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12/05/2016 | FRANCE | N°15MA02240

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 12 mai 2016, 15MA02240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 21 novembre 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement familial qu'elle avait présentée au bénéfice de son époux.

Par un jugement n° 1305945 du 1er avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2015, MmeB..., représentée par Me Demersseman, demande à la

Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2015 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 21 novembre 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement familial qu'elle avait présentée au bénéfice de son époux.

Par un jugement n° 1305945 du 1er avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2015, MmeB..., représentée par Me Demersseman, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 21 novembre 2013 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer un titre de séjour à son époux dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte, passé ce délai, de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros, au bénéfice de Me Demersseman, en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire enregistré le 19 février 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses écritures de première instance.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la décision du 21 octobre 2015du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B....

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Sur sa proposition, le rapporteur public, désigné par le président de la cour en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du même code par le président de la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Markarian.

1. Considérant que Mme B..., de nationalité algérienne, titulaire d'un certificat de résidence algérien valable jusqu'au 25 juillet 2024 et veuve d'un ressortissant français décédé le 30 août 2010, a présenté le 21 décembre 2011 au préfet de l'Hérault une demande de regroupement familial au profit de son second époux avec lequel elle s'est mariée en Algérie le 31 juillet 2011 ; que, par une décision du 21 novembre 2013, le préfet l'Hérault a opposé un refus à cette demande au motif que Mme A... ne remplissait pas les conditions de ressources prévues par les dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que Mme B... relève appel du jugement du 1er avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, seules applicables aux ressortissants algériens : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente (...) " et qu'aux termes du titre II du protocole annexé au même accord : " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien (...) " ;

3. Considérant que l'autorité administrative ne peut légalement rejeter une demande de regroupement familial qu'après avoir vérifié que, ce faisant, elle ne porte pas une atteinte excessive au droit du demandeur au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il ressort de la décision attaquée du 21 novembre 2013 que pour refuser à Mme B... le bénéfice du regroupement familial en faveur de son époux, le préfet de l'Hérault s'est fondé sur le seul caractère insuffisant des ressources de l'intéressée au cours des douze mois précédant sa demande ; que si le préfet de l'Hérault pouvait légalement fonder sa décision sur ce motif, les conditions de ressources nécessaires pour bénéficier d'un regroupement familial n'étant pas en l'espèce remplies, il ne se trouvait pas en situation de compétence liée et il lui appartenait de procéder à un examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des incidences de son refus sur la situation de Mme B... au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en se bornant à énoncer dans sa décision le motif tiré du caractère insuffisant des ressources, sans autre précision ni élément circonstancié tenant à la situation familiale de la requérante, le préfet de l'Hérault s'est, à tort, estimé lié par l'insuffisance des ressources de l'intéressée pour rejeter la demande dont il était saisi ; qu'il a méconnu l'étendue de son pouvoir d'appréciation ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à soutenir que la décision du 21 novembre 2013 est entachée d'une erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 novembre 2013 du préfet de l'Hérault ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution " et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; que selon les dispositions de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

7. Considérant que le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde pour annuler la décision attaquée du 21 novembre 2013, que le préfet de l'Hérault accorde à Mme B... le bénéfice du regroupement familial en faveur de son époux ; que les conclusions à fin d'injonction présentées en ce sens doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de se prononcer à nouveau sur la demande de regroupement familial présentée par l'appelante dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par Mme B... ;

Sur l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Demersseman, avocat de la requérante, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2015 et la décision du 21 novembre 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement familial présentée par Mme B... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la demande de regroupement familial présentée par Mme B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Demersseman, avocat de Mme B..., sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., épouseB..., à Me Demersseman et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré à l'issue de l'audience du 28 avril 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Markarian, premier conseiller,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 mai 2016.

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N° 15MA02240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02240
Date de la décision : 12/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SELARL ACCESSIT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-12;15ma02240 ?
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