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11/12/2015 | FRANCE | N°14MA03424

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2015, 14MA03424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille :

- d'annuler l'arrêté du 27 mars 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A... et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français ;

- d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer, dans un délai d'un mois, une carte de séjour temporaire ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application de l'articl

e L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille :

- d'annuler l'arrêté du 27 mars 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A... et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français ;

- d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer, dans un délai d'un mois, une carte de séjour temporaire ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil.

Par un jugement n°1403117 du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2014, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1403117 du 4 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mars 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de renouveler son titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer, dans un délai d'un mois, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil.

Il soutient que :

- l'arrêté querellé a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet n'a pas envisagé l'existence d'une circonstance humanitaire exceptionnelle et n'a pas consulté le directeur de l'agence régionale de santé;

- il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; le préfet ne démontre pas qu'il peut voyager vers son pays d'origine ;

- il vit en France avec son père qui est âgé ; les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... en première instance et en appel ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille du 30 septembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Giocanti,

- et les observations de Me B..., représentant M. A....

1. Considérant que, par arrêté du 27 mars 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour que lui avait présentée, le 7 juin 2013, M. A..., ressortissant algérien, sur le fondement de l'article 6 alinéa 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français; que M. A... interjette appel du jugement en date du 4 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. A... soutient que l'arrêté en litige aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet aurait dû recueillir l'avis du directeur de l'agence régionale de santé ;

3. Considérant que l'article 6 de l'accord franco-algérien stipule : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens en l'absence de stipulations particulières de l'accord franco-algérien relatives à l'instruction des demandes de titre de séjour : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...)/ Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé.(...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis (...) / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;

4. Considérant qu'en l'absence de dispositions contraires, la régularité de la procédure de consultation d'un organisme s'apprécie au regard des textes en vigueur à la date à laquelle intervient la décision devant être précédée de cette consultation, alors même que celle-ci a eu lieu avant l'entrée en vigueur de ces textes et selon les règles prévues par les dispositions antérieurement applicables ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait porté à la connaissance du préfet, préalablement à la décision litigieuse, des éléments relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'être qualifiés de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet n'était pas tenu de consulter le directeur de l'agence régionale de santé avant de rejeter sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que l'avis du médecin inspecteur de santé publique, qui a été transmis au préfet des Bouches-du-Rhône sous couvert du directeur de l'agence régionale de santé, ainsi que le prévoient les dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, n'a pas fait l'objet de la part du directeur de l'agence régionale de santé d'un avis complémentaire motivé ; qu'ainsi, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir, qu'en l'absence de consultation du directeur de l'agence régionale de santé, l'arrêté litigieux aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière ;

6. Considérant en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est fracturé le fémur gauche lors d'un accident de la route en Algérie ; que des complications et des infections post opératoires ont nécessité plusieurs interventions chirurgicales et des antibiothérapies ; que M. A... a bénéficié entre 2008 et 2013 de trois autorisations provisoires de séjour et de quatre certificats de résidence dont il a demandé le renouvellement ; que, dans un avis du 21 août 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que le défaut de prise en charge de la pathologie dont souffre M. A... n'est pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé pourra bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie ; que le préfet verse au dossier une fiche du comité d'informations médicales et un extrait de l'annuaire des médecins et cliniques en Algérie dont il résulte notamment que 39 cliniques algériennes exercent une activité en orthopédie ; que si M. A... produit une attestation médicale du 21 juillet 2014 selon laquelle les soins doivent être poursuivis en métropole car l'affection de M. A... ne sera pas traitée efficacement en Algérie, celle-ci qui émet une simple appréciation qualitative sur la façon dont les pathologies de M. A... seraient prises en charge en Algérie, n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé dans son avis susmentionné quant aux conséquences du défaut de prise en charge de la pathologie, à la disponibilité d'un traitement en Algérie et à la possibilité de voyager ; qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 6 alinéa 7 de l'accord franco-algérien doivent être écartés ;

8. Considérant en troisième lieu, que M. A... soutient vivre en France chez son père âgé de 64 ans dont la santé est fragile ; que, toutefois, le requérant ne justifie pas de l'état de santé de son père ni n'établit qu'il lui apporte une aide indispensable pour accomplir les actes de la vie courante ; que, dans ces conditions, M. A..., célibataire et sans enfant, qui est entré en France à l'âge de 29 ans, ne peut être regardé comme y ayant établi le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que le préfet, en prenant l'arrêté en litige, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mars 2014 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Giocanti, conseiller,

Lu en audience publique, le 11 décembre 2015.

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N° 14MA03424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03424
Date de la décision : 11/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Fleur GIOCANTI
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : CHAIAHELOUDJOU

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-11;14ma03424 ?
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