Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 6 juin 2014 lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français.
Par un jugement n°1406989 du 1er décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2015, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er décembre 2014 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge du préfet des Bouches-du-Rhône une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a commis une erreur sur la réalité des documents produits qui démontrent son entrée régulière et son séjour en France depuis 1997 à Mayotte et depuis 2005 en métropole ;
- il ne peut lui être opposé que le titre de séjour délivré à Mayotte n'est pas valide en métropole, Mayotte étant un département français régi par le principe d'indivisibilité de la République ;
- la décision du préfet étant postérieure à l'ordonnance du 7 mai 2014 qui applique à Mayotte les règles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que les années passées à Mayotte ne pouvaient être prises en compte comme un séjour en France au sens de l'article L. 111-2 de ce code au moins jusqu'au 31 mars 2011 ;
- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu, dès lors qu'elle a rejoint ses enfants en métropole et qu'elle n'a plus d'attaches ni à Mayotte ni aux Comores ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation quant à son insertion dans la société française.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale le 3 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 ;
- l'ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Hameline a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 6 juin 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour formée par Mme D...B..., ressortissante comorienne, et a obligé celle-ci à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande d'annulation de cet arrêté, laquelle a été rejetée par jugement en date du 1er décembre 2014 ; que Mme B...interjette appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône :
2. Considérant, en premier lieu, qu'avant l'entrée en vigueur, le 26 mai 2014, de l'ordonnance du 7 mai 2014 rendant applicable à Mayotte avec adaptations le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et modifiant les articles L. 111-2 et L. 111-3 de ce code, le territoire de Mayotte n'était pas regardé comme " en France " pour l'application des dispositions dudit code ; que, jusqu'à cette date, les conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte n'étaient pas régies par ce code mais par les règles spécifiques issues de l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000, lesquelles sont restées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 7 mai 2014 qui est dépourvue de caractère rétroactif ; que la soumission du Département de Mayotte depuis le 31 mars 2011 au régime de l'identité législative prévu par l'article 73 de la Constitution est demeurée sans influence sur le maintien de la législation spéciale préalablement en vigueur dans la collectivité ; qu'en application de l'ordonnance du 26 avril 2000, les titres délivrés pour l'entrée et le séjour à Mayotte n'autorisaient pas leurs détenteurs à entrer et à séjourner en France métropolitaine ; que les étrangers séjournant à Mayotte et désirant se rendre en France métropolitaine étaient tenus de solliciter à cette fin la délivrance d'un titre d'entrée ou de séjour en application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant que Mme B...s'est vu délivrer à Mayotte, où elle serait entrée en 1997 et aurait vécu au moins jusqu'à son divorce d'avec un ressortissant français en 2004 selon ses déclarations, une carte de séjour temporaire, puis le 1er juillet 2004 une carte de résident valide jusqu'au 30 juin 2014, sur le fondement des articles 19 et suivants de l'ordonnance du 26 avril 2000 localement applicable ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a commis aucune erreur de droit en estimant, d'une part, que l'intéressée n'avait pas pu entrer et séjourner régulièrement en France métropolitaine de 2005 à 2014 sous couvert de cette carte de résident limitée au territoire mahorais, et, d'autre part, que l'ancienneté de son séjour " en France " au sens du code précité devait être appréciée au regard de la durée de sa résidence sur le territoire de la France métropolitaine et non de son séjour à Mayotte antérieur à 2005 ; que le seul fait invoqué de manière générale par la requérante que le code du séjour des étrangers et du droit d'asile était applicable à Mayotte le 6 juin 2014, date de la décision en litige prise par le préfet des Bouches-du-Rhône, ne démontre aucune erreur de droit de l'administration sur les points susmentionnés ; que la décision contestée ne méconnaît ainsi, contrairement à ce qu'elle fait valoir, ni le principe d'indivisibilité du territoire de la République, ni les dispositions statutaires applicables à la collectivité de Mayotte ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l 'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant que le séjour en métropole de MmeB..., qui ne peut se prévaloir comme il a été dit ci-dessus des titres de séjour délivrés à Mayotte pour établir une résidence habituelle " en France " antérieure à 2005, n'est pas établi de manière continue sur l'ensemble de la période alléguée postérieure au 26 décembre 2005, alors notamment que, comme l'ont relevé le préfet et les premiers juges, l'intéressée se borne à produire de courts extraits de deux de ses passeports établis en 2004 et 2011, ainsi que des documents administratifs et relevés de compte ponctuels ne couvrant qu'un ou deux mois des années 2006 à 2013, et ne permettant pas d'établir une résidence continue de l'intéressée chez l'une de ses filles à Marseille ; que s'il ressort des pièces produites en appel que la requérante, divorcée en 2004 de son conjoint français, a trois enfants de nationalité française, elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales aux Comores ; que, dans ces conditions, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précitées ;
6. Considérant que, pour les mêmes raisons, et alors même que Mme B...aurait temporairement bénéficié de prestations sociales et signé un contrat d'insertion, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de la requérante ;
7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions présentées par l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration sous astreinte de lui délivrer un titre de séjour ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle en tout état de cause à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser une quelconque somme à Mme B...ou à son conseil, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à Me A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 25 avril 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mai 2016.
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N° 15MA01262