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24/11/2015 | FRANCE | N°13MA04825

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 24 novembre 2015, 13MA04825


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...et la SARL C...Construction Cerdagne ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été assignés à la société susnommée au titre de la période du 10 avril 2008 au 31 décembre 2010, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle cette même société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n°1203431 du 10

octobre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...et la SARL C...Construction Cerdagne ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été assignés à la société susnommée au titre de la période du 10 avril 2008 au 31 décembre 2010, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle cette même société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n°1203431 du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée par télécopie le 9 décembre 2013, et régularisée par courrier le 12 décembre suivant, M. D...C...et la SARL C...Construction Cerdagne, représentés par MeB..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier n°1203431 du 10 octobre 2013 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en cause ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure de vérification contestée est entachée d'un vice de procédure, faute pour le service d'avoir adressé la proposition de rectification au liquidateur judiciaire de la société ;

- la procédure d'évaluation d'office dans le cadre d'une opposition à contrôle fiscal n'était pas applicable dès lors que toutes les diligences n'ont pas été accomplies par le vérificateur pour que le contrôle ait lieu et qu'il n'y a pas eu de la part des dirigeants de la société la volonté de ne pas coopérer ;

- l'inspecteur n'a pas communiqué à la société les factures qui sont à l'origine de la rectification, ce qui doit être considéré comme une violation des droits de la défense ;

- le taux de charges, qui doit comprendre les frais de personnel, était de 80 % du chiffre d'affaires et non de 60 % comme l'a retenu l'administration ;

- la proposition de rectification ne mentionne pas le nom de l'inspecteur principal qui a décidé d'appliquer la majoration prévue en cas d'opposition à contrôle fiscal ; le défaut de visa rend irrégulière la majoration en cause ;

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement en ce qui concerne le défaut de visa de la majoration pour opposition à contrôle fiscal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL C...Construction Cerdagne, qui exerçait une activité de travaux de maçonnerie générale et de gros-oeuvre en bâtiment et a été placée en liquidation judiciaire le 9 avril 2008, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période courant du 10 avril 2008 au 31 décembre 2010, l'administration ayant estimé que ses dirigeants et associés avaient poursuivi son activité ; qu'à l'issue de ce contrôle, la SARL C... Construction Cerdagne, prise en la personne de M. D...C..., a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés résultant de l'évaluation d'office de ses bases d'imposition, sur le fondement de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ; que M. C... et la SARL C...Construction Cerdagne demandent à la Cour d'annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande de décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement critiqué que le tribunal administratif de Montpellier a répondu de manière précise au moyen tiré de ce que le document comportant la motivation de la majoration pour opposition à contrôle fiscal n'aurait pas été visé par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur départemental ; que, dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ce jugement serait entaché d'une insuffisance de motivation ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à la SARL C... Construction Cerdagne et à M. D...C..., cogérant et associé, le 23 mai 2011, un avis de vérification de comptabilité ainsi que deux mises en demeure de déposer les déclarations de résultats et de taxe sur la valeur ajoutée, et qu'il n'est pas contesté que les plis, adressés en recommandé, ont été retournés au service avec les mentions " destinataire non identifiable " en ce qui concerne la société, et " non réclamé " en ce qui concerne son cogérant ; que l'administration a également adressé à ce dernier un second avis de vérification qui a été reçu le 2 août 2011, pour une intervention le 8 septembre 2011 ; que par courrier du 5 septembre 2011, les cogérants de la société requérante ont sollicité, sans justification d'un empêchement, un report de cette intervention au 28 octobre 2011 ; que par courrier du 7 septembre 2011, le service a accordé à la société un nouveau rendez-vous, au domicile du gérant, fixé au 21 septembre 2011, ce courrier valant mise en garde sur les risques encourus en cas d'opposition au droit de contrôle de l'administration ; qu'il n'est contesté ni le fait que le courrier a été retourné au service avec la mention " non réclamé ", ni le fait que le vérificateur s'est présenté le 21 septembre 2011 au domicile de M. C..., lequel a refusé de communiquer la comptabilité de la société ; que l'administration a alors fixé, par un courrier du 29 septembre 2011, une nouvelle intervention au 6 octobre 2011 ; que cette intervention a fait l'objet d'une demande de report au motif de l'état de santé de M. C... ; que par courrier du 6 octobre 2011 réitérant les risques encourus en cas d'opposition au contrôle, l'administration a fixé un dernier rendez-vous le 13 octobre 2011, au cours duquel le vérificateur n'a pas été en mesure d'effectuer les opérations de contrôle, le cogérant de la société, M. A...C..., sollicitant le report de l'intervention à une date indéterminée ; qu'il résulte de l'instruction que si l'état de santé de M. D...C...ne lui permettait pas d'honorer lui-même les rendez-vous fixés les 6 et 13 octobre 2011, il ne justifie pas de l'ensemble de ses absences, demandes de report et refus de communication, en se bornant à se prévaloir de séjours en Turquie au cours du mois d'octobre 2011, alors, au demeurant, qu'il n'est pas contesté que l'autre cogérant était disponible ;

5. Considérant que le comportement sus-décrit des cogérants de la SARL C...Construction Cerdagne, qui ont systématiquement cherché à éluder les entrevues avec le vérificateur, a été constitutif d'une opposition à contrôle fiscal ; que compte tenu des diligences nombreuses et vaines effectuées par le vérificateur, le contrôle fiscal de la SARL C...Construction Cerdagne doit être regardé comme n'ayant pu avoir lieu du seul fait de la contribuable ; que, par suite, l'administration a pu légalement faire usage à l'encontre de la SARL C...Construction Cerdagne de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 67 " ; et qu'aux termes de cet article L. 67 : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) / Il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment de lieu de séjour ou séjourne dans des locaux d'emprunt ou des locaux meublés, ou a transféré son domicile fiscal à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus, ou si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers " ; qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu priver le contribuable qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, des garanties dont bénéficient les contribuables, qu'ils soient imposés selon la procédure contradictoire ou selon une procédure d'imposition d'office ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit au point 4 que le contrôle fiscal de la SARL C...Construction Cerdagne doit être regardé comme n'ayant pu avoir lieu du seul fait de la contribuable ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification aurait dû être adressée au liquidateur judiciaire de la société est en tout état de cause inopérant ; que, pour le même motif, les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'administration se serait abstenue de communiquer à la société les factures obtenues auprès de tiers, et n'aurait pas respecté les droits de la défense ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que, d'autre part, l'article L. 193 du livre des procédures fiscales dispose : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour déterminer les résultats de l'exercice clos le 31 décembre 2008, le vérificateur a retenu un taux de charges de 69 % par référence aux charges non salariales constatées dans les résultats de l'exercice clos en 2006 ; qu'en se bornant à se prévaloir d'un taux de charges salariales afférent aux exercices antérieurs sans justifier de la réalité des charges supportées au cours de l'exercice en litige, et sans apporter la preuve, lui incombant, du caractère effectif des rémunérations du personnel qu'elle entend déduire, la société requérante et M. C...n'établissent pas la réalité et le montant des dépenses de personnel dont ils se prévalent pour demander que le taux de charges à prendre en compte au titre de l'exercice clos en 2008 soit porté à 80 % du chiffre d'affaires ;

Sur la majoration pour opposition à contrôle fiscal :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1732 du code général des impôts : " La mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : / a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits rappelés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 80 E du même livre : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. " ;

10. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, la proposition de rectification en date du 16 novembre 2011, notifiée le 18 novembre 2011 et comportant la motivation de la majoration pour opposition à contrôle fiscal prévue par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, a été visée par un agent ayant le grade d'inspecteur départemental ; que l'article L. 80 E précité du livre des procédures fiscales n'impose pas la mention du nom de l'agent ; que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir sur ce dernier point ni de l'instruction du 6 mai 1988 publiée au bulletin officiel des impôts référencé 13 L-7-88, ni de la doctrine administrative du 1er avril 1995 référencée 13-L-162 n°6, dès lors que les indications de ces textes concernent la procédure d'établissement de la majoration litigieuse ; qu'il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à en demander la décharge au motif que la proposition de rectification ne mentionne pas le nom de l'inspecteur départemental qui a apposé son visa ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... et la SARL C... Construction Cerdagne ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ; qu'ils ne peuvent ainsi prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...C...et de la SARL C...Construction Cerdagne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. D...C..., à la SARL C...Construction Cerdagne et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2015 où siégeaient :

- M. Martin, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,

- Mme Chenal-Peter, premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 novembre 2015.

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N° 13MA04825


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