Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, d'une part, la décision en date du 24 mai 2011 par laquelle le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a rectifié la saisie de son dossier " politique agricole commune " au titre de l'année 2010, en classant les surfaces affectées à la culture de la truffe, en surfaces non éligibles au droit au paiement unique (DPU) et, d'autre part, les décisions en date du 8 août 2011 par lesquelles l'agence de services et de paiement (ASP) à mis à sa charge la somme de 5 032,12 euros représentant un indu en matière de DPU.
Par un jugement n°s 1106155 et 1107854 du 12 novembre 2012, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 22 janvier 2013, 12 janvier et 2 octobre 2015, sous le n° 13MA00258, Mme C...B..., représentée par Me A...demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 novembre 2012 ;
2°) d'annuler la décision du 24 mai 2011, les deux titres de perception en date du 8 août 2011 et la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à l'ASP de lui verser l'aide au soutien à l'agriculture biologique pour les surfaces agricoles cultivées en chênes truffiers pour les campagnes 2010 et 2011, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'ASP et de l'Etat la somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions en date des 8 août et 24 mai 2011 ne sont motivées ni en droit ni en fait en violation de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que la décision du 8 août 2011 n'entrait dans aucune catégorie d'actes devant être motivés en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors que l'arrêté du 24 mai 2011 est une décision qui retire une décision créatrice de droit ;
- le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a commis une erreur de fait dès lors que la trufficulture est une activité agricole ouvrant droit à l'attribution de droit au paiement unique ; dans les Alpes-de-Haute-Provence, les arrêtés préfectoraux n° 2002-3335 du 5 novembre 2002 et n° 2003-124 du 9 janvier 2003 visent la culture de chênes truffiers comme activité de production agricole, la SMI correspondant à 30 hectares de cette culture ;
- il a également commis une erreur de qualification juridique des faits en affirmant que les plants de chênes utilisés en boisements forestiers et en trufficulture sont les mêmes ; les parcelles en truffières sont des parcelles agricoles cultivées, déclarées à la PAC, assujetties à la MSA et au régime de la taxe foncière en tant que cultures contrairement aux parcelles boisées ;
- la circulaire DGPAAT/SDEA/C2011-3020 du 6 avril 2011 ne considère plus les cultures de truffes comme des vergers truffiers, ni même comme une activité agricole, en contradiction totale avec la réglementation européenne ; ainsi, cette circulaire ne peut pas être appliquée ;
- au surplus, les surfaces de truffières productrices de truffes fraîches échappent aux dispositions des parcelles boisées comme le précise la circulaire du 6 avril 2011 en tant que verger " double fin " ; elles sont parfaitement éligibles aux DPU en vertu du règlement CE concernant la PAC en ce qu'elles constituent des surfaces agricoles productrices ; ainsi, l'autorité administrative a commis une erreur de droit ;
- en tout état de cause, l'arrêté en date du 16 décembre 2010 est inapplicable au régime juridique des vergers truffiers ; l'autorité administrative a commis une deuxième erreur de droit ;
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit dès lors que tout en affirmant que le préfet ne s'est pas fondé sur la circulaire du 6 avril 2011 pour édicter l'acte attaqué, le tribunal en est venu à apprécier la légalité de l'acte attaqué au regard des prescriptions posées par cette circulaire ;
- le tribunal a commis une autre erreur de droit en ne visant pas le texte qui pose la limite relative à la densité des arbres alors qu'il rejetait son recours en raison d'une densité d'arbres supérieure à 50 unités sur sa parcelle ;
- en remettant en cause le versement de sommes qui auraient été perçues indûment au titre de la campagne 2010, l'autorité administrative devait respecter les dispositions des articles 80 et 81 du règlement CE n° 1222/2009 concernant la répétition de l'indu ; or le manquement à ces dispositions revient à procéder au retrait illégal d'un acte créateur de droit ; tel a pourtant été le cas ; elle n'a commis aucune erreur ; c'est en revanche l'administration qui a commis une faute en ne l'avertissant pas des prétendues modifications du codage de ses parcelles tout en traitant son dossier ;
- le tribunal ne pouvait rejeter ses prétentions sans commettre d'erreur de droit dans la mesure où la décision de l'administration avait une incidence sur la valeur totale des droits que l'agriculteur avait reçu ;
- les dispositions de l'article 3 de l'arrêté en date du 16 décembre 2010 sont illégales en raison, d'une part, de leur contrariété avec le principe d'égalité et, d'autre part, de leur incompatibilité avec l'article 34 du règlement CE n° 1122/2009 et l'article 34 du règlement CE n° 73/2009.
Une mise en demeure a été adressée le 21 octobre 2014 au ministre de l'agriculture et à l'agence de services et de paiement.
Par ordonnance du 8 décembre 2014, la clôture d'instruction a été fixée au 12 janvier 2015.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2015, l'agence de services et de paiement conclut au rejet de la requête de Mme B...et demande à la Cour de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'avis des sommes à payer en date du 8 août 2011 n'entre dans aucune des catégories de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; le moyen tiré de son insuffisance de motivation est inopérant ;
- l'ASP étant en situation de compétence liée pour exiger le remboursement des sommes indûment versées à la requérante, l'ensemble des moyens qui relèvent de la légalité externe ou interne sont inopérants ;
- la décision par laquelle elle a mis à la charge de Mme B...la somme de 5 032,12 euros en vue de la répétition d'un paiement indu est la conséquence directe de la décision du 24 mai 2011 du préfet des Alpes-de-Haute-Provence ; cette décision est toujours exécutoire et justifie à elle seule sa demande de remboursement ;
- en application de l'article 80 du règlement (CE) n° 1122/2009, en cas de paiement indu résultant d'une erreur d'une autorité administrative ayant trait à des éléments factuels pertinents pour le calcul de l'aide et lorsque cette erreur ne pouvait raisonnablement être décelée par l'agriculteur concerné, ce dernier à l'obligation, sous réserve que la décision de recouvrement lui soit communiquée dans les douze mois suivant le paiement, de rembourser les montants en cause majorés d'intérêts ; en l'espèce, Mme B...avait nécessairement connaissance de la décision de recouvrement le 19 septembre 2011, date à laquelle elle a formé son recours gracieux contre la décision de répétition de l'indu ; cette décision a bien été communiquée à la requérante dans les douze mois suivant le paiement ;
- l'ASP en se bornant à tirer les conséquences de la décision du 24 mai 2011 était bien fondée, dès lors que la décision préfectorale n'est pas entachée d'illégalité, à demander à Mme B..., par la décision de recouvrement communiquée dans les douze mois suivant le paiement, la répétition des aides versées indûment pour la campagne 2010 et dont le quantum n'est pas discuté.
Par ordonnance du 12 janvier 2015, la clôture d'instruction a été reportée au 10 février 2015.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 9 janvier et 8 septembre 2015, le ministre de l'agriculture conclut au rejet de la requête de MmeB....
Il soutient que :
- dans son jugement, le tribunal vise le règlement (CE) n° 1122/2009 de la commission du 30 novembre 2009 dont il cite les dispositions de l'article 34 ; en visant, en outre, l'arrêté du 16 décembre 2010 dont il cite l'article 3, le tribunal a mis à la connaissance de la requérante la réglementation relative aux conditions d'admissibilité des surfaces aux aides l'ayant conduit à statuer sur les décisions contestées ;
- le moyen tiré du défaut de motivation constitue une demande nouvelle et n'est pas recevable ; le fait que la requérante ait contesté la motivation de la décision de l'ASP du 8 août 2011 est indifférent car il s'agit d'une décision distincte ; la décision du 24 mai 2011 ne constitue pas une décision individuelle défavorable ;
- lors du dépôt de sa demande, le 11 mai 2010, Mme B...a déclaré exploiter 9,66 ha pour la production de chênes truffiers, pour lesquels elle a demandé à bénéficier, d'une part, de l'aide découplée, et, d'autre part, de l'aide spécifique au maintien à l'agriculture biologique ; or, il est constant que la densité des arbres de ces surfaces excède 50 unités par ha ; ces surfaces ne remplissent donc pas les conditions permettant de les regarder comme agricoles ; elles ne sont pas admissibles à l'aide découplée et ne permettent pas l'octroi de l'aide à l'agriculture biologique ;
- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la circulaire du 6 avril 2011 ne pourra qu'être écarté, ce texte n'ayant pas fondé les décisions en date du 24 mai et 9 mai 2011 ;
- Mme B...a inclus les surfaces de production de chênes truffiers dans la déclaration de surfaces de son exploitation, dans sa demande d'aides agricoles ; la prise en compte de ces surfaces résulte donc d'un acte de Mme B...et non pas d'une erreur de l'administration ; ainsi, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a pu refuser de considérer comme admissibles les surfaces déclarées par la requérante et le remboursement des sommes indues pouvait être exigé dans le délai de quatre ans prévu à l'article 3 du règlement (CE Euratom) n° 2988/95 du 18 décembre 1995 ;
- les décisions contestées ne méconnaissent pas les règles relatives à la récupération de des droits indus ;
- l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 2010 est parfaitement en rapport avec l'objet de l'article 34 du règlement CE n° 122/2009 de la commission du 30 novembre 2009 et ne méconnaît pas le principe d'égalité.
Par ordonnance du 11 septembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 6 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;
- le règlement (CE) n° 1120/2009 de la Commission du 29 octobre 2009 portant modalités d'application du régime de paiement unique prévu par le titre III du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur de ces agriculteurs ;
- le règlement (CE) n° 1122/2009 du 30 novembre 2009, de la Commission fixant les modalités d'application du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d'application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d'aide prévu pour le secteur vitivinicole ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- l'arrêté du 16 décembre 2010 fixant certaines modalités d'application pour la mise en oeuvre de certains régimes de soutien direct en faveur des producteurs dans le cadre de la politique agricole commune ;
- la circulaire DGPAAT/SDEA/C2011-3020 en date du 6 avril 2011 relative aux paiements à la surface au titre du 1er pilier de la PAC ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 24 août 2015.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marchessaux,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de MmeB....
1. Considérant que Mme B...relève appel du jugement du 12 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 24 mai 2011 par laquelle le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a rectifié la saisie de son dossier " politique agricole commune " au titre de l'année 2010, en classant les surfaces affectées à la culture de la truffe, en surfaces non éligibles au droit au paiement unique (DPU) et, d'autre part, les décisions en date du 8 août 2011 par lesquelles l'agence de services et de paiement (ASP) a mis à sa charge la somme de 5 032,12 euros représentant un indu en matière de DPU, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administratif : " Les jugements sont motivés. " ; qu'aux termes de l'article R. 741-2 du même code : " (...) Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. " ;
3. Considérant que pour estimer que les parcelles plantées en chênes truffiers de Mme B... avait une densité d'arbres supérieure à 50 unités par hectare, le tribunal s'est fondé sur l'application combinée des dispositions de l'article 34 du règlement (CE) n° 112/2009 et de celles de l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 2010 qui prévoient la limite relative à la densité des arbres ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, ces textes sont bien visés et cités par le jugement attaqué ; que ce moyen doit dès lors être écarté ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité de la décision en date du 24 mai 2011 du préfet des Alpes-de-Haute-Provence :
4. Considérant que, devant le tribunal administratif, Mme B...n'a soulevé que des moyens tirés de l'illégalité interne à l'encontre de la décision en date du 24 mai 2011 attaquée ; que, si devant la Cour, elle soutient que cette décision serait entachée d'un défaut de motivation, ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel comme le fait valoir le ministre de l'agriculture ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement (CE) n° 73/2009 du conseil du 19 janvier 2009 : " Définitions : Aux fins du présent règlement, on entend par : c) "activité agricole", la production, l'élevage ou la culture de produits agricoles, y compris la récolte, la traite, l'élevage et la détention d'animaux à des fins agricoles, ou le maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales au sens de l'article 6 ; (...) h) "surface agricole", l'ensemble de la superficie des terres arables, des pâturages permanents ou des cultures permanentes." ; qu'aux termes de l'article 34 du règlement précité : " Activation des droits au paiement par hectare admissible : 1. L'aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d'un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu'ils fixent. 2. Aux fins du présent règlement, on entend par "hectare admissible" : a) toute surface agricole de l'exploitation et les surfaces plantées de taillis à courte rotation (code NC ex 0602 90 41) utilisées aux fins d'une activité agricole ou, en cas d'utilisation également pour des activités autres qu'agricoles, essentiellement utilisées à des fins agricoles (...) " ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 34 du règlement (CE) n° 1122/2009 susvisé : " Détermination des superficies : (...) 4. Sans préjudice de l'article 34, paragraphe 2, du règlement (CE) no 73/2009, une parcelle agricole boisée est considérée comme une superficie admissible aux fins des régimes d'aide "surfaces", sous réserve que des activités agricoles ou, le cas échéant, que la production envisagée puissent se dérouler comme elles se dérouleraient sur des parcelles non boisées situées dans la même zone (...) " ; que l'article D. 615-12 du code rural et de la pêche maritime dispose que : " Pour l'application du 2 de l'article 34 du règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 susmentionné, les normes usuelles d'utilisation des superficies sont constatées par arrêté préfectoral. (...). Cet arrêté fixe également les conditions dans lesquelles une parcelle boisée est considérée comme agricole pour l'application du 4 de l'article 34 du même règlement (CE) n° 1122/2009. Cet arrêté peut autoriser le préfet à fixer des conditions dérogatoires plus favorables. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté en date du 16 décembre 2010 susvisé : " Détermination des superficies. (...) Sont considérées comme agricoles au sens du 4 de l'article 34 du règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 susvisé, les parcelles sur lesquelles le nombre d'arbres par hectare est inférieur ou égal à 50. (...) " ;
7. Considérant comme l'a estimé à juste titre le tribunal administratif de Marseille, qu'il ressort des pièces du dossier que les parcelles exploitées par Mme B...plantées en chênes truffiers, doivent être regardées comme des surfaces boisées au sens de l'article 34 précité du règlement (CE) n° 1122/2009 ; que ces parcelles ayant une densité d'arbres supérieure à 50 unités par hectare, elles ne peuvent donc pas être considérées comme des surfaces agricoles admissibles aux droits au paiement unique suivant les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 2010 ; que sont sans incidence les circonstances à les supposer établies que le département du Gard et tous les départements producteurs de truffes reconnaîtraient la trufficulture comme une activité de production agricole, que la truffe serait une véritable production liée à un arbre ou qu'elle serait classée administrativement dans les " fruits et légumes " selon le centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL) et que de ce fait elles échapperaient aux dispositions des parcelles boisées comme le préciserait la circulaire du 6 avril 2011 en tant que verger double fin ; qu'il en va de même du moyen tiré de ce que les parcelles en truffières sont des parcelles agricoles cultivées, déclarées à la politique agricole commune, assujetties à la Mutuelle sociale agricole (MSA) et au régime de la taxe foncière en tant que culture ou que l'administration les aurait considéré comme des vergers truffiers, la mention de vergers ayant été du reste retenue par le préfet des Alpes-de-Haute-Provence à défaut d'autre code pour cette nature de culture comme le mentionne la décision attaquée ; qu'il s'en suit que les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de qualification juridique des faits doivent être écartés ;
8. Considérant que Mme B...ne peut utilement exciper de l'illégalité de la circulaire DGPAAT/SDEA/C2011-3020 en date du 6 avril 2011 relative aux paiements à la surface au titre du 1er pilier de la politique agricole commune au motif qu'elle ne considère plus les cultures de truffes comme des vergers truffiers ni même comme une activité agricole, en contradiction avec la règlementation européenne et de ce qu'elle serait entachée d'une incompétence de son auteur dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Alpes-de-Haute-Provence aurait fait application de cette circulaire ;
9. Considérant que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait commis une contradiction dans ses motifs en estimant que le préfet ne s'est pas fondé sur cette circulaire pour édicter l'acte attaqué tout en appréciant sa légalité au regard des prescriptions posées par la circulaire ; qu'en effet, les premiers juges ont fait application de la condition du seuil d'éligibilité relatif à la densité des arbres telle que prévue par l'article 3 de l'arrêté en date du 16 décembre 2010 et non par ladite circulaire ;
10. Considérant que contrairement à ce que soutient MmeB..., la circonstance que l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 2010 relatif à la détermination des superficies prévoit des dispositions spécifiques pour la définition des parcelles éligibles de vergers de poires Williams ou Rocha, de pêches Pavies et de prunes d'Ente ne saurait démontrer l'exclusion des vergers truffiers de ces dispositions qui concernent toute parcelle agricole ;
11. Considérant que le moyen tiré de ce que l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 2010 pose une différence de traitement fondée sur une différence de situation est dépourvu de précision suffisante permettant d'en apprécier le bien-fondé tout comme celui tiré de la contrariété de ces dispositions avec celles des articles 34 des règlements (CE) n° 73/2009 et n° 1122/2009 ; que, contrairement à ce que fait valoir MmeB..., la différence de traitement entre les surfaces présentant une densité d'arbres inférieure ou supérieure à 50 unités par hectare est bien en rapport avec l'objet de l'arrêté précité qui est de fixer les modalités d'application pour la mise en oeuvre de certains régimes de soutien direct en faveur des producteurs dans le cadre de la politique agricole commune et de déterminer les superficies éligibles, ainsi que de celui de l'article 34 du règlement (CE) n° 1122/2009 en vertu duquel une parcelle agricole boisée est considérée comme une superficie admissible aux fins des régimes d'aides " surfaces ", sous réserve que des activités agricoles ou, le cas échéant, que la production envisagée puissent se dérouler comme elles se dérouleraient sur des parcelles non-boisées situées dans la même zone ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article 80 du règlement (CE) n° 1122/2009 susvisé : " Répétition de l'indu. 1. En cas de paiement indu, l'agriculteur concerné a l'obligation de rembourser les montants en cause majorés d'intérêts calculés comme prescrit au paragraphe 2. (...) / 3. L'obligation de remboursement visée au paragraphe 1 ne s'applique pas si le paiement a été effectué à la suite d'une erreur de l'autorité compétente ou d'une autre autorité, et si l'erreur ne pouvait raisonnablement être décelée par l'agriculteur. / Toutefois, lorsque l'erreur a trait à des éléments factuels pertinents pour le calcul de l'aide concernée, le premier alinéa ne s'applique que si la décision de recouvrement n'a pas été communiquée dans les 12 mois suivant le paiement. " ; qu'aux termes de l'article 81 du même règlement : " Récupération des droits indûment alloués. / 1. Sans préjudice de l'article 137 du règlement (CE) no 73/2009, lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009, il est établi que certains droits au paiement ont été alloués indûment, l'agriculteur concerné cède les droits indûment alloués à la réserve nationale visée à l'article 41 du règlement (CE) no 73/2009. (...) / 2. Sans préjudice de l'article 137 du règlement (CE) no 73/2009, lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009, il est établi que la valeur des droits au paiement est trop élevée, cette valeur est ajustée en conséquence. (...). / 3. Lorsque, aux fins des paragraphes 1 et 2, il est établi que le nombre de droits alloués à un agriculteur conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009 est inexact, et lorsque l'allocation indue n'a aucune incidence sur la valeur totale des droits que l'agriculteur a reçus, l'État membre recalcule les droits au paiement et corrige, le cas échéant, le type de droits alloués à l'agriculteur. / Cependant, le premier alinéa ne s'applique pas si les erreurs auraient pu raisonnablement être détectées par les agriculteurs. (...) " ;
13. Considérant que Mme B...ne peut utilement soutenir que la décision du 24 mai 2011 attaquée méconnaîtrait les dispositions des articles 80 et 81 précités du règlement (CE) n° 1122/2009 et que ce manquement constituerait un retrait illégal d'un acte créateur de droit dès lors que cette décision par laquelle le préfet des Alpes-de-Haute-Provence l'a informé de ce qu'il avait décidé de saisir ses parcelles cultivées en chênes truffiers en " autres utilisations " et qui avait pour effet de rendre les surfaces non admissibles aux DPU ne procède pas à la récupération des droits qui lui ont été indûment alloués ; qu'ainsi, ce moyen ne saurait être accueilli ;
En ce qui concerne la légalité de l'avis de somme à payer en date du 8 août 2011 et des titres de perception émis le 1er juin 2011 par l'agence de services et de paiement :
14. Considérant que, si Mme B...soutient devant la Cour que les décisions du 8 août 2011 sont insuffisamment motivées en méconnaissance des dispositions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée, ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, présenté pour la première fois en appel alors qu'aucun moyen de légalité externe n'avait été invoqué par Mme B... devant les premiers juges avant l'expiration du délai de recours contentieux, qui courait, en l'espèce, au plus tard de la date de la saisine du tribunal, n'est pas recevable comme le fait valoir le ministre de l'agriculture ;
15. Considérant que les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur sur la qualification juridique des faits doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au considérant n° 7 précédent ;
16. Considérant que Mme B...ne peut utilement exciper de l'illégalité de la circulaire DGPAAT/SDEA/C2011-3020 en date du 6 avril 2011 et des dispositions de l'article 3 de l'arrêté en date du 16 décembre 2010 dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'ASP aurait fait application de ces textes ;
17. Considérant que contrairement à ce que soutient MmeB..., l'administration n'a commis aucune faute en ne l'avertissant pas des modifications du codage lorsqu'elle a traité son dossier, aucune obligation en ce sens ne résultant des dispositions du règlement (CE) n° 1122/2009 ou du code rural et de la pêche maritime ; qu'à supposer même que l'erreur résulte de l'administration, l'appelante ne précise pas en quoi elle n'aurait pu raisonnablement l'avoir décelée ; que contrairement à ce qu'elle fait valoir, il ne relevait pas de l'office du juge de première instance de vérifier si la décision de retrait avait été prise alors que le bénéficiaire avait commis une erreur raisonnablement détectable alors qu'au demeurant, Mme B...n'a nullement invoqué ces dispositions devant eux ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 80 et 81 précités du règlement (CE) n° 1122/2009 qui constituerait un retrait illégal d'un acte créateur de droit doit dès lors être écarté ;
18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 mai 2011, des décisions de l'ASP en date du 8 août 2011 et de la décision de rejet de son recours gracieux ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
19. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B...n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions susvisées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat et l'ASP, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, versent à Mme B...quelque somme que ce soit au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme B...une somme de 1 000 euros, au titre des frais exposés par l'agence de services et de paiement et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera à l'agence de services et de paiement une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la forêt et à l'agence de services et de paiement.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-de-Haute-Provence.
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2015, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Marchessaux, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 novembre 2015.
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N° 13MA00258