La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2016 | FRANCE | N°15MA01266

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 30 juin 2016, 15MA01266


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 7 mai 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes lui a retiré sa carte professionnelle permettant l'exercice d'une activité privée de sécurité, délivrée le 5 janvier 2010.

Par un jugement n° 1302686 du 20 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2015, M. E..., représenté par Me D..., demande à la C

our :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 20 février 2015 ;

2°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 7 mai 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes lui a retiré sa carte professionnelle permettant l'exercice d'une activité privée de sécurité, délivrée le 5 janvier 2010.

Par un jugement n° 1302686 du 20 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2015, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 20 février 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 7 mai 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes lui a retiré sa carte professionnelle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers frais et dépens.

Il soutient que :

- la mesure a été prise par une autorité incompétente territorialement et qui n'avait pas reçu de délégation de signature régulière ;

- la motivation de l'acte est insuffisante ;

- le rapport de police du 1er mars 2013, qui est partial, viole le secret de l'instruction, ne prouve ni la réalité des faits ni l'existence d'un trouble à l'ordre public, ne pouvait fonder une décision de retrait ;

- la juridiction répressive a prononcé la relaxe à l'égard de tous les prévenus ;

- les conséquences de la mesure sur sa situation personnelle sont particulièrement graves.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le décret n° 2009-137 du 9 février 2009 ;

- le décret 2012-870 du 10 juillet 2012 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Menasseyre, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., substituant Me D..., représentant M. E....

1. Considérant que, par arrêté du 7 mai 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de la carte professionnelle permettant l'exercice d'activités privées de sécurité délivrée le 5 janvier 2010 à M. E... ; que ce dernier relève appel du jugement du 20 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre cette décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans la nuit du 2 au 3 février 2013, un violent incident a opposé trois clients de la discothèque " Le Bâoli ", située à Cannes, à son service de sécurité, dont fait partie M. E... ; qu'à la suite d'une plainte déposée par ces clients, M. E... a été mis en examen pour les chefs de " violences commises en réunion suivies d'une incapacité n'excédant pas huit jours " et de " destruction de document ou objet concernant un crime ou un délit pour faire obstacle à la manifestation de la vérité " et a fait l'objet d'un renvoi devant le tribunal correctionnel de Grasse ;

3. Considérant que l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure énumère les conditions auxquelles est subordonné l'exercice d'une activité privée de sécurité ; que le respect de ces conditions est attesté par la détention d'une carte professionnelle délivrée, en vertu des dispositions du décret du 9 février 2009 alors applicables, par une commission régionale ou interrégionale d'agrément et de contrôle, également compétente, en vertu de l'avant dernier alinéa de cet article, pour retirer cette carte lorsque son titulaire cesse de remplir l'une des conditions prévues aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 612-20 ; que le dernier alinéa de cet article donne compétence au président de cette commission pour retirer la carte professionnelle en cas d'urgence et prévoit qu'" en outre, le représentant de l'Etat peut retirer la carte professionnelle en cas de nécessité tenant à l'ordre public " ; que l'existence d'une nécessité tenant à l'ordre public de nature à justifier le retrait de la carte professionnelle d'un agent de sécurité privée, au titre du pouvoir de police du représentant de l'Etat dans le département, doit être appréciée objectivement, indépendamment de la situation privée ou familiale des personnes qu'elles visent ;

En ce qui concerne la légalité externe :

4. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la carte professionnelle détenue par M. E... lui avait été délivrée par le préfet du Var ne faisait pas obstacle à la possibilité, pour le préfet des Alpes-Maritimes, en cas de nécessité tenant à l'ordre public dans ce dernier département, de la lui retirer légalement ; que le moyen tiré de l'incompétence territoriale de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que le signataire de la décision, M. Gérard Gavory, secrétaire général de la préfecture des Alpes-Maritimes, bénéficiait d'une délégation de signature conférée par arrêté du préfet des Alpes-Maritimes n° 2013-244 du 19 mars 2013, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture des Alpes-Maritimes n° 22.2013 du 19 mars 2013, afin notamment de signer toutes décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département des Alpes-Maritimes, délégation confirmée par un nouvel arrêté n° 2013-374 du préfet des Alpes-Maritimes du 6 mai 2013 ayant le même objet et régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture des Alpes-Maritimes n° 362013 en date du 7 mai 2013 ; que la circonstance que ces délégations soient postérieures au courrier du 22 février 2013, signé par M. Gavory, secrétaire général de la préfecture des Alpes-Maritimes, informant M. E... qu'un retrait de sa carte professionnelle était envisagé et le mettant en mesure de présenter des observations, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

6. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 7 mai 2013 doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Considérant que pour procéder au retrait de la carte professionnelle de M. E... à la suite de l'incident rappelé au point 2, le préfet des Alpes-Marimes a estimé, selon les termes de la décision critiquée, que les agissements de l'intéressé, de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens et à troubler l'ordre public, étaient incompatibles avec l'exercice de l'activité d'agent de sécurité ;

8. Considérant que, pour justifier, en l'espèce, de l'existence d'une nécessité tenant à l'ordre public, le préfet des Alpes-Maritimes s'est fondé sur des faits relatés notamment dans le compte-rendu qui lui a été transmis en mars 2013 par les services de police chargés de l'enquête judiciaire ; que ce document, qui mentionne l'imprégnation alcoolique des clients de l'établissement, fait état d'une méthode inappropriée et disproportionnée employée par le service de sécurité pour les évincer ; que ce rapport mentionne des coups portés par un agent de sécurité identifié comme étant M. E..., relève qu'une des clientes a été molestée et qu'un téléphone portable a été jeté à l'eau ; que si M. E... soutient que l'auteur de ce document serait partial, il ne conteste pas sérieusement la matérialité des faits qui y sont relatés ; que la matérialité de la gifle donnée par l'intéressé à l'un des clients de la discothèque résulte, en tout état de cause, des motifs du jugement, dont le caractère définitif est constant, rendu par le tribunal correctionnel de Grasse le 20 mai 2014 qui, s'il relève que, s'agissant des deux jeunes filles plaignantes, M. E... n'était pas allé au-delà des gestes admissibles pour les empêcher de rentrer dans l'établissement et l'a relaxé pour les violences commises à leur encontre, l'a, en revanche, déclaré coupable de violences contraventionnelles avec incapacité totale de travail inférieure à 8 jours commises sur M. C... et l'a condamné, à raison de ces faits, à 500 euros d'amende ; que M. E... ne saurait, par suite utilement critiquer le rapport de police versé aux débats, dès lors que la matérialité de ce geste résulte des motifs d'une décision du juge pénal dont l'autorité de chose jugée s'impose sur ce point ; que si l'intéressé produit trois attestations émanant de connaissances professionnelles ou d'anciens employeurs faisant état de sa diplomatie, de sa connaissance du terrain, de son efficacité, de son professionnalisme et de son aptitude à gérer des situations délicates, ainsi qu'une attestation émanant du président de l'association " Full contact academy " mentionnant un " comportement physique et pédagogique toujours exemplaire ", il n'en demeure pas moins que l'intéressé n'a pas fait preuve de cette maîtrise au moment de l'incident qui est à l'origine de la décision attaquée, alors que le code de déontologie régissant sa profession réprouve l'usage de toute violence, même légère ;

9. Considérant que la condition, posée par les dispositions précitées, relative à l'existence d'une nécessité tenant à l'ordre public de nature à justifier le retrait de la carte professionnelle d'un agent de sécurité privée peut être regardée comme remplie, ainsi qu'il a été dit au point 3, indépendamment de la situation privée ou familiale de l'intéressé ; qu'au cas d'espèce et alors même qu'il n'est pas contesté que les capacités physiques de M. E... ont été altérées à la suite d'une violente agression dont il a été victime en 2009, qu'il fait vivre sa compagne et son fils et subvient également aux besoins de son propre père, âgé de 76 ans, ainsi que de son frère handicapé à 80 %, le préfet des Alpes-Maritimes, a pu, au vu des faits de l'espèce et sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer se trouver en présence d'une nécessité tenant à l'ordre public lui permettant de retirer légalement la carte professionnelle de M. E... ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont, dès lors, vouées au rejet par voie de conséquence ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, où siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Chanon, premier conseiller,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 30 juin 2016.

''

''

''

''

N° 15MA01266

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01266
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Polices spéciales.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Contrôle du juge de l'excès de pouvoir - Appréciations soumises à un contrôle normal.


Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : JACQUEMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-06-30;15ma01266 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award