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11/02/2016 | FRANCE | N°14MA02417

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 11 février 2016, 14MA02417


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1205258 du 25 mars 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juin 2014 et un mémoire enregistré le 26 novembre 2015, M. B..., représenté par la SCP Braunstein et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 mars 2014 ;

2°) d'accorder la déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1205258 du 25 mars 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juin 2014 et un mémoire enregistré le 26 novembre 2015, M. B..., représenté par la SCP Braunstein et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 mars 2014 ;

2°) d'accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'indemnité de départ à la retraite que lui a versée la SA B...n'est pas imposable, en vertu du 4° du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dès lors qu'elle fait suite à sa mise à la retraite par son employeur, justifiée par les pièces versées à l'instance ;

- à titre subsidiaire, l'indemnité de départ à la retraite peut être regardée comme une indemnité versée aux mandataires sociaux à l'occasion de la cessation forcée de leurs fonctions, ainsi que le démontrent les pièces versées à l'instance.

Par des mémoires en défense enregistrés le 16 octobre 2014 et le 16 décembre 2015, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'aucun des moyens de celle-ci n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,

- et les observations de Me A... de la SCP Braunstein et associés, pour M. B....

1. Considérant que la SAB..., constituée le 14 novembre 1957, est une entreprise familiale spécialisée dans le commerce de détail d'articles de bijouterie et d'horlogerie ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur l'ensemble de ses déclarations fiscales de la période du 1er mars 2006 au 28 février 2009 ; que l'examen de la comptabilité de la société a montré que M. C... B..., ancien dirigeant et associé de la société, avait perçu la somme de 198 200 euros enregistrée au crédit de son compte courant ouvert dans la société sous le libellé " indemnité exceptionnelle " le 28 février 2009 ; que, parallèlement à ladite procédure de contrôle, l'administration fiscale a procédé au contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. B... à l'issue duquel elle a relevé que ce dernier n'avait pas déclaré l'indemnité de départ à la retraite que cette société lui avait versée le 28 février 2009 pour un montant de 198 200 euros ; que l'administration fiscale a estimé que cette indemnité devait être soumise, conformément aux dispositions du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts, à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires ; qu'elle a notifié à M. B... par proposition de rectification en date du 9 juin 2011 selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rehaussements assortis de l'intérêt de retard et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que le requérant interjette appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 mars 2014 rejetant sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2009 ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1. de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve de l'exonération prévue au 22° de l'article 81 et des dispositions suivantes. / Ne constituent pas une rémunération imposable : / (...)4° La fraction des indemnités de mise à la retraite qui n'excède pas : / a) Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de cinq fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement des indemnités ; / b) Soit le montant de l'indemnité de mise à la retraite prévue par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi (...)" ;

3. Considérant, d'autre part, que le 2. de ce même article, dans sa rédaction alors applicable, dispose : " Constitue également une rémunération imposable toute indemnité versée, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions, aux mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter. Toutefois, en cas de cessation forcée des fonctions, notamment de révocation, seule la fraction des indemnités qui excède les montants définis aux 3 et 4 du 1 est imposable " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les champs d'application respectifs du 1. et du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts sont définis non seulement par la qualité de la personne bénéficiaire de l'indemnité mais aussi par l'objet de l'indemnité ; qu'ainsi, la seule qualité de mandataire social, dirigeant ou personne visée à l'article 80 ter ne fait pas nécessairement obstacle à l'application du 1. dudit article dans le cas où un contribuable cumule cette qualité avec celle de salarié et qu'il est établi qu'il a perçu une indemnité à raison de la seule rupture de son contrat de travail ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification en date du 9 juin 2011 que M. B... a perçu une rémunération de la SA B...en sa qualité de président directeur général, soit notamment un salaire de 124 177 euros pour l'année 2009 et à compter du 1er mars 2009, qu'a été substitué à cette rémunération un salaire de directeur-consultant pour lequel le requérant a déclaré 25 191 euros de revenus à ce titre pour l'année 2009 ; qu'il résulte des énonciations de la même proposition de rectification que, par délibération en date du 8 février 2006, le conseil d'administration de la SA B...avait décidé d'allouer à M. B... une indemnité de départ à la retraite de 198 200 euros correspondant pour partie à la provision constituée lors de l'exercice précédent à titre d'indemnité forcée de départ de M. B... et que, dans le procès-verbal de cette même délibération, il était précisé que le président indiquait qu'il " souhaite cesser toute activité au sein de la société au plus tard le 28 février 2009 " ; que l'administration fiscale a estimé qu'aucune cessation forcée ou révocation formelle de la fonction de président du conseil d'administration de M. B... n'avait été mise en oeuvre, que ce dernier avait perçu une indemnité exceptionnelle le 28 février 2009 alors qu'il était président en titre dudit conseil et que M. B... avait continué à occuper cette fonction jusqu'au 13 septembre 2010 ; qu'à compter du 1er mars 2009, M. B... a signé un nouveau contrat de travail avec la SA B...en qualité de directeur consultant dont la rémunération s'est substituée à l'ancienne rémunération de président du conseil d'administration ; que l'administration fiscale a estimé, par suite, que l'indemnité exceptionnelle perçue par M. B..., qui n'avait pas été versée dans le cadre d'une révocation ou d'une cessation forcée des fonctions rémunérées de président du conseil d'administration devait être qualifiée de complément de rémunération et imposée à ce titre à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires en vertu du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts ;

6. Considérant que, pour demander la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu en litige, M. B... soutient que son départ à la retraite, le 28 février 2009, constitue une mise à la retraite sur décision de son employeur, au sens des dispositions précitées du 4° du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts et que l'indemnité correspondante n'est pas imposable dès lors qu'elle répond aux conditions posées par le a) et le b) de ce 4° ; qu'il résulte de l'instruction que M. B... est lié depuis le 1er mai 1969 à la SA B...par un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de salarié, qu'il a occupé à partir du 1er mai 1972 le poste de directeur adjoint et qu'il a cumulé cette fonction salariale avec des fonctions de mandataire social en tant que président directeur général de la société à partir de mars 1994 ; qu'il a perçu de la SA B...en sa qualité de président directeur général une rémunération de 213 217 euros en 2007, 218 276 euros en 2008 et 124 777 euros en 2009 ; que, par décision du 14 janvier 2005, le conseil d'administration de la SA B...a décidé du principe du versement à M. B... d'une indemnité de départ à la retraite d'un montant de 198 200 euros correspondant à un an de salaire ; que, lors du conseil d'administration du 8 février 2006, M. B... a fait valoir, comme il a été dit au point 5, que " compte tenu de son âge et des renseignements pris quant à ses revenus futurs, il souhaite cesser toute activité au sein de la société au plus tard le 28 février 2009 " et que le principe du versement à l'intéressé d'une indemnité de départ à la retraite " à titre d'indemnité forcée de départ à la retraite " a alors été décidé ; que M. B... a perçu le 28 février 2009 l'indemnité de départ à la retraite d'un montant de 198 200 euros calculée selon les modalités prévues aux articles L. 1237-7 et L. 1234-9 du code du travail, à partir du salaire brut de 260 760 euros perçu au titre des douze mois antérieurs ; que, comme il a été dit au point 5, à compter du 1er mars 2009, M. B... a conclu avec la société un contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité de consultant ; qu'au vu des éléments justificatifs versés par le requérant devant la Cour, soit les procès-verbaux du conseil d'administration, les bulletins de salaire délivrés par la SA B...à M. B... de février 2008 à février 2009 mentionnant un salaire mensuel de 4 109,37 euros en février 2008 et 5 753 euros en janvier 2009 pour son emploi de président directeur général ainsi que la lettre de notification en date du 25 novembre 2008 de la mise à la retraite des fonctions salariales à la date du 28 février 2009, l'indemnité dont s'agit doit être regardée comme ayant été versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, dans le cadre d'une mise à la retraite, liant M. B... à la SA B...; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'indemnité dont il s'agit aurait été perçue à l'occasion de la cessation de ses fonctions de dirigeant ; que, dès lors, elle entre dans le champ des dispositions précitées du 1. de l'article 80 duodecies du code général des impôts, alors même que M. B... a été mandataire social de ladite société ; que, par suite, c'est à tort que l'administration fiscale a imposé l'indemnité en cause sur le fondement du 2. de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans le champ duquel cette indemnité n'entre pas ; qu'elle ne propose pas d'autre base légale de nature à la justifier ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le requérant est fondé à demander la décharge de l'imposition supplémentaire en litige ;

7. Considérant que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1205258 du 25 mars 2014 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. B... au titre de l'année 2009 sont réduites du montant de l'indemnité perçue à l'occasion de la rupture de son contrat de travail et réintégrée par l'administration fiscale.

Article 3 : M. B... est déchargé, au titre de l'année 2009, des droits et pénalités correspondant à cette réduction des bases d'imposition.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 (deux mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 février 2016.

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N° 14MA02417 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02417
Date de la décision : 11/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BRAUNSTEIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-11;14ma02417 ?
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