Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SA L'Estelan Résidence du troisième âge a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010.
Par un jugement n° 1206871 du 18 avril 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la SA L'Estelan Résidence du troisième âge.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 juillet 2014 et par un mémoire enregistré le 8 décembre 2015 la SA L'Estelan Résidence du troisième âge, représentée par Me B...puis par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de lui accorder la décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée à concurrence de la somme de 98 912 euros.
Elle soutient que :
- elle ne percevait plus de sommes au titre du forfait de soins au cours de la période vérifiée ; les sommes perçues entre janvier 2008 et janvier 2010 constituent des subventions, versées en application des articles L. 313-1 à L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles et non en application de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale ; elles ne rentrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; ces sommes ne doivent avoir d'incidence ni sur le pourcentage de déduction ni sur le coefficient de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ;
- ces sommes sont destinées à financer l'achat de médicaments et de matériel et à assurer le paiement du personnel soignant exerçant dans l'établissement ; elle doit être en mesure de pouvoir justifier auprès des organismes payeurs des subventions de l'utilisation de ces sommes ; les sommes non affectées aux dépenses doivent être reversées ; il ne s'agit donc pas du paiement de prestations de services.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2014, le ministre des finances et des comptes publics a conclu au rejet de la requête de la SA L'Estelan Résidence du troisième âge. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2006/112/CE du Conseil du 26 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- l'arrêt rendu le 27 mars 2014 par la Cour de justice de l'Union européenne dans l'affaire C-151/13 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Paix,
- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.
1. Considérant que la SA l'Estelan Résidence du troisième âge qui exploite un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, d'où sont issus des rectifications consécutives à la remise en cause du coefficient de déduction de taxe sur la valeur ajoutée, ayant pour conséquence une réintégration partielle de celle-ci ; que la société requérante demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 avril 2014 qui a rejeté sa demande en décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 en conséquence de ces rectifications ;
2. Considérant qu'en vertu du 1° ter du 4 de l'article 261 du code général des impôts, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée les soins dispensés par les établissements privés d'hébergement pour personnes âgées mentionnés au 6° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, pris en charge par un forfait annuel global de soins en application de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale ; que le I de l'article 271 du même code prévoit que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération, que l'article 273 du même code renvoie à des décrets en Conseil d'Etat la détermination des conditions d'application de l'article 271 et, notamment, des modalités suivant lesquelles la déduction de la taxe ayant grevé les biens ou services qui ne sont pas utilisés exclusivement pour la réalisation d'opérations imposables doit être limitée ou réduite ; qu'aux termes de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er janvier 2008 : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction " ; qu'aux termes du I de l'article 206 de la même annexe, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er janvier 2008 : " Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission (...) " et qu'aux termes du III du même article : " (...) 3. Lorsque le bien ou le service est utilisé concurremment pour la réalisation d'opérations imposables ouvrant droit à déduction et d'opérations imposables n'ouvrant pas droit à déduction, le coefficient de taxation est calculé selon les modalités suivantes : 1° Ce coefficient est égal au rapport entre : a. Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires afférent aux opérations ouvrant droit à déduction, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b. Et, au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires afférent aux opérations imposables, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations (...) ; 2° Lorsqu'un assujetti a constitué des secteurs distincts d'activité en application de l'article 209, le chiffre d'affaires à retenir pour le calcul du rapport mentionné au 1° est celui du ou des secteurs pour lesquels le bien ou le service est utilisé (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point 2 que, pour la détermination de la fraction déductible de la taxe sur la valeur ajoutée par les redevables qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, doivent figurer au dénominateur du coefficient de déduction les subventions directement liées au prix d'opérations exonérées de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ont ce caractère de subventions directement liées au prix, les subventions qui constituent la contrepartie totale ou partielle d'une opération de livraison de biens ou de prestation de services qui sont versées par un tiers ou au prestataire ;
4. Considérant qu'en vertu de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale, les dépenses afférentes aux soins médicaux dispensés dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sont supportées par les régimes d'assurance maladie ou au titre de l'aide sociale, éventuellement suivant des formules forfaitaires ; qu'en vertu de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ayant conclu une convention avec le président du conseil général et l'autorité compétente de l'Etat perçoit un forfait annuel global de soins qui tient compte de la capacité de l'établissement, du degré de dépendance moyen des résidents, ainsi que d'un tarif afférent aux soins recouvrant le coût des prestations de soins effectuées à titre onéreux par les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes au profit de leurs résidents ; qu'ainsi que l'a jugé la Cour de Justice de L'Union européenne, dans son arrêt rendu le 27 mars 2014 dans l'affaire C-151/13, SARL Le Rayon d'or, le forfait annuel global de soins constitue la contrepartie de prestations de soins effectuées à titre onéreux par les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, au profit de leurs résidents ; qu'il a ainsi le caractère d'une subvention directement liée au prix des prestations de soins exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée rendues par un tel établissement ; que, par suite, ce forfait doit figurer au dénominateur pour le calcul du coefficient de taxation des biens et services utilisés concurremment pour des prestations d'hébergement et de restauration, des prestations liées à la dépendance, et des prestations de soins ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'au cours de la période d'imposition en litige, la SA l'Estelan Résidence du troisième âge a fourni aux résidents de son établissement des prestations de soins exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée par application du 1° ter du 4. de l'article 264 du code général des impôts précité, des prestations d'hébergement et de restauration soumises au taux réduit de 5,5 % par application du a. de l'article 279 du même code et des prestations liées à la dépendance relevant du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration a remis en cause le caractère entièrement déductible de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix de certains biens et services et certaines immobilisations, qu'elle a estimé utilisés pour la réalisation de ces trois types de prestations, et a appliqué le coefficient de déduction prévu à l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 que les sommes perçues par la SA l'Estelan Résidence du troisième âge au titre de la dotation globale de soins doivent être considérées comme des subventions directement liées au prix des prestations de soins exonérées de taxe sur la valeur ajoutée, et doivent donc être comprises pour la détermination au dénominateur du coefficient de déduction prévu par l'article 206 de l'annexe II pour la période postérieure au 1er janvier 2008 ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que si la société requérante soutient que certaines dépenses, celles liées à la restauration, à l'hébergement, les dépenses liées à l'administration, et celles affectées aux achats de changes seraient exclusivement affectées à la réalisation d'opérations taxables, sans liens avec les prestations de soins, et que donc elles ne devraient faire l'objet d'aucune restriction du droit à déduction, elle n'établit en tout état de cause pas avoir constitué un secteur distinct d'activité au sens des articles 205 et 209 de l'annexe II au code général des impôts, pour l'application de ses droits à déduction, pas davantage qu'elle ne justifie les montants de ces dépenses distinctes de biens et services ;
7. Considérant, en troisième lieu, que, loin de contredire le principe de neutralité fiscale de la taxe sur la valeur ajoutée, la limitation de la déductibilité de la taxe d'amont grevant des biens et services à la seule mesure où ceux-ci servent à la réalisation d'opérations taxées garantit ce principe ; que ce mode partiel et forfaitaire de déduction, prévu par les textes internes, que ce soit pour la période antérieure ou postérieure au 1er janvier 2008, ne contredit pas, en lui-même, les objectifs de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA l'Estelan Résidence du troisième âge n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA l'Estelan Résidence du troisième âge est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA l'Estelan Résidence du troisième âge et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 janvier 2016.
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N°14MA03009