce que sa restitution puisse être ordonnée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 20 février 2015 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 26 juin 2013 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Chanon, premier conseiller,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 30 juin 2016.
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N° 15MA01640
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