Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de leur accorder la réduction et le remboursement correspondant de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.
Par un jugement n° 1304152 en date du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, M. et Mme A..., représentés par Me B... et Rabatel, de la société d'avocats Ydes, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2015 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de prononcer la décharge de l'excédent d'impôt sur le revenu payé au titre de l'année 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- s'ils ont soumis les revenus perçus à l'occasion du rachat partiel d'assurances vie au taux progressif, c'est par erreur, en raison de besoins urgents en liquidités d'une société dans laquelle M. A... avait une participation significative ; ils n'ont pas été conseillés par leur compagnie d'assurances contre laquelle ils ont d'ailleurs engagé une action judiciaire ; leur demande visant à bénéficier ensuite du prélèvement libératoire s'est inscrite dans le délai de réclamation prévu à l'article L. 190 du livre des procédures fiscales ;
- les dispositions de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts sont illégales en ce qu'elles ont restreint les possibilités prévues par le législateur ;
- les dispositions de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts portent atteinte au principe de sécurité juridique et plus précisément au principe de clarté, d'intelligibilité et de prévisibilité de la loi, résultant de l'article 34 de la Constitution, des articles 4, 5, 14, et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de M. et Mme A....
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Vu :
- le courrier adressé le 12 novembre 2015 aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant le date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 ;
- l'ordonnance de clôture immédiate datée du 17 décembre 2015 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution du 4 octobre 1958 ;
- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- le traité instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Paix,
- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.
1. Considérant que M. et Mme A... ont procédé au cours de l'année 2011 à des rachats de contrats d'assurance vie qu'ils détenaient depuis plus de huit ans ; qu'en l'absence d'option de leur part pour le prélèvement libératoire, le produit de ces opérations a été pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu selon le barème de droit commun ; que, par réclamation du 23 avril 2013, M. et Mme A... ont sollicité le bénéfice du prélèvement libératoire prévu à l'article 125 A du code général des impôts ; que les contribuables ont toutefois obtenu le bénéfice du régime du quotient prévu à l'article 125 A du code général des impôts pour les revenus exceptionnels, le surplus de leur demande étant rejeté ; qu'ils interjettent appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 mars 2015 qui a rejeté leur demande de réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ;
Sur les conclusions à fin de réduction :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 125-0 A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " I. Les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation ainsi qu'aux placements de même nature souscrits auprès d'entreprises d'assurance établies en France sont, lors du dénouement du contrat, soumis à l'impôt sur le revenu (...) / Les produits en cause sont constitués par la différence entre les sommes remboursées au bénéficiaire et le montant des primes versées. / (...) II. Les dispositions de l'article 125 A, à l'exception des III à IV de cet article, sont applicables aux produits prévus au I. Le taux du prélèvement est fixé : / 1° Lorsque le bénéficiaire des produits révèle son identité et son domicile fiscal dans les conditions prévues au 4° du III bis de l'article 125 A : / (...) d. A 7, 5 % lorsque cette durée a été égale ou supérieure à six ans pour les bons ou contrats souscrits entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1989 et à huit ans pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 1990 (...) " ; qu'aux termes de l'article 125 A du même code : " I. (...) les personnes physiques qui bénéficient d'intérêts, arrérages et produits de toute nature de fonds d'Etat, obligations, titres participatifs, bons et autres titres de créances, dépôts, cautionnements et comptes courants, peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu, lorsque la personne qui assure le paiement de ces revenus est établie en France, qu'il s'agisse ou non du débiteur (...) / La retenue à la source éventuellement opérée sur les revenus dont le débiteur est établi en France est imputée sur le prélèvement. / Celui-ci est effectué par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus (...) / VI. Les modalités et conditions d'application du présent article sont fixées par décret " et qu'aux termes de l'article 41 duodecies E de l'annexe III audit code : " Dans les cas autres que ceux prévus aux articles 41 duodecies C et 41 duodecies D le prélèvement ne doit être opéré par l'établissement payeur que si le bénéficiaire des revenus opte pour son assujettissement à ce prélèvement, dans les conditions définies au I et IV de l'article 125 A du code général des impôts. / L'option, qui est irrévocable, est exercée au plus tard lors de l'encaissement des revenus " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions précitées, une faculté d'option est ouverte aux contribuables personnes physiques qui, pour l'imposition des revenus qu'elles visent, peuvent choisir de les intégrer dans leur revenu global annuel soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème progressif ou de les assujettir à un prélèvement forfaitaire libératoire de l'impôt sur le revenu ; que ce prélèvement est opéré à la source par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus, de sorte qu'il ne peut résulter que d'un choix exprimé par le bénéficiaire des produits au plus tard au moment de ce paiement ; que celui-ci ne peut exercer cette option ultérieurement, après l'encaissement des produits, pas plus qu'il ne saurait revenir sur son exercice éventuel, le caractère irrévocable de ces choix se justifiant par la nature de prélèvement à la source du prélèvement forfaitaire libératoire, laquelle implique que le contribuable se soit déterminé à la date d'encaissement des revenus, ainsi que par l'absence, dans le texte de la loi, de l'organisation d'une éventuelle restitution d'impôt dans le cas où le choix d'exercer l'option ou d'y renoncer serait postérieur au paiement des revenus des capitaux mobiliers ; que M. et Mme A..., qui n'ont pas exercé l'option pour le prélèvement libératoire prévue à l'article 125 A du code général des impôts à la date de versement des produits d'assurance vie, ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que cette option pourrait être exercée à tout moment dans la limite du délai général de réclamation ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que le caractère irrévocable de l'option prévue par le second alinéa de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts résulte du texte législatif lui-même, lequel n'institue pas, au profit des contribuables un droit ou un avantage fiscal qui, sans qu'un texte réglementaire puisse y faire obstacle alors que le législateur ne l'aurait pas prévu, pourrait faire l'objet d'une demande ou d'une régularisation, par voie de réclamation, après l'expiration du délai fixé pour en solliciter le bénéfice, mais offre seulement une possibilité de choix entre des modalités d'imposition différentes pour certains revenus de placement ; qu'il s'ensuit que les requérants ne sauraient davantage se prévaloir de ce que, en prévoyant que l'option pour le prélèvement libératoire est irrévocable et doit être prise au plus tard lors de l'encaissement des produits, les dispositions règlementaires codifiées à l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts auraient, de manière illégale, restreint l'exercice d'un droit ouvert par le législateur ;
5. Considérant, en troisième lieu, que sont en tout état de cause sans incidence sur le présent litige les circonstances que d'autres options fiscales peuvent être exercées dans la limite du délai de réclamation et que les retraits de fonds litigieux ont été rendus nécessaires en raison des contraintes financières liées au développement d'un projet professionnel de M. A... ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que M. et Mme A... soutiennent que l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts serait inconstitutionnel et méconnaîtrait les stipulations du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant, d'une part, que le législateur ayant posé le principe d'une option pour l'imposition des produits d'assurance vie, la conformité d'une telle option, dans son principe, à l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 à laquelle renvoie le Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 ainsi qu'au principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt, ne saurait être contestée devant le juge administratif en dehors de la procédure prévue à l'article 61-1 de la Constitution, laquelle n'a pas été suivie par les requérants ; qu'en revanche, il appartient au juge administratif de vérifier si les mesures réglementaires prises pour l'application de la loi n'ont pas, elles-mêmes, méconnu ces exigences ; que, toutefois, les dispositions réglementaires que le requérant peut utilement critiquer se bornent à rappeler le principe, posé par la loi, de la nécessité d'une option pour bénéficier du prélèvement libératoire et à préciser que cette option doit être exercée au plus tard lors de l'encaissement des revenus ; que cette dernière modalité, applicable à tous les contribuables, ne peut être regardée comme ayant méconnu les dispositions et principes à valeur constitutionnelle invoqués par le requérant ;
8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ; que le moyen par lequel les requérants soutiennent que les dispositions de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts méconnaîtraient ces stipulations n'est pas assorti de précisions et ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant, par suite, que les moyens tirés par M. et Mme A...de l'inconstitutionnalité et de l'inconventionnalité de l'article 41 duodecies E de l'annexe III au code général des impôts doivent être rejetés ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ; que l'ensemble de leurs conclusions y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit donc être rejeté ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... A...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
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N°15MA01928