La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2015 | FRANCE | N°13MA04915

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 17 décembre 2015, 13MA04915


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge, d'une part, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée assorti des pénalités correspondantes qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007.

Par un jugement n° 1100764, 1104471 du 15 octobre 2013, le tribunal

administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge, d'une part, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée assorti des pénalités correspondantes qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007.

Par un jugement n° 1100764, 1104471 du 15 octobre 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2013, et des mémoires complémentaires enregistrés le 6 juin 2014 et le 7 août 2015, M. B...représenté par la SELARL FEAT, agissant par Me C...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2013 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la procédure d'imposition :

- l'administration a mis en oeuvre, de manière implicite, la procédure de répression des abus de droit ce qui emporte l'irrégularité de la procédure d'imposition ;

- avant de procéder à une reconstitution théorique du chiffre d'affaires, l'administration devait démontrer l'absence de valeur probante et sincère de la comptabilité qui lui était présentée.

Sur le bien-fondé des impositions :

- à titre principal, la doctrine impose une déduction des avoirs au titre de l'année au cours de laquelle les chèques ont été émis et non au titre de l'année de leur encaissement ;

- les avoirs ont été causés par la comptabilité de son mandant ;

- à titre subsidiaire, et si l'administration entend s'appuyer sur l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il convient d'admettre en déductions, au titre du bénéfice non commercial de l'année 2006, la somme de 20 000 euros hors taxe et au titre du bénéfice non commercial de l'année 2007, la somme de 94 000 euros hors taxe ;

- sur les pénalités, il apparaît qu'il a trop versé, en tant qu'agent commercial, de taxe sur la valeur ajoutée et qu'il aurait un crédit de plus de 10 000 euros sur le Trésor ; le manquement délibéré suppose une volonté subjective d'éluder l'impôt qui fait défaut en l'espèce.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 avril 2014, 23 octobre 2014 et 26 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'administration n'a pas écarté le contrat de commissionnement mais a constaté que les notes d'avoirs n'étaient pas justifiées ; que le service pouvait ainsi, sans mettre en oeuvre la procédure visée à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, tirer les conséquences d'une situation de fait portée à sa connaissance par le contribuable lui-même et procéder aux rectifications selon la procédure contradictoire ;

- le rapprochement entre le chiffre d'affaires comptabilisé et le montant des encaissements figurant dans les comptes bancaires professionnels, s'il donne lieu à rectification en cas d'omission de recettes, ne s'analyse pas pour autant comme une reconstitution du chiffre d'affaires ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- le service a remis en cause les avoirs déduits des recettes professionnelles pour le seul motif qu'ils n'étaient pas justifiés ; que, dès lors, leurs dates d'encaissement sont sans incidence ;

- en effet, les notes d'avoirs en litige ne peuvent être rattachées à une opération déterminée ; la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne s'est pas prononcée sur la qualification des sommes litigieuses ;

- sur les pénalités, la majoration qui a été appliquée fait l'objet d'une motivation expresse dans la proposition de rectification et dans la réponse aux observations du contribuable ; le service s'en est tenu aux déclarations écrites et verbales du requérant et n'a pas fait référence à des trop-perçus sur la période antérieure à celle en litige ;

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Markarian,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...exerce à titre individuel une activité d'agent commercial et perçoit des commissions imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de son activité portant sur la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, l'administration fiscale a réintégré, dans les bases imposables, le montant " d'avoirs " déduits des commissions perçues et lui a notifié des rectifications en matière d'impôt sur le revenu et en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ces impositions supplémentaires ayant été assorties de la majoration de 40 % pour manquement délibéré visée à l'article 1729 du code général des impôts ; que M. B...a, par deux requêtes, sollicité du tribunal administratif de Marseille la décharge de ces impositions ; qu'il relève appel du jugement du 15 octobre 2013 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, applicable aux propositions de rectification notifiées à compter du 1er janvier 2009 : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. (...) " ;

3. Considérant que, pour soutenir que la procédure d'imposition dont il avait fait l'objet était irrégulière, M. B...fait valoir que l'administration fiscale a implicitement mais nécessairement mis en oeuvre, à son encontre, la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, sans lui offrir la possibilité de saisir le comité consultatif mentionné à cet article ;

4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification adressée à M. B...le 31 juillet 2009 et de la réponse aux observations du contribuable du 6 octobre 2009, que le service a constaté que le contrat liant le requérant à la SARL Dine O Quick stipulait que le montant des commissions d'agent commercial libéral devant lui être versé était constitué d'un pourcentage de 30 % sur les ventes ; que le service a pris connaissance de neuf factures établies au nom de la SARL Dine O Quick par M. B...en 2006 pour 148 100 euros hors taxe, de six factures en 2007 pour 110 000 euros hors taxe et de sept factures en 2008 pour 62 500 euros hors taxe mais a constaté que le libellé de chacune des factures ne mentionnait aucun pourcentage sur les ventes réalisées, aucun volume d'affaires, aucun nom de client et qu'il n'était pas possible de rattacher le montant d'une commission facturée à un chiffre d'affaires réalisé ; que des chèques ont été établis par M. B...sur son compte professionnel d'agent commercial à l'ordre de la société Dine O Quick et ont été comptabilisés sous forme d'avoirs ; que M. B...a lui-même indiqué au service qu'il finançait ainsi la société Dine O Quick qu'il avait créée avec sa compagne ; que le service en a conclu que les sorties financières matérialisées par des avoirs dans la comptabilité de M. B... ne pouvaient pas être regardées comme telles mais comme des apports financiers consentis par le requérant à la société Dine O Quick dont il était le gérant ; que, ce faisant, l'administration fiscale s'est seulement fondée sur l'absence de justifications de ces avoirs dans la comptabilité du requérant et n'a pas écarté, contrairement à ce qu'il soutient en appel, le contrat le liant à la SARL Dine O Quick ; que l'administration ne saurait, par suite, être regardée comme s'étant placée, même implicitement, sur le terrain de l'abus de droit ; que, dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait dû saisir, pour avis, le comité de l'abus de droit fiscal ;

5. Considérant, en second lieu, que l'administration s'est bornée à réintégrer dans les bases imposables le montant des avoirs non justifiés ; que, ce faisant, l'administration n'a pas, contrairement à ce que soutient le requérant, procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires quel que soit le montant de ces réintégrations ; que le requérant ne peut, dès lors, soutenir utilement que le service aurait dû démontrer au préalable l'absence de valeur probante et sincère de la comptabilité qui lui était présentée ;

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Considérant que M. B...conteste la remise en cause par l'administration fiscale des avoirs qu'il a comptabilisés, durant les années 2006 à 2008, au profit de la société Dine O Quick, dont il était le gérant, et l'imposition, par voie de conséquence, de la totalité de son chiffre d'affaires encaissé sur ses comptes professionnels d'agent commercial à la taxe sur la valeur ajoutée et en bénéfices non commerciaux ; qu'il résulte de l'instruction que les sorties bancaires du compte professionnel du requérant ont été matérialisées par des notes d'avoirs au bénéfice de la société Dine O Quick en diminution des commissions de 30 % dues au requérant sur les ventes réalisées par cette société ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, ces notes d'avoirs, qui comportent seulement la mention " avoir-trop perçu sur commissions " et un montant forfaitaire, ne peuvent être rattachées à aucune facture initiale et ne précisent pas le motif du reversement de ces sommes forfaitaires par le requérant à son mandant ; que le service a ainsi établi, au vu des propres déclarations du requérant, que ce dernier souhaitait faire financer par la société Dine O Quick une nouvelle société qu'il avait créée ; que l'administration fiscale a pu, dès lors, estimer que ces " avoirs " n'étaient pas justifiés et correspondaient en fait à des apports financiers consentis par le requérant à une société dont il était également le gérant ; qu'à cet égard, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne s'est pas prononcée sur la qualification de ces avoirs mais a estimé que, compte tenu des montants en litige comme des délais anormaux constatés entre la date d'émission des chèques et celle de leur dépôt en banque, tels que retracés en page 5 de la proposition de rectification du 31 juillet 2009 pour quatre chèques précisément identifiés pour des montants de 112 424 euros en 2006 et 47 840 euros en 2007, la disposition des sommes correspondant à ces avoirs au 31 décembre de chaque exercice devait être regardée comme matériellement établie ; que, par suite, l'administration fiscale a pu, à bon droit, estimer que les sommes correspondant à ces chèques d'avoirs étaient disponibles au 31 décembre de chaque année en cause quelle que soit la date d'encaissement desdits chèques ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à invoquer le bénéfice de la doctrine administrative qui imposerait une déduction des avoirs au titre de l'année au cours de laquelle les chèques ont été émis et non au titre de leur encaissement ;

Sur l'application des pénalités :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

8. Considérant qu'en faisant valoir que M. B...ne pouvait ignorer que ses écritures comptables n'ont servi qu'à matérialiser des sorties bancaires au profit de la société Dine O Quick dont il était le gérant et compte tenu des montants en litige et de la répétition des agissements du contribuable, l'administration doit être regardée comme établissant, en l'espèce, la mauvaise foi de celui-ci, et, par suite, le bien-fondé des pénalités appliquées ; que le manquement étant ainsi avéré au titre des années litigieuses, cette appréciation ne peut être en aucune façon liée à l'existence alléguée d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années antérieures ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante en la présente instance verse au requérant la somme qu'il demande sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- Mme Markarian, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2015.

''

''

''

''

N° 13MA04915 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04915
Date de la décision : 17/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SELARL FEAT SOCIETE D'AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-17;13ma04915 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award