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05/11/2015 | FRANCE | N°14MA01309

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2015, 14MA01309


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...épouse E...D...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1304823 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeA....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 mars 2014, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la

Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice en date du 11 février 2014 ; ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...épouse E...D...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1304823 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeA....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 mars 2014, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice en date du 11 février 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer ; en effet, les premiers juges n'ont pas statué sur les moyens spécifiques qu'elle soulevait à l'encontre des décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination et notamment sur le moyen tiré de la circonstance que le bénéfice du regroupement familial ne pouvait intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur l'atteinte à sa vie familiale ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il n'est pas justifié que le signataire de l'arrêté litigieux disposait d'une délégation de signature régulière ; le jugement est irrégulier ;

- la dispense de conclusions du rapporteur public devant le tribunal ne s'imposait pas et est intervenue en méconnaissance des droits de la défense ; elle n'a pas été en mesure de connaître avant l'audience le sens de ses conclusions afin de présenter le cas échéant des observations ou une note en délibéré ;

- la décision de refus de séjour méconnaît son droit en tant qu'épouse d'un résident de mener une vie privée et familiale normale et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; cette décision méconnaît l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont dépourvues de base légale.

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête de Mme A...a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Sur sa proposition, le rapporteur public, désigné par le président de la cour en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du même code par le président de la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Markarian,

- et les observations de MeB..., pour MmeA....

1. Considérant que MmeA..., épouse E...D..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Tunisie ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

4. Considérant que MmeA..., qui est née le 23 novembre 1990, s'est mariée en Tunisie le 17 juin 2010 avec un compatriote, entré en France en 2001, qui travaille comme peintre et qui est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 1er mai 2021 ; qu'elle réside en France depuis le 22 décembre 2011 avec son époux, avec lequel elle a eu une enfant née 1er mai 2012 ; qu'ainsi, compte tenu de la réalité de la vie commune du couple, qui n'est pas contestée, de son ancienneté, et alors même que l'intéressée entre dans les catégories ouvrant droit au bénéfice du regroupement familial, l'arrêté litigieux porte une atteinte excessive au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale tel que reconnu par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son annulation entraîne, par voie de conséquence, celle de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme A...; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date du présent arrêt, des éléments de droit ou de fait nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose à la demande de la requérante une nouvelle décision de refus ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1304823 du tribunal administratif de Nice en date du 11 février 2014 ainsi que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 17 octobre 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., épouse E...D..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré à l'issue de l'audience du 15 octobre 2015, où siégeaient :

M. Bédier, président,

Mme Paix, président-assesseur,

Mme Markarian, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 novembre 2015.

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N° 14MA01309 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01309
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : KAMENI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-05;14ma01309 ?
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