La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/2016 | FRANCE | N°15MA00665

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 13 mai 2016, 15MA00665


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bastia :

- d'annuler la délibération du 21 mai 2013 par laquelle le conseil municipal d'Ajaccio a approuvé le plan local d'urbanisme en tant qu'il institue deux emplacements réservés n° 9 et n° 10, ensemble la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux en date du 18 juillet 2013 ;

- de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio les dépens ainsi qu'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de ju

stice administrative.

Par un jugement n°1300965 du 16 décembre 2014, le tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bastia :

- d'annuler la délibération du 21 mai 2013 par laquelle le conseil municipal d'Ajaccio a approuvé le plan local d'urbanisme en tant qu'il institue deux emplacements réservés n° 9 et n° 10, ensemble la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux en date du 18 juillet 2013 ;

- de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio les dépens ainsi qu'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1300965 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 16 février 2015, le 14 et le 22 septembre 2015, M. A... représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération du 21 mai 2013 par laquelle le conseil municipal d'Ajaccio a approuvé le plan local d'urbanisme en tant qu'il institue deux emplacements réservés n° 9 et n° 10, ensemble la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux en date du 18 juillet 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le caractère professionnel des passages permettant d'accéder au littoral ;

- les dispositions de l'article L. 160-6-1 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- un emplacement réservé ne peut être créé que pour permettre la réalisation d'ouvrages futurs et ne peut pas s'appliquer à des ouvrages existants déjà réalisés ;

- le plan local d'urbanisme ne justifie pas de la création de ces emplacements réservés ;

- la création de ces emplacements réservés est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2015, la commune d'Ajaccio, représentée par la SCP d'avocats Sartorio- Lonqueue- Sagalovitsch et Associés, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A... à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués par l'appelant sont infondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public relevé d'office, tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi, la commune d'Ajaccio ayant appliqué l'article L. 160-6-1 du code de l'urbanisme pour la création des emplacements réservés litigieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Giocanti,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;

- les observations de Me D... représentant la commune d'Ajaccio.

1. Considérant que M. A... relève appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 21 mai 2013 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Ajaccio a approuvé le plan local d'urbanisme en tant qu'elle instaure sur la parcelle, cadastrée section CO 227, deux emplacements réservés n° 9 et n° 10 en vue de permettre l'accès au littoral ensemble la décision implicite de rejet opposée à son recours gracieux en date du 18 juillet 2013 ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... justifie être propriétaire des parcelles cadastrées CO n° 226, 227, 86 et 338 situées Boulevard Tino Rossi à Ajaccio ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par la commune et tirée de son défaut de qualité lui donnant intérêt pour agir contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme ne peut qu'être écartée ;

Sur les conclusions en annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 160-6-1 du code de l'urbanisme : " Une servitude de passage des piétons, transversale au rivage peut être instituée sur les voies et chemins privés d'usage collectif existants, à l'exception de ceux réservés à un usage professionnel selon la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article L. 160-6. Cette servitude a pour but de relier la voirie publique au rivage de la mer ou aux sentiers d'accès immédiat à celui-ci, en l'absence de voie publique située à moins de cinq cent mètres et permettant l'accès au rivage" ; qu'aux termes de l'article R. 160-1-6 du code de l'urbanisme " En vue de l'établissement du tracé et des caractéristiques de la servitude de passage transversale au rivage, le chef du service maritime adresse au préfet, pour être soumis à enquête, un dossier (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 160-20 du code de l'urbanisme : " Au cas où un projet a donné lieu à enquête en application des articles R. 160-14 ou R. 160-16-1, le préfet soumet à la délibération des conseils municipaux des communes intéressées le tracé et les caractéristiques du projet de servitude. Cette délibération est réputée favorable si elle n'est pas intervenue dans un délai de deux mois. Si le conseil municipal entend faire connaître son opposition, celle-ci doit être expressément formulée dans la délibération. " ; que l'article R. 160-21 du code de l'urbanisme prévoit que " Dans les cas prévus à l'article R. 160-20, l'approbation du tracé et des caractéristiques de la servitude résulte : a) d'un arrêté du préfet, en l'absence d'opposition de la ou des communes intéressées ; b) d'un décret en Conseil d'Etat, en cas d'opposition d'une ou plusieurs communes " ; qu'aux termes de l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme dans sa version applicable à la date de l'acte querellé : " Les plans locaux d'urbanisme doivent comporter en annexe les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol et qui figurent sur une liste dressée par décret en Conseil d'Etat. / Le représentant de l'Etat est tenu de mettre le maire ou le président de l'établissement public compétent en demeure d'annexer au plan local d'urbanisme les servitudes mentionnées à l'alinéa précédent. Si cette formalité n'a pas été effectuée dans le délai de trois mois, le représentant de l'Etat y procède d'office. /Après l'expiration d'un délai d'un an à compter, soit de l'approbation du plan, soit, s'il s'agit d'une servitude nouvelle, de son institution, seules les servitudes annexées au plan peuvent être opposées aux demandes d'autorisation d'occupation du sol. " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L 123-1-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. A ce titre, le règlement peut :( ...) 8° Fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général ainsi qu'aux espaces verts " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'une servitude de passage des piétons, transversale au rivage, peut être instituée en vertu de l'article L. 160-6-1, sous certaines conditions, au profit de l'Etat après enquête publique et en l'absence d'opposition de la commune, sur les voies et chemins privés d'usage collectif existants, pour relier la voirie publique au rivage de la mer ou aux sentiers d'accès immédiat à celui-ci ; que la création par un plan local d'urbanisme d'un emplacement réservé permet à la commune après avoir acquis le terrain faisant l'objet de cet emplacement réservé de réaliser un équipement d'intérêt général déterminé par les dispositions de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme et dans l'attente, d'interdire sur ledit terrain les constructions qui ne seraient pas conformes à la destination de l'emplacement réservé ou les constructions ne présentant qu'un caractère précaire ; qu'il suit de là qu'en instaurant, par une délibération approuvant le plan local d'urbanisme, des emplacements réservés sur des accès au rivage existants en vue de permettre aux piétons d'accéder au littoral sur le fondement de l'article L. 160-6-1 du code de l'urbanisme, alors qu'ainsi qu'il a été dit ces dernières dispositions ne régissent pas la création d'emplacements réservés, le conseil municipal d'Ajaccio a méconnu le champ d'application de la loi ;

6. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens de M. A... n'apparaissent pas susceptibles, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de l'acte en litige ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 21 mai 2013 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Ajaccio a approuvé le plan local d'urbanisme communal en tant qu'elle instaure sur la parcelle cadastrée section CO 227 deux emplacements réservés n° 9 et n° 10 ; qu'il est, dès lors, fondé à demander tant l'annulation de ce jugement que l'annulation, dans cette mesure, de la délibération du 21 mai 2013, ensemble la décision rejetant son recours gracieux ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune d'Ajaccio demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens, soit mise à la charge de M. A... qui n'est, dans la présente instance, ni partie perdante, ni tenu aux dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, en application des mêmes dispositions de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1300965 du tribunal administratif de Bastia du 16 décembre 2014 est annulé.

Article 2 : La délibération du 21 mai 2013 du conseil municipal d'Ajaccio en tant qu'elle instaure sur la parcelle cadastrée section CO 227 deux emplacements réservés n° 9 et n° 10 et la décision implicite par laquelle la commune d'Ajaccio a rejeté le recours gracieux de M. A... du 18 juillet 2013 sont annulés.

Article 3 : La commune d'Ajaccio versera à M. A..., une somme de 2000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune d'Ajaccio présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et à la commune d'Ajaccio.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2016, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Giocanti, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mai 2016 .

''

''

''

''

3

N° 15MA00665


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00665
Date de la décision : 13/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Droit de propriété - Servitudes - Institution des servitudes - Servitudes de passage sur le littoral.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU) - Application des règles fixées par les POS ou les PLU - Règles de fond - Règles applicables aux secteurs spéciaux - Emplacements réservés.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Fleur GIOCANTI
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : POUILHE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-13;15ma00665 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award