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23/06/2016 | FRANCE | N°15MA00853

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 15MA00853


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014 par lequel le préfet de Vaucluse lui a refusé l'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1403362 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2015, M. A...B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce juge

ment du 22 janvier 2015 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014 par lequel le préfet de Vaucluse lui a refusé l'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1403362 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2015, M. A...B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 janvier 2015 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014 du préfet de Vaucluse ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de Vaucluse, sur le fondement des articles L. 911-2 du code de justice administrative et L. 512-1, dernier alinéa, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail, injonction assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur de fait quant à sa situation matérielle car il a fait la démonstration de la nécessité de sa présence aux côtés de son épouse ;

- le jugement ne répond pas de manière motivée au moyen tiré de l'erreur de fait quant à sa situation familiale ;

- le préfet ne pouvait lui opposer un refus de séjour sans avoir préalablement transmis aux services de l'administration du travail la demande d'autorisation de travail implicitement contenue dans la remise aux services préfectoraux de son projet de contrat de travail ;

- en s'estimant lié par le non-respect des conditions posées par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auquel renvoie l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, sans procéder à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale, le préfet a méconnu son pouvoir de régularisation et entaché ainsi son refus d'une erreur de droit ;

- les premiers juges n'ont pas motivé leur réponse à ce moyen ;

- le refus de titre de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, moyen auquel le jugement n'a pas répondu ;

- le signataire de la décision contestée ne justifie pas d'une délégation de signature ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- le préfet s'est estimé lié par la décision de refus de séjour en prenant la décision d'obligation de quitter le territoire ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 ;

- le jugement encourt également l'annulation pour avoir rejeté sans motivation le moyen précité ;

- l'obligation de quitter le territoire ne comporte aucune motivation spécifique ni en droit ni en fait ;

- les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas compatibles avec les objectifs définis par l'article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Sauveplane.

1. Considérant que M. A... B..., ressortissant tunisien né en 1979, est entré en France le 6 mai 2014 sous couvert d'un visa de court séjour en provenance du Qatar, pour rejoindre son épouse, titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il s'était marié le 16 juillet 2009 en Tunisie, et ses deux enfants nés en 2010 et 2012 ; qu'il a présenté une demande de titre de séjour le 18 septembre 2014 ; que, par arrêté du 30 septembre 2014, le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que M. A... B... relève appel du jugement du 22 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que les décisions contestées ont été signées par Mme Martine Clavel, secrétaire générale de la préfecture, qui bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté du 3 septembre 2014, publié au recueil des actes administratifs à fin de signer tous actes à l'exception de certains dont ne font pas partie les décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour ou portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions contestées auraient été signées par une autorité incompétente doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en estimant que malgré les problèmes de santé de son épouse, M. A... B...ne démontrait pas que sa présence auprès de cette dernière était indispensable dès lors qu'elle n'était pas isolée, le préfet s'est livré à une appréciation de la situation du demandeur dans le cadre de son pouvoir de régularisation exceptionnelle ; qu'il n'a commis ni erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation ;

4. Considérant, en troisième lieu, que M. A... B... soutient que le préfet ne pouvait rejeter sa demande de séjour sans avoir préalablement transmis aux services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi la demande d'autorisation de travail implicitement contenue dans la remise par ses soins aux services préfectoraux de son projet de contrat de travail ; que, toutefois, M. A... B... s'est borné à produire à l'appui de sa demande une simple promesse d'embauche ; que, dès lors, le préfet a pu, sans méconnaitre l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, rejeter la demande de titre de séjour " salarié " dont il était saisi ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A... B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale et aurait ainsi méconnu son pouvoir de régularisation ou entaché son refus d'une erreur de droit ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l' intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " et qu'aux termes des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " " ;

7. Considérant que M. A... B... n'est présent en France que depuis moins de six mois à la date de la décision attaquée ; que, relevant du regroupement familial, il ne peut bénéficier au titre de la législation française d'un titre de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'emportent pas une obligation générale pour un État de respecter le choix par des étrangers de leur pays de résidence et de permettre sans condition le regroupement familial sur son territoire ; que M. A... B... ne justifie d'aucun obstacle à poursuivre sa vie familiale dans son pays d'origine ou dans un autre pays, avec son épouse, de même nationalité que lui, et ses enfants, aux droits desquels la décision attaquée ne porte aucune atteinte ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à se prévaloir d'une violation des conventions précitées ;

8. Considérant, en dernier lieu, que malgré les difficultés de santé de l'épouse du requérant, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que le refus de titre de séjour opposé par le préfet à M. A... C... n'est pas illégal ; que, dès lors, le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité du refus titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet au préfet d'obliger un étranger, à qui il a refusé la délivrance d'un titre de séjour, de quitter le territoire français ; qu'en assortissant son refus d'une telle obligation de quitter le territoire français, le préfet de Vaucluse s'est borné à faire application de la loi en se livrant à une appréciation qui n'est entachée ni d'erreur manifeste d'appréciation ni d'erreur de droit ;

11. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'appelant garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

13. Considérant, en dernier lieu, que M. A... B... soutient que l'obligation de quitter le territoire ne comporte aucune motivation spécifique ni en droit ni en fait alors que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas compatibles avec les objectifs définis par l'article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil, dont les dispositions sont suffisamment précises et inconditionnelles pour s'appliquer ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " et qu'aux termes de l'article 12 de la directive 2008/115/CE " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles. " ;

15. Considérant que l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que l'obligation de quitter le territoire français doit être motivée mais que cette motivation peut ne pas être distincte de la motivation de la décision refusant l'admission au séjour ; que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec l'article 12 de la directive 2008/115/CE ; qu'en l'espèce, le refus de titre de séjour étant suffisamment motivé, l'obligation de quitter le territoire français était, par suite, elle-même suffisamment motivée ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé dans ses réponses à l'ensemble des moyens, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Markarian, premier conseiller,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 juin 2016.

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N° 15MA00853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00853
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : BOURCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-06-23;15ma00853 ?
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