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19/11/2015 | FRANCE | N°13MA05124

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 19 novembre 2015, 13MA05124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté en date du 24 août 2012 par lequel le maire de la commune de Rognac a refusé de lui délivrer un permis de construire pour édifier une maison individuelle aux Ferrages de Saint-Eloi, sur la parcelle BK88, ensemble le rejet implicite du recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et de condamner la commune à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation des préjudices matériels et financiers subis du fait de l'i

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Par un jugement n° 1300956 du 24 octobre 2013, le t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté en date du 24 août 2012 par lequel le maire de la commune de Rognac a refusé de lui délivrer un permis de construire pour édifier une maison individuelle aux Ferrages de Saint-Eloi, sur la parcelle BK88, ensemble le rejet implicite du recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et de condamner la commune à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation des préjudices matériels et financiers subis du fait de l'illégalité de cet arrêté.

Par un jugement n° 1300956 du 24 octobre 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande ;

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 décembre 2013 et 22 septembre 2015, M. C..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 octobre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2012 et de condamner la commune de Rognac à lui verser la somme de 150 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2012 ;

3°) d'enjoindre à la commune de réinstruire sa demande de permis de construire et de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;

4°) de condamner la commune de Rognac à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente dès lors qu'il n'est pas établi que la délégation du signataire a été régulièrement publiée au recueil des actes administratifs après avoir été revêtu du visa de réception en préfecture ;

- le plan d'occupation des sols ne respecte pas les dispositions de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme ;

- la commune a réalisé ses objectifs de mixité sociale ;

- la motivation du refus en litige est entaché de détournement de pouvoir, dès lors que le pourcentage de 40% de réalisation de logements sociaux par rapport au 20% existant sur le reste du territoire est excessif ;

- la réalisation de 40% de logements sociaux sur la parcelle concernée est irréalisable ; la servitude de mixité sociale appliquée sur cette parcelle est donc entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté contesté est entaché de détournement de pouvoir puisqu'il est destiné en réalité à le contraindre d'invoquer son droit de délaissement institué par l'article L. 230-4-1 du code de l'urbanisme et de permettre à la commune de réaliser une plus-value financière ;

- il justifie de son préjudice.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2015, la commune de Rognac conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. C... à lui verser une somme de 2 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité régulièrement habilitée ;

- la révision n° 8 du plan d'occupation des sols qui a institué une servitude de mixité sociale n'est entachée d'aucune illégalité ; cette servitude doit s'apprécier globalement et non parcelle par parcelle ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Un courrier du 30 juillet 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 5 octobre 2015 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Josset, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Salvage , rapporteur public,

- et les observations de Me B...substituant Me G..., représentant M. C... et Me A..., représentant la commune de Rognac.

1. Considérant que, par arrêté du 24 août 2012, le maire de la commune de Rognac a refusé de délivrer à M. C... un permis de construire une maison individuelle sur une parcelle cadastrée BK88 située les Ferrages de Saint-Eloi, incluse dans un secteur Uda par le plan d'occupation des sols de la commune ; que M. C... demande l'annulation du jugement du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal a rejeté son recours contre cet arrêté, ensemble le rejet de son recours gracieux, ainsi que, par voie de conséquence, sa demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des illégalités fautives de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal.(...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2122-29 du même code : " Les arrêtés du maire ainsi que les actes de publication et de notification sont inscrits par ordre de date. Dans les communes de 3 500 habitants et plus, les arrêtés municipaux à caractère réglementaire sont publiés dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 2121-10 de ce code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le dispositif des délibérations du conseil municipal visé au second alinéa de l'article L. 2121-24 et les arrêtés du maire, à caractère réglementaire, visés au deuxième alinéa de l'article L. 2122-29, sont publiés dans un recueil des actes administratifs ayant une périodicité au moins trimestrielle. Ce recueil est mis à la disposition du public à la mairie (...). Le public est informé, dans les vingt-quatre heures, que le recueil est mis à sa disposition par affichage aux lieux habituels de l'affichage officiel. (...) " ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. (...) " ; que s'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 2122-29 de ce code que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, les arrêtés municipaux à caractère réglementaire sont publiés dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, ces dispositions n'ont pas dérogé au principe fixé à l'article L. 2131-1 du même code, en vertu duquel la formalité de publicité qui conditionne l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être l'affichage ;

4. Considérant que, par un arrêté du 11 janvier 2011, le maire de Rognac a délégué sa signature à Mme F..., signataire de l'arrêté en litige, à l'effet de signer les documents relatifs à sa qualité d'adjointe à l'urbanisme ; qu'il ressort des pièces du dossier que cet arrêté revêtu du visa de réception en sous-préfecture le 25 janvier 2011, a été affiché en mairie à compter de la même date ; que cet affichage était de nature à permettre l'entrée en vigueur de l'arrêté, alors même que les formalités de publicité prévues à l'article R. 2121-10 du code général des collectivités territoriales n'auraient pas été suivies ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

5. Considérant que l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : " Dans les zones urbaines ou à urbaniser, le plan local d'urbanisme peut instituer des servitudes consistant:/ (...) b) à réserver des emplacements en vue de la réalisation, dans le respect des objectifs de mixité sociale, de programmes de logements qu'il définit ; (...)" ; qu' en contrepartie de l'institution de ces servitudes d'urbanisme, les propriétaires concernés peuvent, conformément à l'article L. 123-17 du même code, exiger de la collectivité au bénéfice de laquelle leur terrain a été réservé qu'il soit procédé à son acquisition ; que l'article R. 123-12 du même code dispose: " Les documents graphiques prévus à l'article R. 123-11 font également apparaître, s'il y a lieu :/1° Dans les zones U:/ (...)/c) Les emplacements réservés en application du b de l'article L. 123-2 en vue de la réalisation, dans le respect des objectifs de mixité sociale, de programmes de logements en précisant la nature de ces programmes. (...) " ;

6. Considérant que ces dispositions ont pour objet d'habiliter les auteurs des plans d'urbanisme, d'une part, à définir dans les zones urbaines ou à urbaniser des programmes de logements répondant à des préoccupations de mixité sociale, dont les plans et les documents graphiques qui y sont annexés précisent la nature, et, d'autre part, à constituer, dans ces zones, des réserves foncières afin de permettre la mise en oeuvre de ces programmes ; que les plans locaux d'urbanisme peuvent, à cette fin, imposer des contraintes précises à ces terrains et fixer notamment un pourcentage minimum de surface hors oeuvre nette affecté à la réalisation des logements prévus par ces programmes ou un nombre minimum de logements à édifier, éventuellement en indiquant les catégories de logements concernés ; que les propriétaires peuvent, au demeurant, faire usage du droit de délaissement prévue par l'article L. 123-17 du code de l'urbanisme ;

7. Considérant, en premier lieu, que par délibération du 17 février 2011 le conseil municipal de Rognac a adopté la révision n° 8 de son plan d'occupation des sols qui a eu pour effet d'instaurer une servitude de mixité sociale dite " Lamartine " sur le fondement de l'article L. 123-2 b précité ; que M. C... excipe, à nouveau en appel, de l'illégalité de cette délibération à l'appui de son recours contre le refus de permis de construire qui lui a été opposé en faisant état des insuffisances et omissions que comporteraient les documents annexés au règlement du plan d'occupation des sols en ce qui concerne l'instauration de cette servitude ; que le tribunal administratif a jugé que les emplacements réservés étaient localisés dans le document graphique annexé à cette modification du plan, notamment dans deux photographies aériennes faisant apparaître les parcelles concernées, que la nature des programmes était également précisée et que contrairement à ce que soutenait l'intéressé, tant le numéro de la servitude que celui de la référence cadastrale des parcelles étaient indiqués sur le document graphique annexé au règlement du plan d'occupation des sols ; qu'il y a lieu de rejeter le moyen selon lequel il n'est pas justifié que le plan d'occupation des sols comporte ces précisions par adoption des motifs retenus par les premiers juges et qui n'appellent pas de précisions complémentaires en appel ; que de même, la circonstance qu'aucune surface hors oeuvre minimale à construire et le nombre de logements minimum à réaliser n'aient été précisés est sans incidence sur la légalité de la délibération en litige, dès lors qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, notamment celles précitées, que de telles précisions auraient dû figurer dans la délibération instaurant l'emplacement réservé en cause ou dans un document annexé au plan d'occupation des sols ; que la circonstance que la délibération contestée ait fixé, pour le secteur, un pourcentage de logements supérieur à l'objectif de 20% prévu à l'échelon communal ne suffit pas à révéler une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que l'objectif de mixité sociale dans un secteur donné doit s'apprécier à l'échelle de ce secteur et non, comme le soutient M. C..., à l'échelle de la parcelle grevée d'une servitude d'emplacement réservé ; qu'ainsi, la seule circonstance que la parcelle de M. C..., compte tenu également, selon lui, des autres prescriptions du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la zone UD serait d'une dimension insuffisante pour comporter un projet comportant la réalisation de 40% de logements sociaux n'est pas de nature, par elle-même, à affecter la légalité de la délibération du 17 février 2011 en cause ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas établi que la parcelle n° 48 appartienne au secteur Lamartine - SMS D ; que, par suite, la circonstance que la commune aurait préempté puis revendu cette parcelle sans réaliser de logements sociaux ne saurait établir que la commune aurait atteint son objectif de 40% de logements sociaux dans le secteur considéré ; que cette circonstance, en tout état de cause, ne saurait à elle seule établir que, comme le soutient M. C..., la commune aurait rempli ses objectifs de mixité sociale pour l'ensemble de son territoire ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la commune ne pouvait refuser le permis de construire sollicité par M. C... pour un motif tiré des exigences de création de logement sociaux doit être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que le maire pouvait légalement refuser de délivrer le permis de construire sollicité par M. C... ; que, par suite, le moyen selon lequel la commune aurait refusé le permis de construire en litige pour contraindre l'intéressé à invoquer son droit de délaissement pour permettre à celle-ci de réaliser une opération spéculative ne peut être que rejeté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 août 2012 par lequel le maire de Rognac a refusé de lui délivrer un permis de construire, ensemble le rejet de son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

12. Considérant que la présente décision n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre ne peuvent être que rejetées ;

Sur les conclusions indemnitaires :

13. Considérant qu'il résulte de ce qu'il vient d'être dit que l'arrêté en litige n'est pas entaché d'illégalité ; que, par voie de conséquence, les conclusions indemnitaires fondées sur la prétendue illégalité fautive de cette décision ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Rognac, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par C...et non compris dans les dépens ;

16. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 000 euros à verser à la commune de Rognac au titre des dispositions précitées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera à la commune de Rognac, une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C...et à la commune de Rognac.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2015 , où siégeaient :

- M. d'Hervé, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique le 19 novembre 2015.

7

N° 13MA05124


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA05124
Date de la décision : 19/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : RAMOGNINO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-19;13ma05124 ?
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