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22/02/2016 | FRANCE | N°14MA01621

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 22 février 2016, 14MA01621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... H...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré cessibles au profit de la métropole Nice-Côte d'Azur, les terrains nécessaires à la réalisation des travaux de la phase 1 de la voie structurante nord/sud entre la digue des Français et l'avenue Auguste Vérola dans la plaine du Var, déclarés d'utilité publique par arrêté du 12 décembre 2011.

Par un jugement n° 1203005 du 11 février 2014, le tri

bunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... H...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré cessibles au profit de la métropole Nice-Côte d'Azur, les terrains nécessaires à la réalisation des travaux de la phase 1 de la voie structurante nord/sud entre la digue des Français et l'avenue Auguste Vérola dans la plaine du Var, déclarés d'utilité publique par arrêté du 12 décembre 2011.

Par un jugement n° 1203005 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 avril 2014, Mme H... représentée par Me G..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 11 février 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral susmentionné du 10 janvier 2012.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que l'exception d'illégalité de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2011 n'était pas fondée ;

- le projet de réalisation de la voie structurante est indissociable de l'instauration d'une ligne de transport en commun, celle-ci a été totalement éludée dans l'évaluation financière contenue dans le dossier soumis à l'enquête publique ; ce dossier est vicié car il ne respecte pas les prescriptions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique qui impose une appréciation sommaire des dépenses et une évaluation socio-économique relative aux grands projets d'infrastructures ; en l'espèce, l'estimation des dépenses a été sous-évaluée en raison de l'absence de prise en compte du coût estimatif de l'opération globale ; la procédure de déclaration d'utilité publique est ainsi entachée d'une irrégularité substantielle ayant nui à l'information du public ; les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier en retenant que l'évaluation socio-économique avait bien été réalisée par le maître d'ouvrage ;

- l'absence de prise en compte par le projet de l'instauration de la nouvelle ligne de tramway a privé les administrés d'une garantie substantielle fondée sur la saisine préalable des organes consultatifs compétents ; en application des articles R. 121-1 et suivants du code de l'environnement, le projet litigieux nécessitait la saisine de la commission nationale du débat public ; le comité permanent de l'établissement public d'aménagement de l'opération d'intérêt national (OIN) de la plaine du Var " Eco Vallée " aurait dû être consulté ;

- la concertation exigée par l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, opérée en 2007, est tronquée et trop ancienne puisque le projet a été ensuite défini dans le cadre de l'OIN Eco Vallée ; dès lors, en 2011, avant la mise à l'enquête publique du projet, une nouvelle concertation avec le public et un nouveau bilan de concertation auraient dû intervenir ;

- l'étude d'impact, tronquée et insuffisante, ne respecte pas les dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ;

- les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant que le projet présentait un caractère d'utilité publique ; le maître d'ouvrage a reconnu un taux de rentabilité interne négatif dans la présentation du projet ; la voie de 40 mètres ne présente aucun avantage ni pour les usagers, ni pour les collectivités publiques ; les inconvénients du projet apparaissent très importants de par son coût, les atteintes qu'il porte à la propriété privée, à l'environnement et aux exploitations agricoles, et ses incidences sur les sites à protéger et sur la nappe phréatique ; il présente une utilité modeste au vu des infrastructures existantes ;

- l'arrêté de cessibilité du 10 janvier 2012 est lui-même entaché de vices propres ;

- les premiers juges ont renversé la charge de la preuve en retenant que si elle soutenait que la liste des propriétaires des immeubles expropriés figurant sur la liste mentionnée au 2° de l'article R. 11-19 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique était incomplète ou erronée, ce moyen n'était pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; en effet, il appartient à l'expropriant de justifier que la liste des propriétaires est complète, or, en l'espèce, elle est incomplète et erronée ;

- l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 12 décembre 2011 méconnaît l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les emprises de la voie se situent au-delà de la distance minimale du rivage de la mer fixée par ces dispositions.

Par des mémoires en défense enregistrés le 3 décembre 2014 et le 23 octobre 2015, la métropole Nice Côte d'Azur conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme H... une somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie de la délibération du conseil métropolitain du 11 avril 2014 portant délégation au président pour agir en justice en application des articles L. 5211-9 et L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales ;

- aucun des moyens invoqués par la requérante contre l'arrêté de cessibilité litigieux ainsi que, par voie d'exception, contre la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2011 n'est fondé ;

- de nouveaux mémoires ne peuvent être présentés recevablement pour le compte de Mme H... après son placement sous curatelle renforcée par le tribunal d'instance de Nice le 29 janvier 2015 sans autorisation du curateur ;

Par des mémoires enregistrés les 20 octobre, 9 décembre, 10 décembre et 21 décembre 2015, Mme H..., représentée par Me A..., conclut aux mêmes fins que sa requête, et demande en outre qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle persiste dans les moyens de sa requête, et soutient en outre que :

- Mme E... désignée curatrice de sa tante le 29 janvier 2015 a donné son autorisation à la présente action en justice ;

- l'auteur de l'arrêté de cessibilité est incompétent sauf à justifier d'une délégation expresse ;

- le maire de Nice a annoncé le 28 septembre 2015 que le tracé de la voie serait modifié pour contourner son habitation, ce qui implique nécessairement une modification du plan parcellaire et rendait nécessaire une nouvelle enquête parcellaire ;

- la cession par la métropole Nice Côte d'Azur à un promoteur immobilier d'un vaste terrain à bâtir longeant la future voie démontre que le projet dessert essentiellement des intérêts privés et non l'utilité publique.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 novembre 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de Mme H....

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

- le chantier de réalisation du projet se trouve bloqué par le maintien dans les lieux de la requérante, d'où la mise en oeuvre d'un aménagement routier provisoire permettant de contourner son habitation afin de respecter les échéances liées à la desserte du stade Allianz Arena lors de l'Euro 2016, sans aucune modification du tracé initial de la voie.

Mme E..., curatrice de Mme H..., a informé la Cour le 8 septembre 2015 que celle-ci renonçait au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale qui lui avait été accordée par décision du 21 mai 2014.

Un courrier du 22 septembre 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

L'instruction a été close par ordonnance le 21 décembre 2015 à 12 heures.

La métropole Nice-Côte d'Azur a présenté un nouveau mémoire le 22 décembre 2015 et de nouvelles pièces le 27 janvier 2016, après clôture de l'instruction, qui n'ont pas été communiqués.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2008-229 du 7 mars 2008 ;

- le décret n° 2008-773 du 30 juillet 2008 ;

- le décret du 17 octobre 2011 portant création de la métropole dénommée " Métropole Nice-Côte d'Azur " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la cour administrative d'appel de Marseille a désigné M. Michel Pocheron, président-assesseur, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bocquet, président de la 5ème chambre.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hameline,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,

- les observations de Me F... substituant Me A... représentant Mme H..., et celles de Me D... représentant la métropole Nice Côte d'Azur.

1. Considérant que, par arrêté du 12 décembre 2011, le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré d'utilité publique, à la demande de la communauté urbaine Nice Côte d'Azur, le projet de réalisation de la première phase d'une voie structurante d'une largeur de 40 mètres sur le territoire de la commune de Nice entre la digue des Français et l'avenue Auguste Vérola dans la plaine du Var, sur une longueur de 3,8 kilomètres ; que, par un arrêté du 10 janvier 2012, le préfet a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à la réalisation de ce projet au profit de la métropole Nice Côte d'Azur venant aux droits de la communauté urbaine Nice Côte d'Azur en application du décret du 17 octobre 2011 ; que Mme C...H..., dont la propriété bâtie est incluse dans l'emprise foncière du projet, a formé un recours contentieux contre l'arrêté de cessibilité du 10 janvier 2012 devant le tribunal administratif de Nice ; que, par jugement n° 1203005 du 11 février 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que Mme H... interjette appel de ce jugement devant la Cour ;

Sur la fin de non-recevoir opposée aux écritures de Mme H... postérieures à son placement sous curatelle :

2. Considérant que, si Mme H... a été placée sous curatelle renforcée au cours de la présente instance par décision du tribunal d'instance de Nice du 29 janvier 2015, cette circonstance n'entache pas la recevabilité des conclusions et moyens nouveaux invoqués pour son compte par son nouveau conseil désigné postérieurement à cette date, dès lors que la curatrice de l'intéressée a expressément donné son accord à une telle poursuite de la procédure ; que la fin de non-recevoir opposée sur ce point par la métropole Nice Côte d'Azur doit ainsi être écartée ;

Sur la légalité de l'arrêté de cessibilité du 10 janvier 2012 :

En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :

3. Considérant que, par arrêté du 13 septembre 2011 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département le 14 septembre 2011, le préfet des Alpes-Maritimes a donné délégation à M. Gérard Gavory, secrétaire général de la préfecture, en vue de signer tous arrêtés, actes, circulaires et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938, des arrêtés portant convocation des collèges électoraux et des déclinatoires de compétence et arrêtés de conflit ; que dès lors, le moyen invoqué pour la première fois en appel par Mme H..., tiré de l'incompétence de M. B... pour signer l'arrêté de cessibilité du 10 janvier 2012 doit être écarté comme manquant en fait ;

En ce qui concerne l'identification des propriétaires des immeubles à exproprier :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-19 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'expropriant adresse au préfet, pour être soumis à enquête dans chacune des communes où sont situés les immeubles à exproprier : ... 2° La liste des propriétaires établie à l'aide d'extraits des documents cadastraux délivrés par le service du cadastre ou à l'aide des renseignements délivrés par le service de la publicité foncière au vu du fichier immobilier ou par tous autres moyens ". qu'aux termes de l'article R. 11-28 du même code : " Sur le vu du procès-verbal et des documents y annexés, le préfet, par arrêté, déclare cessibles les propriétés ou parties de propriétés dont la cession est nécessaire. Ces propriétés sont désignées conformément aux dispositions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et l'identité des propriétaires est précisée conformément aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 5 de ce décret ou de l'alinéa 1er de l'article 6 du même décret (...). " ;

5. Considérant que, si Mme H... soutient que la liste de propriétaires fournie par la métropole Nice Côte d'Azur, autorité expropriante, en application des dispositions précitées de l'article R. 11-19 était incomplète et erronée, elle n'assortit pas davantage ce moyen de précision en appel que devant les premiers juges, qui ont pu l'écarter pour ce motif sans commettre d'erreur de droit sur la charge de la preuve ; qu'il ne ressort ni des écritures de la requérante, ni des autres pièces du dossier que les conditions d'identification des propriétaires concernés ou de notification de l'enquête parcellaire à ces derniers aurait été entachées de carences ou auraient empêché certains des intéressés de faire valoir leurs droits ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'enquête parcellaire :

6. Considérant que la circonstance que la métropole Nice Côte d'Azur ait entendu procéder, dans le courant de l'année 2015, à une modification provisoire du tracé de la voie tel que retenu dans les documents annexés à l'arrêté de cessibilité du 10 janvier 2012, en concluant à cette fin des conventions temporaires d'occupation d'autres propriétés foncières, afin de permettre la réalisation du projet dans des délais rapprochés en dépit du maintien dans les lieux de certains occupants dont la requérante elle-même plusieurs mois après leur expropriation, ne saurait en toute hypothèse entacher d'aucune irrégularité la procédure préalable à l'édiction de l'arrêté de cessibilité en litige ; que le moyen soulevé en appel par Mme H... et tiré de l'illégalité de l'arrêté à défaut de réalisation par l'autorité expropriante d'une autre enquête parcellaire intégrant les nouvelles emprises foncières concernées, ne peut dès lors qu'être écarté comme inopérant ;

En ce qui concerne la violation de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme :

7. Considérant que Mme H... a invoqué devant les premiers juges le moyen tiré de la méconnaissance par l'arrêté de cessibilité des dispositions de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme limitant la possibilité de création de nouvelles routes de transit à proximité du rivage de la mer ; que, toutefois, ce moyen doit être écarté comme inopérant en tant qu'il est dirigé directement contre la décision préfectorale déclarant cessibles les terrains en vue de la réalisation du projet de voie structurante, décision qui n'a ni pour objet ni pour effet de décider l'implantation du tracé de cette dernière ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2011 :

S'agissant de la composition du dossier soumis à enquête publique :

8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 6° du I de l'article R. 123-6 du code de l'environnement applicable en l'espèce, le dossier soumis à l'enquête publique doit comprendre : " Lorsque le maître de l'ouvrage est une personne publique, l'appréciation sommaire des dépenses, y compris le coût des acquisitions immobilières " ; que le dossier doit mettre le public en mesure de connaître le coût réel de l'opération tel qu'il peut être raisonnablement apprécié à la date de l'enquête ;

9. Considérant que l'appréciation des dépenses figurant au dossier soumis à l'enquête publique a été évaluée pour la phase n° 1 entre la digue des Français et Saint-Isidore, faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique, à la somme de 58 680 000 euros, incluant le coût des acquisitions foncières pour un montant de 28 080 000 euros ; que le dossier précisait également l'estimation sommaire des acquisitions et travaux qui seraient nécessaires à la réalisation différée des phases 2 et 3 de la voie structurante entre Saint-Isidore et les Combes ; que Mme H... ne démontre pas que l'estimation sommaire des dépenses figurant au dossier d'enquête aurait été insuffisante, au regard des exigences posées par les dispositions précitées, faute de comporter également l'évaluation des dépenses prévisibles liées au projet d'extension éventuelle de la ligne n° 3 du tramway empruntant le tracé de la nouvelle voie ; qu'en effet, si le projet inclut la possibilité d'utiliser la partie centrale de la voie de grande largeur pour la circulation d'une ligne de transport en commun en site propre, et y envisage la mise en place d'un bus à haut niveau de service, il ne comporte pas, par lui-même, de décision relative au prolongement du réseau de tramway de Nice et aux aménagements qui lui seraient liés ; que ces aspects ne constituant pas un élément du projet d'infrastructure routière déclaré d'utilité publique, n'avaient dès lors pas à être pris en compte par l'autorité expropriante dans la description du coût de celui-ci ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que le dossier soumis à enquête comportait l'évaluation socio-économique prévue par le 7° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique en cas de réalisation d'infrastructures de transport ; qu'il n'est pas établi que cette évaluation de trente-six pages qui étudie les différents aspects positifs et négatifs du projet, et inclut notamment l'évaluation des aménagements liés aux modes doux de transports et au développement des transports en commun, présenterait un caractère insuffisant par rapport aux enjeux présentés par l'opération, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges ;

11. Considérant, en troisième lieu, que l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête comporte les informations requises par les dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement en vigueur à la date de l'enquête publique ; qu'elle analyse le coût de l'opération et les nuisances que celle-ci est susceptible d'entraîner en matière environnementale, et examine notamment les enjeux du projet en matière de pollution atmosphérique, de bruit, de biodiversité, de préservation des eaux souterraines et de traitement des eaux pluviales, ainsi que l'a relevé au demeurant l'autorité environnementale dans son avis sur le projet du 7 avril 2011 ; que s'agissant d'un projet faisant l'objet d'une réalisation échelonnée au sens de ces dispositions, elle comporte effectivement un examen d'ensemble incluant les phases 2 et 3 de la voie structurante devant prolonger la phase 1 en amont de Saint-Isidore ; qu'il ne saurait utilement être fait grief à l'étude d'impact, qui mentionne au demeurant, outre le développement des transports en commun en site propre sur une partie dédiée de la voie, l'éventualité de son utilisation à l'avenir par une extension de la ligne de tramway, de ne pas comporter d'analyse propre à ce projet distinct ne faisant pas l'objet de la déclaration d'utilité publique litigieuse ainsi qu'il a été dit au point 9 ci-dessus ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que si le projet d'infrastructure routière doit desservir les aménagements actuels ou futurs inclus dans le périmètre de l'opération d'intérêt national de la plaine du Var, créée par décret du 7 mars 2008 à l'article R. 121-4-1 k) du code de l'urbanisme, dont l'aménagement a été confié à l'établissement public administratif Eco Vallée, il ressort des pièces du dossier que tant la notice explicative que l'étude d'impact en pages 57 à 60 font état des éléments essentiels de ce programme d'aménagement et de leur maîtrise d'ouvrage ; que la requérante, qui ne relève au demeurant aucune contradiction entre les objectifs poursuivis par l'opération d'intérêt national Eco Vallée et les caractéristiques prévues de la nouvelle voie urbaine de desserte de la plaine du Var, n'est dès lors pas fondée à soutenir que le dossier d'enquête et l'étude d'impact ne comporteraient pas d'analyse suffisante des grands projets d'aménagement envisagés dans le cadre de l'opération d'intérêt national ;

13. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le fait que l'autorité expropriante ait examiné plusieurs partis avant de justifier de manière argumentée dans le dossier soumis à l'enquête publique le choix du scénario n° 1 pour la réalisation du projet de voie structurante constituerait une présentation exclusivement fictive ainsi que le soutient la requérante ;

14. Considérant qu'il suit de là que les différents moyens tirés de ce que l'étude d'impact et les autres documents du dossier soumis à enquête seraient entachés d'insuffisance sur les points précités doivent être écartés ;

S'agissant des consultations obligatoires :

15. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 9 ci-dessus, le projet déclaré d'utilité publique ne portait pas par lui-même sur l'implantation d'une nouvelle ligne de tramway ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure serait viciée par le défaut de saisine préalable des organes consultatifs compétents pour se prononcer sur un tel projet de transport en commun est inopérant ;

16. Considérant, par ailleurs, que la requérante n'établit ni même n'allègue, en se bornant à relever que le projet en litige devait être soumis à la commission nationale du débat public en application des dispositions des articles R. 121-1 et suivants du code de l'environnement, que l'infrastructure routière en litige entrait par son coût ou par la longueur de la voie dans le champ des projets de création ou d'élargissement d'une route à deux fois deux voies imposant une saisine pour avis de cette commission en vertu des articles R. 121-1 b) et R. 121-2 du code de l'environnement, pris pour l'application de l'article L. 121-8 I du même code, lesquels fixent à cet effet des seuils de 300 000 000 euros et 40 kilomètres de voie ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas clairement soutenu que le projet déclaré d'utilité publique relevait des cas de saisine facultative de la commission nationale du débat public par le maître d'ouvrage et d'accomplissement des mesures de publicité prévues par le II de l'article L. 121-8 II du code de l'environnement ; que, par suite, le moyen tiré du vice de procédure entachant la déclaration d'utilité publique à défaut d'avis de la commission nationale du débat public ne peut qu'être écarté ;

17. Considérant, enfin, que Mme H... ne saurait valablement reprocher à l'autorité expropriante de ne pas avoir consulté le comité permanent de concertation de l'établissement public d'aménagement de l'opération d'intérêt national de la Plaine du Var Eco Vallée, alors qu'il ressort des écritures non contestées de la métropole Nice Côte d'azur que ce comité permanent n'a d'existence juridique que depuis le 8 juillet 2013 ; que la requérante ne peut pas non plus invoquer utilement à l'appui de sa critique de la procédure préalable à l'édiction de la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2011, la circonstance, au demeurant non établie, que la concertation qui s'est déroulée en 2007 quant à l'aménagement de la plaine du Var et aux grands travaux d'infrastructure devant y être projetés, à l'occasion de la création de l'opération d'intérêt national, serait trop ancienne pour avoir permis une expression pertinente sur le sujet ; que les moyens susmentionnés doivent, dès lors, être également écartés ;

S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme :

18. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme : " La réalisation de nouvelles routes est organisée par les dispositions du présent article. Les nouvelles routes de transit sont localisées à une distance minimale de 2.000 mètres du rivage. La création de nouvelles routes sur les plages, cordons lagunaires, dunes ou en corniche est interdite. Les nouvelles routes de desserte locale ne peuvent être établies sur le rivage, ni le longer. Toutefois, les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas ne s'appliquent pas en cas de contraintes liées à la configuration des lieux ou, le cas échéant, à l'insularité. La commission départementale des sites est alors consultée sur l'impact de l'implantation de ces nouvelles routes sur la nature (...). " ;

19. Considérant qu'à supposer même que le projet de voie en litige constitue la création d'une route de transit au sens des dispositions précitées, alors que l'administration soutient sans être contredite qu'elle a une vocation de desserte locale et non de transit pour l'application de ce texte, et constitue au surplus dans sa partie sud le simple élargissement et réaménagement du boulevard Slama existant, le moyen tiré de la violation de l'article L. 146-7 ne peut qu'être écarté en tout état de cause, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des documents graphiques joints à la notice explicative, que l'extrémité sud de la voie projetée à partir du site dit de la digue des Français le plus proche du rivage de la mer serait située à moins de deux kilomètres de celui-ci ;

Sur l'utilité publique du projet :

20. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

21. Considérant que le projet de phase 1 de la voie structurante nord/sud de la plaine du Var doit permettre la réalisation du premier tronçon d'une voie urbaine intégrant un transport en commun en site propre et des modes doux de circulation par aménagement de larges trottoirs et de pistes cyclables sécurisées, ainsi que des emplacements de stationnement ; que les premiers juges ont estimé à juste titre que ce projet, qui améliore la desserte de quartiers dont l'urbanisation se développe et des équipements actuels et futurs de la plaine du Var, et répond aux besoins de déplacement de la population locale en cohérence avec les orientations des documents d'urbanisme locaux applicables à ce secteur, présente un caractère d'intérêt général ; que les motifs retenus par le tribunal administratif à cet égard ne sont pas valablement contestés en appel par la requérante, qui ne saurait remettre en cause l'intérêt public du projet du seul fait que la modélisation théorique utilisée en matière de création d'infrastructures routières, intégrée dans l'évaluation socio-économique, indique un " taux de rentabilité interne " négatif ; que l'allégation de Mme H... selon laquelle la réalisation de la voie permettant le développement du transport en commun et facilitant la desserte du secteur stratégique de la plaine du Var ainsi que de l'aéroport international de Nice, ne présenterait aucun avantage pour les usagers ni pour les collectivités publiques concernées est infirmée par les pièces du dossier ; que la requérante ne saurait davantage soutenir que le projet, eu égard aux caractéristiques susmentionnées, aurait pour but essentiel de favoriser des intérêts privés, en se bornant à relever la circonstance, à la supposer même établie, que la métropole Nice Côte d'Azur ait cédé à une société de promotion immobilière un terrain nu bordant l'emprise de la voie ;

22. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est au demeurant pas soutenu que la communauté urbaine Nice Côte d'Azur aux droits de laquelle est venue la métropole Nice Côte d'Azur était en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation en l'espèce ; que, s'agissant de l'atteinte portée à la propriété privée, il ressort des pièces du dossier que l'expropriation envisagée porte sur une partie de six exploitations agricoles dont il n'est pas sérieusement contesté qu'aucune ne doit voir sa viabilité atteinte de ce fait ; qu'il ne résulte pas des éléments soumis à la Cour qu'une telle expropriation limitée de terres agricoles méconnaîtrait les objectifs de la directive territoriale d'aménagement du 2 décembre 2003 relatifs au secteur de la plaine du Var ; que l'atteinte portée aux propriétés privées, qui concerne cinquante-sept propriétaires ou copropriétaires dont certains, nombreux, n'habitent pas sur les lieux, et inclut plusieurs parcelles appartenant à la commune de Nice ou à l'établissement public Côte d'Azur Habitat, ne paraît pas excessive au regard des avantages susmentionnés résultant de la réalisation du projet ; qu'aucune atteinte environnementale de nature à faire perdre à l'opération son caractère d'utilité publique n'est établie ni même sérieusement alléguée, alors notamment qu'un couloir vert doit être implanté par le biais du réaménagement du canal des arrosants le long de la voie, et qu'il résulte des pièces du dossier et notamment de l'avis de l'autorité environnementale que les enjeux de préservation de la faune et de la flore sont faibles dès lors que les espaces directement concernés par le projet étaient déjà très anthropisés ; que si la requérante invoque le possible impact du projet sur des zones d'intérêt floristique ou faunistique situées à distance de l'emprise de la future voie, ainsi que le risque d'atteinte aux nappes phréatiques du secteur, cette argumentation est dépourvue de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors que l'étude d'impact qui détaille les effets de la réalisation de la voie sur ces différents aspects n'est pas contestée dans son contenu ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le coût du projet serait excessif pour l'autorité expropriante ; qu'ainsi les atteintes à la propriété privée, le coût financier et les éventuels inconvénients d'ordre social, environnemental ou économique du projet ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'il présente ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'opération n'aurait pas un caractère d'utilité publique doit être écarté ;

23. Considérant qu'il suit de là que l'ensemble des moyens tirés, par voie d'exception, de l'illégalité de la déclaration d'utilité publique au vu de laquelle a été édicté l'arrêté de cessibilité en litige, doivent être écartés ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de cessibilité du préfet des Alpes-Maritimes en date du 10 janvier 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à Mme H... tout ou partie de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme H... une somme de 2 000 euros à verser à la métropole Nice Côte d'Azur en application des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme H... est rejetée.

Article 2 : Mme H... versera une somme de 2 000 (deux mille) euros à la métropole Nice Côte d'Azur en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...H..., au ministre de l'intérieur et à la métropole Nice Côte d'Azur.

Copie en sera adressée à Mme C...E..., au préfet des Alpes-Maritimes et à la commune de Nice.

Délibéré après l'audience du 1er février 2016, où siégeaient :

- M. Pocheron, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Hameline, premier conseiller,

- Mme Marchessaux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2016.

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N° 14MA01621


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01621
Date de la décision : 22/02/2016
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure HAMELINE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : RICCI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-22;14ma01621 ?
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