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13/06/2016 | FRANCE | N°15MA01868

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 13 juin 2016, 15MA01868


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté en date du 10 mars 2015 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination, qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et la mi

se à la charge de l'Etat de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 76...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté en date du 10 mars 2015 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination, qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1501050 du 4 mai 2015, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 mai 2015, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon en date du 4 mai 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 10 mars 2015 du préfet du Var ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'article R. 222-1 du code de justice administrative n'était pas applicable en l'espèce ;

- le préfet devait saisir la commission du titre du séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où il justifie avoir résidé plus de dix ans de manière habituelle en France à la date de l'arrêté litigieux ;

- l'arrêté contesté méconnaît les articles 6-1, 6-5 et 7b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pocheron,

- et les observations de Me C..., substituant à l'audience Me D..., représentant M. B.auprès d'une association

1. Considérant que M. B..., de nationalité algérienne, relève appel de l'ordonnance en date du 4 mai 2015 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 10 mars 2015 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...)7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. " ;

3. Considérant qu'à l'appui de la demande qu'il a présentée devant le tribunal administratif de Toulon, M. B... a notamment soutenu qu'il justifiait avoir résidé habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté litigieux, et invoquait en conséquence les moyens tirés de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, et de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 ; qu'à l'appui de ces moyens M. B... a énoncé de manière détaillée et circonstanciée les éléments destinés à établir la réalité de la résidence habituelle en France depuis plus de dix ans alléguée ; qu'ainsi, la demande comportait des moyens assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien ; qu'une telle demande ne pouvait être jugée que par une formation collégiale ; que, par suite, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon ne pouvait, sans excéder sa compétence, se fonder sur les dispositions précitées du 7° précité de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande de M. B... ; que, dès lors, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 10 mars 2015 du préfet du Var :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11, ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article, peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

6. Considérant que, pour justifier avoir résidé habituellement depuis au moins dix ans sur le territoire français à la date de l'arrêté contesté, M. B..., pour les années 2005 à 2008, se borne à produire des attestations dépourvues par elles-mêmes de valeur probante, des factures et bons de commande, des relevés de compte bancaire, et des documents médicaux peu nombreux et très espacés dans le temps, qui établissent au mieux une présence ponctuelle en France de l'intéressé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Var aurait dû, en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, saisir la commission du titre de séjour, doit être écarté ;

7. Considérant que, pour le même motif que celui exposé au point précédent, les moyens tirés de la violation de l'article 6 de l'accord susvisé franco-algérien du 27 décembre 1968, aux termes duquel : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ", et de l'erreur manifeste commise par l'administration dans l'appréciation des documents produits à son dossier par le requérant relatifs à la durée de sa présence en France, doivent être écartés ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du même accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant que M. B..., célibataire, sans charge de famille, n'établit avoir résidé habituellement en France qu'à partir de l'année 2009 ; qu'il y est uniquement domicilié auprès d'une association; qu'il ne justifie d'aucun lien familial, ni d'aucune insertion socio-professionnelle sur le territoire français ; qu'il n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie ; que, par suite, l'arrêté litigieux, qui n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ni de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale du requérant ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " auprès d'une association b) les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 dudit accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles (...) 7 (auprès d'une association) les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...) " ;

11. Considérant que M. B... n'était pas détenteur du visa de long séjour exigé par les stipulations précitées pour prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " salarié " ; que la circonstance qu'il a produit deux promesses d'embauche à l'appui de sa demande de titre de séjour n'est pas de nature à démontrer l'existence des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels allégués ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de son insertion professionnelle qu'aurait commise le préfet du Var doit par suite être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon doit être rejetée ; que ses conclusions d'appel aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B... la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon du 4 mai 2015 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2016, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Pocheron, président-assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juin 2016.

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N° 15MA01868


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01868
Date de la décision : 13/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-06-13;15ma01868 ?
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