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04/04/2016 | FRANCE | N°15MA03492

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 04 avril 2016, 15MA03492


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé à titre principal au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 avril 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1503275 du 29 juin 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

ête et un mémoire, enregistrés le 14 août 2015 et le 26 février 2016, Mme B..., représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé à titre principal au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 avril 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1503275 du 29 juin 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 août 2015 et le 26 février 2016, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 juin 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 22 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre à titre principal au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre, subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement de son époux et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat à verser à son conseil qui renonce à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont commis des erreurs dans l'appréciation de sa situation ;

- l'arrêté du préfet est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation ;

- la décision de refus de séjour viole les articles 6-7 et 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- sa présence est indispensable auprès de son époux dont l'état de santé nécessite des soins médicaux en France pour une durée minimale de 6 mois ;

- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- et les observations de MeA..., représentant MmeB....

1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne née en 1989, a sollicité le 17 octobre 2014 la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'étranger malade ; que par arrêté du 22 avril 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que Mme B...relève appel du jugement du 29 juin 2015 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à titre principal à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Considérant que le préfet des Bouches-du-Rhône, après avoir visé la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 3 et 8, l'accord franco-algérien, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment ses articles L. 511-1 I 3° et II ainsi que l'avis émis le 15 décembre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé, mentionne dans sa décision que MmeC..., épouseB..., ressortissante algérienne née en 1989, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au titre de l'article 6 alinéa 1-7 de l'accord franco-algérien ; qu'il ajoute que l'intéressée déclare être entrée en France le 17 octobre 2013 sous couvert d'un visa de court séjour et qu'elle ne justifie pas résider habituellement en France ; qu'il indique que son état de santé ne nécessite pas son maintien sur le territoire français dès lors qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, que le défaut de prise en charge médicale ne peut pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers l'Algérie ; que le préfet mentionne également que dans la mesure où son conjoint est dans une situation analogue à la sienne et que leur fille est née le 1er avril 2014 à Marseille, le refus d'admission en France et une mesure d'éloignement à son encontre ne sont pas contraires à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle s'est mariée en 2012 ; qu'enfin, le préfet mentionne que l'intéressée n'établit pas l'existence d'une des protections envisagées par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile contre l'édiction d'une obligation de quitter le territoire ; qu'ainsi le préfet des Bouches-du-Rhône a suffisamment motivé sa décision, en droit et en fait ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, en tout état de cause, être écarté ;

3. Considérant qu'il résulte de la motivation de cette décision que le préfet des Bouches-du-Rhône a procédé à l'examen particulier de la situation de MmeB... ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit:/ (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ;

5. Considérant que par un avis du 15 décembre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme B...ne nécessitait pas son maintien sur le territoire français dans la mesure où elle pouvait bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine et que le défaut de prise en charge médicale n'était pas susceptible d'entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que Mme B...justifie, contrairement à ce qu'a estimé le préfet des Bouches-du-Rhône, résider habituellement en France depuis son entrée régulière le 17 octobre 2013 ; que, toutefois, elle n'établit pas que le traitement qui lui est prescrit, constitué par des médicaments calmants pour les nerfs, serait indisponible en Algérie ni que l'absence de ce traitement entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône était fondé à refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions susmentionnées de l'article 6 alinéa 7 de l'accord franco-algérien ;

6. Considérant que Mme B...est entrée en France en octobre 2013 à l'âge de 24 ans, avec son époux de nationalité algérienne, qui est en situation irrégulière sur le territoire ; que, de leur union, est née en France une fille le 1er avril 2014 ; qu'elle se prévaut de la présence en France de son oncle et de son beau-frère, de nationalité française, et de son insertion sociale ; que, toutefois, ses parents vivent en Algérie ; qu'eu égard au caractère récent de l'arrivée du couple sur le territoire français et à la circonstance que la cellule familiale peut se reconstituer en Algérie, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6 alinéa 5 de l'accord franco-algérien ;

7. Considérant que si l'intéressée fait valoir que sa présence est indispensable auprès de son époux, qui est atteint d'une infirmité visuelle nécessitant un suivi par un spécialiste et doit subir une intervention chirurgicale suivie d'une rééducation, ces circonstances sont postérieures à la décision de refus de séjour critiquée ; que Mme B...n'établit pas que son époux serait en possession d'une carte de séjour temporaire ou d'une autorisation provisoire de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'il appartient à la requérante, si elle s'y croit fondée, de présenter une nouvelle demande de titre de séjour accompagnée de toute pièce pouvant justifier de la nécessité de son maintien en France ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que pour les motifs exposés au point 5, Mme B...ne justifie pas avoir fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux en France ; qu'ainsi, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision de refus de séjour été prise ;

10. Considérant que, pour les motifs exposés aux points 4 à 6, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de l'intéressée ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants:/ (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...)/ La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et II (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ; que Mme B...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 22 avril 2015 ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions susmentionnées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône se serait cru en situation de compétence liée pour prononcer la décision portant obligation pour l'intéressée de quitter le territoire français ;

12. Considérant qu'il résulte de ces dispositions issues de la transposition de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 que les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'ont pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de séjour qu'elles accompagnent ; que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les objectifs définis par le paragraphe 1 de l'article 12 de cette directive ; que la décision de refus de séjour, qui mentionne comme il a été dit ci-dessus les éléments de droit et de fait propres à la situation de Mme B..., est suffisamment motivée ;

13. Considérant que le délai d'un mois accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue le délai de droit commun le plus long susceptible d'être accordé en application des dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas allégué que Mme B...ait demandé au préfet à bénéficier d'une prolongation du délai accordé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français ; que par ailleurs, l'intéressée ne justifie pas de circonstances de nature à faire regarder le délai d'un mois prévu par la décision attaquée comme n'étant pas approprié à sa situation personnelle ; qu'en outre, le préfet n'était pas tenu de rechercher s'il y avait lieu de lui accorder un délai supérieur à trente jours ;

14. Considérant que pour les motifs exposés au point 5, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B... et ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Me A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 avril 2016.

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N° 15MA03492


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03492
Date de la décision : 04/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : MAGNAN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-04;15ma03492 ?
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