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09/02/2016 | FRANCE | N°14MA05201

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 09 février 2016, 14MA05201


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 août 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1402980 du 5 décembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2014, M.B..., représenté par Me C..., demande à la

Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 décembre 2014 ;

2°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 août 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1402980 du 5 décembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2014, M.B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour portant, soit la mention " salarié " soit " vie privée et familiale ", ou subsidiairement de procéder à un nouvel examen de sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour est entachée d'un vice de procédure en ce que le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 1 et 3 de l'accord franco-marocain ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles de la circulaire INTK1229185C qui a un caractère réglementaire ;

- elle est entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet a considéré de manière erronée que l'obligation de quitter le territoire français est la conséquence automatique du refus de titre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'appelant n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pena.

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 5 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 août 2014 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision querellée du 27 août 2014 comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; qu'elle mentionne notamment les éléments essentiels de la vie privée et familiale de M. B...; que, quand bien même elle comporterait une imprécision quant à sa date d'entrée sur le territoire français, celle-ci, irrégulière, est fondée sur les propres déclarations de l'intéressé qui ne saurait faire valoir qu'elle serait entachée d'une erreur de fait ; que la motivation retenue n'est pas stéréotypée et répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, publié au Journal officiel de la République française du 11 mars 1994 : " Les ressortissants marocains résidant en France et titulaires, à la date d'entrée en vigueur du présent accord, d'un titre de séjour dont la durée de validité est égale ou supérieure à trois ans bénéficient de plein droit, à l'expiration du titre qu'ils détiennent, d'une carte de résident valable dix ans. " ; que M. B...persiste à faire valoir devant la Cour qu'il s'est vu délivrer un premier titre de séjour valable un an en 1981, puis un titre valable trois ans l'année suivante, et enfin, une carte de résident valable dix ans qu'il dit avoir perdue depuis ; que, par suite, n'étant pas en mesure d'établir qu'il possédait à la date d'entrée en vigueur de l'accord franco-marocain, soit le 1er janvier 1994, l'un des titres requis, il ne saurait se prévaloir desdites stipulations ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé : " Les ressortissants marocains désireux d' exercer une activité professionnelle salariée en France pour une durée d'un an minimum reçoivent sur présentation d' un contrat de travail visé par les autorités compétentes un titre de séjour valable un an, renouvelable et portant la mention salarié " ; que si M. B...produit une promesse d'embauche établie le 15 décembre 2013 pour un poste de gardien du site d'une entreprise de location de matériel, il ne disposait, à la date de l'arrêté attaqué, d'aucun contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, dès lors, il ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " salarié " en application des stipulations de l'article 3 susmentionné ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que, pas davantage en appel qu'en première instance, M. B...n'établit une présence continue en France depuis plus de trente-huit ans ; que s'il ressort des pièces du dossier et notamment de son relevé de reconstitution de carrière qu'il a travaillé comme salarié agricole saisonnier entre les années 1976 et 2006, sa présence sur le territoire durant cette période n'est établie que de manière intermittente ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situerait en France, pays dans lequel il ne fait état d'aucun lien familial, son épouse et ses deux enfants demeurant, ...d'après ses propres déclarations, dans son pays d'origine; que, dans ces conditions, M. B...ne justifie d'aucune considération humanitaire ou de motif exceptionnel au sens des dispositions

sus-rappelées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les moyens tirés de la violation de ces dispositions et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant doivent dès lors être écartés, de même que ceux tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que M. B...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

8. Considérant, en sixième et dernier lieu, que l'appelant ne saurait utilement se prévaloir des orientations de la circulaire du 28 novembre 2012 NOR INTK 1229185C du ministre de l'intérieur portant sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par les ressortissants étrangers en situation irrégulière, lesquelles sont dépourvues de toute valeur réglementaire et n'ont aucune portée impérative ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, d'une part, comme cela a été dit au point 2 ci-dessus, la décision par laquelle le préfet du Gard a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B...comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, d'autre part, l'arrêté litigieux mentionne l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision faisant obligation au requérant de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ; qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des objectifs qu'elle poursuit et méconnaîtrait par là-même les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans (...) " ; que l'appelant n'établissant pas par les pièces qu'il produit, ainsi qu'il a été dit, résider en France de manière régulière depuis plus de vingt ans, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait lesdites dispositions ;

12. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Gard se serait cru tenu d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire et aurait ainsi méconnu son pouvoir d'appréciation ; que dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées à la Cour à fin d'injonction doivent également être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016 où siégeaient :

- M. Gonzales, président de chambre,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

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N° 14MA052013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA05201
Date de la décision : 09/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : DEIXONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-09;14ma05201 ?
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