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15/12/2015 | FRANCE | N°14MA01827

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14MA01827


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Azur mode aventura a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 30 mai 2012 par laquelle Pôle emploi a refusé de faire droit à sa demande de prolongation de la convention de contrat unique d'insertion - contrat initiative emploi (CUI-CIE) concernant M. B...D....

Par un jugement n° 1202734 du 28 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2014, la SARL Azur mode

aventura, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Azur mode aventura a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 30 mai 2012 par laquelle Pôle emploi a refusé de faire droit à sa demande de prolongation de la convention de contrat unique d'insertion - contrat initiative emploi (CUI-CIE) concernant M. B...D....

Par un jugement n° 1202734 du 28 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2014, la SARL Azur mode aventura, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 28 février 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 30 mai 2012 par laquelle Pôle emploi a refusé de faire droit à sa demande de prolongation de convention de contrat unique d'insertion - contrat initiative emploi (CUI-CIE) concernant M. B...D... ;

3°) d'enjoindre à Pôle emploi, " en application de l'article L. 5134-65 du code du travail, de réexaminer sa demande de renouvellement de la convention de Contrat unique d'insertion-contrat initiative emploi dans le délai de 30 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard " ;

4°) de mettre à la charge de Pôle emploi la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision a été prise par une autorité incompétente ;

- sa motivation est insuffisante ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 5134-65 du code du travail car M. D... s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article R. 5134-51 du code du travail car elle a sollicité le renouvellement de la convention dès le 15 janvier 2012 ;

- Pôle emploi a commis une erreur manifeste d'appréciation et n'a pas pris la mesure des conséquences d'une exceptionnelle gravité de la décision contestée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2015, l'établissement public Pôle emploi conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

- tous les moyens sont soulevés pour la première fois en appel ;

- les moyens se rattachant à la légalité externe sont irrecevables ;

- Pôle emploi aurait pris la même décision si celle-ci avait été initialement fondée sur le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 5134-51 du code du travail et l'absence de transmission par l'employeur d'un bilan des actions réalisées dans le cadre de la convention initiale et de la justification des actions qu'il entend mettre en oeuvre dans le cadre de la prolongation ;

- le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., de la SELARL Andreani-Humbert, pour Pôle emploi.

1. Considérant que la SARL Azur mode aventura a recruté M. B...D...dans le cadre d'un contrat unique d'insertion - contrat initiative emploi le 8 mars 2010 ; que Pôle emploi lui a attribué à ce titre l'aide à l'insertion professionnelle prévue par les dispositions de l'article L. 5134-19-1 du code du travail, pour une durée initiale de vingt-quatre mois ; que la convention dans le cadre de laquelle avait été recruté M. B...D...arrivant à son terme le 8 mars 2012, la SARL Azur mode aventura a sollicité, par courrier du 15 janvier 2012, une prolongation du dispositif d'aide financière à l'insertion professionnelle ; que, par décision du 30 mai 2012, Pôle emploi a refusé la prolongation de la convention sollicitée au motif que la demande de prolongation avait été déposée le 30 mars 2012, soit postérieurement à la date de prolongation du contrat de travail de M.D... ; que la société relève appel du jugement du 28 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense à la requête d'appel ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que le refus contesté est signé pour OlivierG..., directeur de site, par OlivierE... ; qu'il ressort du IV de la décision Paca n°2012-06 DS Agences du 22 mars 2012, publiée au bulletin officiel de Pôle emploi du 13 avril 2012 n° 35, que M. F...G..., directeur de Pôle emploi Nice La Plaine, a reçu délégation permanente de signature à l'effet de signer au nom du directeur régional de Pôle emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur, les décisions et conclure les conventions mentionnées à l'article R. 5312-4 du code du travail ; que ce dernier article vise notamment les conventions conclues par Pôle emploi pour le compte de l'Etat comme le sont les conventions conclues comme en l'espèce sur le fondement des dispositions du a) du 1° de l'article L. 5134-19-1 du code du travail ; que la décision de délégation de signature publiée le 13 avril 2012 mentionne également que M. F... E... bénéficie à titre temporaire d'une délégation dans ce domaine en cas d'absence ou d'empêchement du délégataire mentionné au point IV ; qu'il n'est pas établi que M. G... n'aurait pas été absent ou empêché à la date à laquelle a été prise la décision contestée ; que, par suite, le moyen d'incompétence, qui est d'ordre public et pouvait être invoqué même pour la première fois en appel, doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que Pôle emploi fait valoir à juste titre dans son mémoire en défense, mis à disposition de l'avocate de la société appelante le 24 juillet 2015, que la société n'a soulevé devant les premiers juges que des moyens de légalité interne et qu'elle n'est pas recevable à invoquer des moyens de légalité externe pour la première fois en appel ; qu'en vertu des dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, l'avocate de l'appelante est réputée avoir reçu la communication de cette fin de non-recevoir à l'issue d'un délai de huit jours à compter du 24 juillet 2015 ; qu'ainsi que le fait valoir Pôle emploi, le moyen tiré du défaut de motivation du refus contesté, fondé sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposent les moyens invoqués devant le tribunal, est irrecevable ; que la motivation du refus contesté est, par ailleurs et en toute hypothèse, suffisante, tant en droit qu'en fait ;

Sur la légalité interne :

4. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 5134-19-1, L. 5134-66 et L. 5134-69 du code du travail, le contrat initiative emploi est un contrat aidé constitué par deux conventions, l'une, dite " convention individuelle ", conclue entre l'employeur, le bénéficiaire et Pôle emploi pour le compte de l'Etat, l'autre correspondant au contrat de travail conclu entre l'employeur et le bénéficiaire de la convention individuelle ; que la convention individuelle et le contrat de travail peuvent faire l'objet d'une prolongation ; que les dispositions de l'article L. 5134-67-1 du code du travail prévoient la possibilité d'une prolongation de la convention individuelle et celles de l'article L. 5134-69-1 prévoient celle d'une prolongation du contrat de travail ; que les dispositions de l'article L. 5134-67-2 du code du travail subordonnent toutefois la prolongation de la convention individuelle et du contrat de travail conclu en application de cette dernière à l'évaluation des actions réalisées au cours du contrat en vue de favoriser l'insertion durable du salarié ; qu'enfin les dispositions de l'article R. 5134-56 du même code, dans leur rédaction applicable en l'espèce, imposent à l'employeur qui souhaite prolonger une convention individuelle au titre du contrat initiative-emploi d'adresser à l'autorité signataire de la convention initiale une demande préalable, motivée, accompagnée d'un bilan des actions réalisées en matière d'accompagnement et de formation, et d'un document répertoriant les actions d'accompagnement et de formation qu'il envisage de mettre en oeuvre pendant la période de prolongation ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de la lecture du refus en litige qu'il est fondé sur le dépôt de la demande de prolongation de la convention individuelle postérieurement à la date de prolongation du contrat de travail du salarié ; qu'eu égard au motif qui fonde ce refus, qui ne repose pas sur des considérations tenant au salarié, la circonstance que M. D...faisait partie des publics visés par ce dispositif ne peut être utilement invoquée ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que le refus critiqué est fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 5134-51 du code du travail, qui prévoyait, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " La convention individuelle initiale est conclue préalablement à la conclusion du contrat de travail mentionné à l'article L. 5134-69. " ; que la SARL requérante soutient que ces dispositions ont été méconnues ; que si ce texte fait obstacle à la conclusion de la convention individuelle initiale postérieurement à la conclusion du contrat de travail passé entre l'employeur et le bénéficiaire du dispositif, il ne régit nullement les modalités de prolongation de ladite convention ; qu'ainsi les dispositions précitées, n'ayant pas vocation à régir la prolongation d'une convention individuelle initiale, ne pouvaient légalement fonder un refus de prolongation d'une telle convention ;

7. Considérant, toutefois, que Pôle emploi invoque l'absence de transmission par l'employeur d'un bilan des actions réalisées dans le cadre de la convention initiale et de la justification des actions qu'il entendait mettre en oeuvre dans le cadre de la prolongation ; qu'il fait valoir qu'il aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif ;

8. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 5134-56 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " En application de l'article L. 5134-67-2, l'employeur qui souhaite prolonger une convention individuelle au titre du contrat initiative-emploi adresse à l'autorité signataire de la convention initiale une demande préalable. / Cette demande motivée est accompagnée d'un bilan des actions réalisées en matière d'accompagnement et de formation, notamment des actions d'aide à la prise de poste, de remise à niveau, d'acquisition de nouvelles compétences et de formation qualifiante. L'employeur joint également à sa demande un document répertoriant les actions d'accompagnement et de formation qu'il envisage de mettre en oeuvre pendant la période de prolongation " ; qu'il n'est pas contesté que le bilan prévu par ces dispositions n'était pas joint à la demande de prolongation présentée par la société appelante ; que le motif invoqué par Pôle emploi était, par suite, de nature à justifier légalement le rejet de ladite demande ; qu'il ressort des pièces du dossier que Pôle emploi aurait pris la même décision s'il avait entendu initialement se fonder sur ce motif ; que, dès lors qu'elle ne prive la SARL Azur mode aventura d'aucune garantie procédurale, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de procéder à la substitution de motifs demandée ;

10. Considérant, en troisième et dernier lieu, que les éléments avancées par la SARL Azur mode aventura, tenant tant à la personne du bénéficiaire du dispositif qu'à la difficulté dans laquelle elle se trouve pour financer son emploi ne permettent pas de considérer qu'en refusant de prolonger la convention initialement conclue, alors qu'elle n'avait aucun élément lui permettant d'apprécier le bilan ou l'existence même des actions réalisées en matière d'accompagnement et de formation et celles envisagées, l'autorité chargée de conclure la convention pour le compte de l'Etat ait, en tout état de cause, porté sur les faits de l'espèce et les enjeux en présence une appréciation manifestement erronée ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Azur mode aventura n'est pas fondée à se plaindre du rejet de sa demande par le jugement attaqué ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles qui tendent au versement de frais irrépétibles doivent être rejetées par voie de conséquence ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Azur mode aventura est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Azur mode aventura et à la direction régionale Provence-Alpes-Côte d'Azur de Pôle emploi.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme Menasseyre, première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01827
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-10-01-01 Travail et emploi. Politiques de l'emploi. Aides à l`emploi.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL ANDREANI-HUMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-15;14ma01827 ?
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