Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Léo Lagrange Méditerranée " a demandé au tribunal administratif de Montpellier à titre principal, d'enjoindre à la commune de Lézignan-Corbières de régulariser le contrat conclu le 17 avril 2013 entre elle et l'association " MJC de Lézignan-Corbières ", en y intégrant la reprise des personnels ; à titre subsidiaire, de prononcer la résolution de ce contrat ; en tout état de cause, de condamner ladite commune à lui verser la somme de 40 000 euros, en réparation du préjudice résultant de son obligation d'assumer des charges salariales, celle de 5 000 euros, au titre des frais engagés pour soumissionner et celle de 16 500 euros, au titre du manque à gagner.
Par un jugement n° 1303325 du 22 septembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de l'association " Léo Lagrange Méditerranée. "
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 novembre 2014 et le 12 novembre 2015, l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 septembre 2014 ;
2°) à titre principal, d'enjoindre à la commune de Lézignan-Corbières de régulariser le contrat conclu le 17 avril 2013 entre elle et l'association " MJC de Lézignan-Corbières ", en y intégrant la reprise des personnels ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer la résolution de ce contrat ;
4°) en tout état de cause, de condamner ladite commune à lui verser la somme de 40 000 euros, en réparation du préjudice résultant de son obligation d'assumer des charges salariales, celle de 5 000 euros, au titre des frais engagés pour soumissionner et celle de 16 500 euros, au titre du manque à gagner ;
5°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Lézignan-Corbières et de l'association " MJC de Lézignan-Corbières " une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier :
- les premiers juges ont omis de répondre à un moyen et entaché leur décision d'insuffisance de motivation ;
- ils ont relevé d'office un moyen qui n'était pas d'ordre public et sans le soumettre préalablement au contradictoire en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- ils ont analysé de manière erronée les conclusions de la requête présentée devant le tribunal administratif comme tendant à l'annulation de la convention litigieuse ;
- le jugement attaqué est mal fondé :
- c'est à tort que les premiers juges ont qualifié le contrat litigieux de marché public, alors qu'il s'agit d'une délégation de service public ;
- l'exposante est recevable à invoquer tout moyen portant sur la contestation de la validité du contrat litigieux ;
- la procédure d'attribution du contrat litigieux est irrégulière :
- la procédure simplifiée de passation des délégations de services publics prévue par les dispositions de l'article L. 1411-12 du code général des collectivités territoriales n'était pas applicable ;
- la consultation menée n'a fait l'objet d'aucune publicité préalable, en méconnaissance des dispositions des articles L. 1411-1 et R. 1411-1 du code général des collectivités territoriales ;
- les capacités professionnelles et financières des candidats n'ont pas été contrôlées, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1411-1 dudit code ;
- en méconnaissance des mêmes dispositions, la commune n'a pas procédé à la phase finale de sélection des offres qu'elle avait annoncée ;
- aucun critère de sélection des offres n'a été porté à leur connaissance ;
- subsidiairement, le contrat litigieux devrait être qualifié de marché public de services soumis au code des marchés publics ;
- aucun avis d'appel public à la concurrence n'a été publié, en méconnaissance des dispositions de l'article 40 de ce code, comme des principes fondamentaux de la commande publique ;
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté ce moyen comme inopérant ;
- le vice considéré est d'une gravité telle qu'elle justifie l'annulation du contrat litigieux ;
- il n'y a pas eu de véritable sélection des candidatures sur la base de " critères opposables et réguliers ", en méconnaissance des dispositions de l'article 28 dudit code ;
- aucun critère de sélection des offres n'a été porté à la connaissance des candidats, en méconnaissance des dispositions de l'article 53 du même code et des principes fondamentaux de la commande publique ;
- en tout état de cause, le contrat litigieux devait prévoir la reprise du personnel par son attributaire, conformément aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
- la commune a, sur ce point, manqué à ses obligations en matière d'égalité de traitement des candidats ;
- le contrat doit nécessairement être régularisé sur ce point ;
- les conséquences notamment financières de cette irrégularité sont très lourdes pour l'exposante ;
- elle disposait, en outre, de chances sérieuses de se voir attribuer le contrat litigieux et doit ainsi être indemnisée de son manque à gagner.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2015, la commune de Lézignan-Corbières, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le contrat litigieux est un marché public de services ;
- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code général des collectivités territoriales sont, par suite, inopérants ;
- celui tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 40 du code des marchés publics est inopérant au regard du montant du contrat en litige ;
- celui tiré de l'irrégularité de la sélection des candidatures est inopérant en l'absence de mise en oeuvre d'une procédure restreinte ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail est irrecevable et inopérant, pour intéresser des rapports de droit privé étrangers au contrat litigieux ;
- ce moyen, comme les autres moyens soulevés par l'association " Léo Lagrange Méditerranée " n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des marchés publics ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Moussaron, président de la 6e chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gautron,
- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me A... représentant l'association " Léo Lagrange Méditerranée ".
1. Considérant que la commune de Lézignan-Corbières a lancé une consultation en vue du renouvellement de la gestion déléguée du centre de loisirs sans hébergement " La Lauseta " situé sur son territoire, à partir du 1er janvier 2013 et pour une durée de trois ans ; que l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", en charge depuis le 1er janvier 2001 de cette gestion, a soumissionné le 5 octobre 2012 ; que par courrier du 17 janvier 2013, elle a été informée par la commune de Lézignan-Corbières du rejet de son offre et de son choix de l'association " MJC de Lézignan-Corbières " comme cocontractante ; que le contrat a été signé le 22 février 2013 ; que, par courriers des 10 et 22 janvier 2013, l'association " Léo Lagrange Méditerranée " a vainement demandé à la commune de Lézignan-Corbières le transfert des salariés affectés à la gestion du centre de loisirs ; que, par courriers des 18 mars et 2 mai 2013, elle a, en outre et tout aussi vainement, formé devant son maire un recours gracieux en contestation tant de son éviction de la consultation, que de la validité de ce contrat, valant également demandes indemnitaires préalables ; qu'elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 septembre 2014, par lequel celui-ci a rejeté sa demande tendant, à titre principal, a ce qu'il soit enjoint à la commune de Lézignan-Corbières de régulariser le contrat conclu avec l'association " MJC de Lézignan-Corbières " en y intégrant la reprise des personnels et, à titre subsidiaire, à ce que soit prononcée la résolution de ce contrat, ainsi, en tout état de cause, qu'à la condamnation de ladite commune à lui verser diverses sommes en réparation de son préjudice ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la qualification du contrat litigieux :
2. Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'article 8 du contrat litigieux, que la rémunération de son attributaire est versée par la commune, les parties s'engageant sur un prix fixe de 21,88 euros pour une journée complète d'accueil et de 10,94 euros pour une demi-journée d'accueil d'un enfant, comprenant 4,30 euros et 2,15 euros pris en charge définitivement par la commune et 17,58 euros et 8,79 euros respectivement facturés à elle mensuellement par l'exploitant du centre de loisirs, ces prix étant convenus pour un volume estimatif annuel de 5 000 à 6 000 journées / enfants ; que contrairement à ce que soutient l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", il ne résulte ni de ces stipulations, ni des autres stipulations de ce contrat, que la commune se serait engagée à garantir une rémunération minimale à son cocontractant, correspondant à l'équivalent du produit de 5 000 journées / enfants, la commune s'engageant seulement, au même article, à maintenir les crédits correspondants au sein de son budget annexe consacré à ce service public ; qu'alors même qu'elle s'engage, par ailleurs, au règlement d'une partie des frais de personnels, de structure et de fournitures, directement pour ces dernières auprès des fournisseurs et que le coût des repas servis aux enfants accueillis demeure également à sa charge, pour un montant de 5 euros par repas, la rémunération du gestionnaire du centre de loisirs, qui dépend intégralement de la fréquentation de ce dernier, doit être regardée comme substantiellement liée aux résultats de l'exploitation, sans qu'y fasse obstacle le versement par la commune de la rémunération de son cocontractant ; que le contrat litigieux doit, en conséquence, être qualifié de délégation de service public ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association " Léo Lagrange Méditerranée " est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour rejeter sa demande tendant à la régularisation et subsidiairement, à la résolution du contrat litigieux, les premiers juges ont qualifié le contrat litigieux de marché public et examiné sa validité au regard des seules dispositions du code des marchés publics ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association " Léo Lagrange Méditerranée " devant le tribunal administratif ;
6. Considérant que, indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires ; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ; qu'à partir de la conclusion du contrat et dès lors qu'il dispose du recours ci-dessus défini, le concurrent évincé n'est, en revanche, plus recevable à demander l'annulation pour excès de pouvoir des actes préalables qui en sont détachables ;
7. Considérant que, ainsi saisi de telles conclusions par un concurrent évincé, il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat ;
En ce qui concerne la validité du contrat litigieux :
S'agissant de la régularité de la consultation :
8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat. Les garanties professionnelles sont appréciées notamment dans la personne des associés et au vu des garanties professionnelles réunies en son sein. Les sociétés en cours de constitution ou nouvellement créées peuvent être admises à présenter une offre dans les mêmes conditions que les sociétés existantes. " ; qu'aux termes de l'article R. 1411-1 du même code : " L'autorité responsable de la personne publique délégante doit satisfaire à l'exigence de publicité prévue à l'article L. 1411-1 par une insertion dans une publication habilitée à recevoir des annonces légales et dans une publication spécialisée correspondant au secteur économique concerné. / Cette insertion précise la date limite de présentation des offres de candidature, qui doit être fixée un mois au moins après la date de la dernière publication. / Elle précise également les modalités de présentation de ces offres et mentionne les caractéristiques essentielles de la convention envisagée, notamment son objet et sa nature. " ;
9. Considérant que la seule lettre d'invitation à soumissionner adressée par la commune de Lézignan-Corbières à quatre candidats potentiels, choisis par elle, ne saurait être regardée comme de nature à avoir assuré, en l'espèce, une publicité suffisante à la consultation menée en vue de l'attribution de la délégation de service public litigieuse, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 1411-1 ; qu'en tout état de cause, cette consultation devait nécessairement faire l'objet d'une publication par voie de presse, dans les conditions prévues par celles de l'article R. 1411-1 ; que par suite, la procédure de passation du contrat litigieux est entachée d'irrégularité ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article L. 1411-1 du code précité : " La commission mentionnée à l'article L. 1411-5 dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières, de leur respect de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés prévue aux articles L. 5212-1 à L. 5212-4 du code du travail et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public. " ;
11. Considérant qu'il est constant que la commission de délégation de service public n'a pas, en l'espèce, procédé à une sélection des candidats admis à présenter une offre ; que contrairement à ce qu'avait annoncé la commune dans le courrier qu'elle a adressé aux candidats potentiels le 1er octobre 2012, la consultation litigieuse n'a pas, ainsi, donné lieu à la présélection des offres prévue le 11 suivant, ni d'ailleurs à la présentation des offres présélectionnées envisagée le 18, préalablement à la phase finale de sélection des offres ; que dès lors, la procédure de passation du contrat litigieux est entachée d'irrégularité au regard des dispositions précitées ;
12. Considérant, en dernier lieu, que les délégations de service public sont soumises aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique ; que, pour assurer le respect de ces principes, la personne publique doit apporter aux candidats à l'attribution d'une délégation de service public, avant le dépôt de leurs offres, une information sur les critères de sélection des offres ; que la circonstance que les dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 1411-1 prévoient seulement que, après avoir dressé la liste des candidats admis à présenter une offre, la collectivité publique " adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager ", est sans incidence sur l'obligation d'informer également ces candidats des critères de sélection de leurs offres ; que, toutefois, les dispositions du 5ème alinéa du même article prévoyant que la personne publique négocie librement les offres avant de choisir, au terme de cette négociation, le délégataire, celle-ci n'est pas tenue d'informer les candidats des modalités de mise en oeuvre de ces critères ; qu'elle choisit le délégataire, après négociation, au regard d'une appréciation globale des critères, sans être contrainte par des modalités de mise en oeuvre préalablement déterminées ; que ces règles s'imposent à l'ensemble des délégations de service public ;
13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la lettre d'invitation à soumissionner mentionnée au point 9 précisait seulement que les dossiers de candidatures devaient comporter un projet pédagogique précis, un budget prévisionnel comprenant l'indication des prix par journée et par enfant, ainsi que des objectifs de fréquentation à atteindre et une note de références précisant leurs capacités professionnelles ; qu'au regard des principes rappelés au point précédent, cette lettre ne comportait pas, ainsi, une information suffisante sur les critères de sélection des offres que la collectivité entendait mettre en oeuvre ; que la procédure de passation du contrat litigieux a méconnu les principes rappelés au point 12, et par suite, est entachée d'illégalité ;
14. Considérant, en revanche, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code des marchés publics sont inopérants ; que ces moyens ne peuvent qu'être écartés ;
S'agissant du contenu du contrat :
15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ;
16. Considérant que l'association " Léo Lagrange Méditerranée " soutient que le contrat litigieux est entaché d'illégalité, pour ne pas mentionner, en méconnaissance de ces dispositions, l'obligation de reprise par son attributaire du personnel salarié affecté au centre de loisirs ; que toutefois, il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucune disposition légale ou réglementaire que ce contrat aurait dû prévoir expressément une telle reprise, laquelle constitue, en tout état de cause, une obligation légale pour le délégataire du service public concerné, dont ce dernier ne s'aurait s'affranchir du fait du silence du contrat sur ce point ;
En ce qui concerne les conséquences à tirer des vices entachant la conclusion du contrat litigieux :
17. Considérant que les vices, identifiés aux points 9, 11 et 13, entachant la consultation, ont affecté la régularité de la mise en concurrence et la légalité du choix de l'attributaire de la délégation de service public litigieuse ; que, toutefois, ces vices, qui n'affectent ni le consentement de la personne publique, ni le bien-fondé de la délégation et en l'absence de toutes circonstances particulières révélant notamment une volonté de la personne publique de favoriser un candidat, ne justifient pas que soit recherchée une résolution du contrat contesté ; que s'ils impliqueraient cependant, par leur gravité et en l'absence de régularisation possible, la résiliation dudit contrat, il résulte de l'instruction que celui-ci a été entièrement exécuté à la date du présent arrêt, n'étant conclu que pour une durée de trois ans ainsi qu'il a été dit au point 1, sans qu'il résulte de l'instruction qu'il aurait fait l'objet d'une prolongation dans les conditions définies à l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales ; que dès lors, il n'y a plus lieu pour la Cour de prononcer cette résiliation ;
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
18. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 16 que la commune de Lézignan-Corbières n'a commis aucune faute en s'abstenant d'imposer au délégataire, au sein du contrat litigieux, la reprise du personnel affecté au centre de loisirs ; que par suite, l'association " Léo Lagrange Méditerranée " ne saurait, en tout état de cause, réclamer à cette commune, qui n'est pas, au demeurant, le nouvel employeur des salariés concernés, l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de les conserver ;
19. Considérant, en second lieu, que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un délégation de service public demande la réparation du préjudice né de l'éviction irrégulière de sa candidature, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de voir sa candidature retenue ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses de voir sa candidature retenue ; que, dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ;
20. Considérant qu'eu égard à ce qui été dit plus haut, l'association " Léo Lagrange Méditerranée " a été irrégulièrement évincée de la procédure d'attribution de la délégation de service public litigieuse ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'elle était dépourvue de toute chance de remporter le marché litigieux ; que toutefois, elle ne démontre pas qu'elle disposait de chances sérieuses de se le voir attribuer en l'absence des irrégularités affectant la consultation et en particulier, que son offre aurait été plus avantageuse que celle du candidat retenu ; que par suite, elle est seulement fondée à réclamer l'indemnisation des frais qu'elle a dû exposer pour la présentation de son offre ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice à ce titre en l'évaluant à la somme de 3 000 euros ;
21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association " Léo Lagrange Méditerranée " est fondée à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant, à titre principal, à ce que la commune de Lézignan-Corbières soit condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros ; qu'elle est également fondée, par suite, à demander l'annulation de ce jugement et la condamnation de la commune à lui verser ladite somme ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative :
22. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Lézignan-Corbières une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par l'association " Léo Lagrange Méditerranée " et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée au même titre par ladite commune soit mise à la charge de l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 septembre 2014 est annulé.
Article 2 : La commune de Lézignan-Corbières est condamnée à verser à l'association " Léo Lagrange Méditerranée " la somme de 3 000 euros au titre des frais qu'elle a dû exposer pour la présentation de son offre.
Article 3 : La commune de Lézignan-Corbières versera une somme de 3 000 euros à l'association " Léo Lagrange Méditerranée " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Léo Lagrange Méditerranée ", à la commune de Lézignan-Corbières et à l'association " MJC de Lézignan-Corbières ".
Délibéré après l'audience du 29 mars 2016, où siégeaient :
- M. Marcovici, président-assesseur,
- Mme Héry, premier conseiller,
- M. Gautron, conseiller,
Lu en audience publique, le 23 mai 2016.
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N° 14MA04578