Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune d'Artigues a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération en date du 29 mai 2012 par laquelle le conseil municipal de Rians a approuvé le renouvellement du bail liant la commune à l' " union syndicale des chasseurs et propriétaires de Rians " (USCPR) pour la chasse en forêt communale pour une durée de douze ans moyennant le versement d'une somme de 120 euros et la prise en charge par l'association des frais notariés, en tant qu'elle porte sur les biens communaux situés sur son territoire, et de mettre à la charge de la commune de Rians la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1202001 du 5 décembre 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 9 février 2015, la commune d'Artigues, représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 5 décembre 2014 ;
2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Rians en date du 29 mai 2012.
Elle soutient que :
- elle a intérêt pour agir pour défendre les intérêts portant sur le droit d'usage forestier constitué au profit de ses habitants ;
- la délibération litigieuse méconnaît l'article 542 du code civil ;
- les premiers juges ont procédé à une application erronée de la convention du 2 mars 1828 en méconnaissant l'usufruit de la collectivité artiguaise ;
- la commune d'Artigues est en conséquence titulaire du droit de chasse sur les 739 hectares de bois communaux ;
- la convention du 2 mars 1828 autorise la répartition mais pas la privation de l'usage des biens communaux et n'a pas eu pour effet de régler le problème de la chasse ;
- la délibération litigieuse ne peut légalement réserver l'usage de biens communaux à une partie des ayants-droit, en l'espèce les habitants d'Artigues ;
- permettre que les membres de l'USCPR puissent venir chasser librement et sans concertation sur les 739 hectares qui leur ont été donnés à bail, mais éparpillés au milieu du territoire cynégétique d'Artigues, alors que la commune de Rians présente une superficie de 9 700 hectares, accroît les risques d'accident ;
- la délibération contestée introduit une discrimination excessive et non justifiée entre les ayants-droit à la jouissance des bois concernés puisqu'elle écarte de la chasse les habitants d'Artigues au mépris de leur droit égal acquis aux produits de leurs biens communaux quand bien même ils seraient la propriété de la commune voisine bien que situés sur leur propre territoire communal.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2016, l'union syndicale des chasseurs et propriétaires de Rians (USCPR), représentée par la SCP Loustanau-A..., conclut au rejet de la requête et que soit mise à la charge de la commune d'Artigues la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune d'Artigues ne sont pas fondés.
Un courrier du 18 décembre 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Un mémoire présenté pour la commune de Rians par Me B...a été enregistré le 1er février 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code civil ;
- la loi du 10 juin 1793 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 21 janvier 2016 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pocheron,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la commune d'Artigues, et de Me A..., représentant l' " union syndicale des chasseurs et propriétaires de Rians ".
Une note en délibéré présentée pour la commune d'Artigues a été enregistrée le 8 mars 2016.
1. Considérant que la commune d'Artigues relève appel du jugement en date du 5 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande dirigée contre la délibération en date du 29 mai 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune voisine de Rians a approuvé le renouvellement du bail la liant à l' " union syndicale des chasseurs et propriétaires de Rians " (USCPR) pour la chasse en forêt communale pour une durée de douze ans moyennant le versement d'une somme de 120 euros et la prise en charge des frais notariés, en tant qu'elle porte sur les biens communaux sis à l'intérieur de son territoire ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 542 du code civil : " Les biens communaux sont ceux à la propriété ou au produit desquels les habitants d'une ou plusieurs communes ont un droit acquis " ;
3. Considérant que par transaction conclue le 18 octobre 1559 avec le seigneur de Cental possédant un fief sur les territoires actuels des communes de Rians, Artigues et Amirat, celui-ci s'est désisté de ses terres gastes au profit de la communauté de Rians ; qu'il s'en est suivi de nombreux litiges entre les habitants d'Artigues et de Rians sur l'usage des bois situés sur le territoire de la communauté d'Artigues et appartenant à la communauté de Rians ; qu'il ressort des termes de l'ordonnance royale du 6 août 1828 qui a rendu exécutoire la transaction conclue le 2 mars précédent entre les communes d'Artigues et de Rians pour mettre fin à ces litiges que " les transactions consenties antérieurement sur le même objet sont annulées ", que la commune de Rians conserve tous les droits et privilèges sur les 785 ha de forêts dont elle conserve la propriété sur le territoire de la commune d'Artigues, que " la commune d'Artigues ne conserve le droit de parcours et la faculté de bûcherer, de glander et de prendre des engrais que sur les terres que la commune de Rians possède au territoire d'Artigues " ; qu'ainsi les bois concernés par la délibération litigieuse, dont la propriété appartient à la commune de Rians, relèvent, dès lors qu'ils sont grevés de droits d'usage au profit des habitants des communes en cause, de la catégorie des biens communaux visés par les dispositions précitées de l'article L. 542 du code civil ; qu'il résulte de ces dispositions que s'il est loisible à l'autorité compétente, pour déterminer les conditions d'utilisation des biens communaux ou sectionnaux, de donner à bail le droit de chasse sur ces biens, elle ne saurait, sans méconnaître l'égale vocation de l'ensemble des habitants de la commune ou des ayants droit de la section à bénéficier de ces biens, réserver l'usage gratuit du droit de chasse à une personne physique ou morale déterminée, en l'absence de toute justification tirée de l'intérêt public ; que, dans le cas de l'espèce, la délibération contestée ayant donné à bail le droit de chasse sur les biens en cause, la commune de Rians n'a pas à justifier de l'intérêt public de cette décision ;
4. Considérant qu'il résulte de la transaction sus-évoquée du 2 mars 1828, qui liste de manière précise et exhaustive les droits d'usage consentis aux habitants d'Artigues sur les bois situés sur le territoire de leur commune et appartenant à la commune de Rians que la commune d'Artigues ne saurait en tout état de cause se prévaloir d'un droit de chasse sur les bois concernés ; que la circonstance que les habitants n'avaient pas le droit de chasser dans les biens communaux à la date de la transaction est sans incidence sur la portée juridique de celle-ci ;
5. Considérant que le moyen tiré de ce que l'intérêt général impliquerait que les habitants d'Artigues soient seuls autorisés à chasser sur le territoire de leur commune pour des raisons de sécurité, outre qu'il n'est aucunement établi, est en tout état de cause inopérant à l'encontre d'une délibération qui donne à bail, et non pas à titre gratuit, un droit de chasse sur des biens communaux ;
6. Considérant que la circonstance que les statuts de l'USCPR bénéficiaire de la délibération querellée excluent de facto les habitants d'Artigues du droit de chasse qui lui a ainsi été accordé est sans incidence sur la légalité de cette délibération, lesdits habitants d'Artigues n'ayant, ainsi qu'il a été dit, aucun droit de chasse sur les biens communaux concernés ; que le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse est discriminatoire vis-vis des habitants d'Artigues en leur qualité d'ayants-droit sur les biens en cause doit, par le même motif, être également écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa demande de première instance, la commune d'Artigues n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune d'Artigues le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'USCPR et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune d'Artigues est rejetée.
Article 2 : La commune d'Artigues versera à l' " union syndicale des propriétaires chasseurs de Rians " une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de l' " union syndicale des propriétaires chasseurs de Rians " est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Artigues, à la commune de Rians et à l' " union syndicale des chasseurs et propriétaires de Rians pour la chasse en forêt communale ".
Délibéré après l'audience du 7 mars 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 mars 2016.
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N° 15MA00506