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26/10/2015 | FRANCE | N°14MA01921

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2015, 14MA01921


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Auto Dépannage Service (ADS) a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision de la commune de Béziers du 26 novembre 2012 prononçant à compter du 31 décembre 2012 la résiliation du contrat de gestion de la fourrière automobile conclu le 15 décembre 2010.

Par un jugement n° 1205422 du 14 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2014, la société A

DS, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Auto Dépannage Service (ADS) a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision de la commune de Béziers du 26 novembre 2012 prononçant à compter du 31 décembre 2012 la résiliation du contrat de gestion de la fourrière automobile conclu le 15 décembre 2010.

Par un jugement n° 1205422 du 14 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2014, la société ADS, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 mars 2014 ;

2°) d'annuler la décision de résiliation de la commune de Béziers du 26 novembre 2012 ;

3°) d'ordonner la reprise des relations contractuelles à titre principal à la date du 15 décembre 2010 ou, à titre subsidiaire, à la date du 11 mars 2014 ;

4°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de la commune de Béziers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges auraient dû soulever d'office le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse ;

- la décision du 26 novembre 2012 est incompétemment signée ;

- aucun manquement grave ne peut lui être reproché ;

- la commune de Béziers a eu un comportement fautif dans l'exécution du contrat.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2014, la commune de Béziers, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société ADS à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société ADS ne sont pas fondés.

Par courrier du 30 juin 2015, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et de la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 17 septembre 2015, la clôture d'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héry,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la société Auto Dépannage Service, et de MeA..., représentant la commune de Béziers.

1. Considérant que la commune de Béziers a confié l'exploitation de la fourrière automobile municipale à la société Auto Dépannage Service (ADS) par un contrat de délégation de service public conclu le 15 décembre 2010 pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2011 ; qu'estimant que son délégataire avait commis plusieurs manquements à ses obligations contractuelles, la commune a prononcé, par décision du 26 novembre 2012, la résiliation du contrat avec effet au 31 décembre 2012 ; que la société ADS relève appel du jugement du 14 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande à fin d'annulation de cette décision ;

2. Considérant que le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité ; que, toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles ; qu'il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité ; que, pour déterminer s'il y a lieu de faire droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il incombe au juge du contrat d'apprécier, eu égard à la gravité des vices constatés et, le cas échéant, à celle des manquements du requérant à ses obligations contractuelles, ainsi qu'aux motifs de la résiliation, si une telle reprise n'est pas de nature à porter une atteinte excessive à l'intérêt général et, eu égard à la nature du contrat en cause, aux droits du titulaire d'un nouveau contrat dont la conclusion aurait été rendue nécessaire par la résiliation litigieuse ;

3. Considérant que si la société ADS a demandé l'annulation de la décision de résiliation, ses conclusions doivent être regardées, ainsi d'ailleurs qu'elle l'indique également dans sa requête d'appel, comme tendant à la reprise des relations contractuelles avec la commune de Béziers ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal (...) " ; que les dispositions de l'article L. 2122-22 du même code ne prévoient pas la possibilité pour le conseil municipal de charger le maire, en tout ou partie, de prendre toute décision concernant l'exécution des délégations de service public ; que si, par sa délibération du 29 novembre 2010, le conseil municipal de la commune de Béziers a autorisé son maire ou l'élu délégué à signer le contrat avec la société A.D.S., cette délibération n'a pas eu pour effet d'autoriser le maire ou son adjoint à prendre les mesures d'exécution de ce contrat ; que, par suite, la société A.D.S. est fondée à soutenir que la décision du 26 novembre 2012, signée par un adjoint au maire, a été prise par une autorité incompétente ;

5. Considérant toutefois, en deuxième lieu, que le délégataire s'est engagé, aux termes de l'article 3 du contrat de délégation de service public, à renseigner et tenir à jour le registre de police de la fourrière municipale et à justifier auprès de l'agent comptable de la direction de la police municipale des sorties de véhicules restitués ; que la commune de Béziers établit plusieurs manquements du délégataire à ces engagements ;

6. Considérant, en troisième lieu, que le même article rappelait au délégataire son obligation de produire chaque année, conformément aux dispositions des articles L. 1411-3 et R. 1411-7 du code général des collectivités territoriales, un rapport comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l'exécution du contrat et devant être certifiés par un commissaire aux comptes ; qu'il est constant que la société ADS n'a produit aucun rapport comptable au titre de l'année 2011 et n'a produit celui concernant l'année 2012, au demeurant non certifié par un commissaire aux comptes, que postérieurement à la décision de résiliation ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que le délégataire s'est également engagé à assurer l'ouverture du parc aux usagers tous les jours, y compris les jours fériés, en rendant possible la restitution du véhicule et la facturation des frais de garde ; que la commune de Béziers justifie que sur la période allant de mai à novembre 2012, l'ouverture du site n'a pas été conforme à ces stipulations, les fermetures inopinées ayant eu pour conséquence l'impossibilité pour certains usagers de reprendre possession de leur véhicule dans des délais raisonnables ; que, contrairement à ce qui est soutenu par la société ADS, il ne lui est pas reproché par la commune de ne pas avoir assuré l'ouverture du site 24 heures sur 24 ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que le contrat prévoit dans son article 5 que le délégataire verse à la commune de Béziers un loyer mensuel de 3 000 euros hors taxe par mois, payable d'avance et par trimestre ; que la société ADS ne conteste pas ne pas avoir réglé, à la date de la décision de résiliation, les loyers alors dus ; qu'elle a ainsi manqué à son obligation contractuelle, alors même qu'elle fait valoir que la ville de Béziers a soudainement mis fin à la procédure de compensation qu'elle opérait entre les sommes dues à son délégataire au titre des frais de fourrière non réglés par les propriétaires des véhicules et le coût du loyer ;

9. Considérant, enfin, que le même article 5 prévoit dans son paragraphe 6 que le délégataire s'engage à maintenir le site en bon état d'entretien pendant toute la durée de son occupation ; qu'il ressort des éléments produits par la commune et, notamment, de plusieurs photographies, que le site était envahi par la végétation, laquelle recouvrait certains véhicules ; que la société ADS ne saurait se prévaloir de dégradations extérieures ni d'un refus de permis de construire pour s'exonérer de l'obligation qui était ainsi la sienne ;

10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société ADS a manqué à plusieurs de ses obligations contractuelles ; que ces manquements, constitués par l'absence de paiement des loyers, les carences répétées dans l'ouverture du site, l'absence ou la mauvaise tenue des registres d'entrée et de sortie des véhicules, l'absence de production des rapports certifiés aux comptes pour l'année 2011 et, enfin, le défaut d'entretien du site, présentaient un caractère suffisamment grave pour justifier la résiliation de la convention de délégation de service public conclue le 15 décembre 2010 ; que si la décision prononçant la résiliation de cette convention a été signée, comme il a été dit, par une autorité incompétente, il résulte toutefois de l'instruction que le conseil municipal a autorisé le maire à défendre les intérêts de la commune dans les instances contentieuses engagées par la société ADS devant le tribunal administratif de Montpellier et devant la Cour ; que le conseil municipal doit donc ainsi être regardé comme ayant donné son accord a posteriori à la résiliation de la convention de la délégation de service public en litige ; que, dès lors, eu égard à l'importance des manquements de la société ADS à ses obligations contractuelles, l'absence d'autorisation préalable donnée par l'assemblée délibérante à la signature de la décision de résiliation, ne saurait, dans les circonstances de l'espèce, eu égard au consentement ainsi donné par le conseil municipal, être regardée comme un vice d'une gravité telle qu'elle justifierait, à elle seule, que soit ordonnée la reprise des relations contractuelles ; qu'il en résulte également que les premiers juges n'ont pas commis d'irrégularité en ne soulevant pas d'office le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de résiliation, dès lors que ce vice d'incompétence n'était pas de nature à justifier qu'il fût fait droit aux conclusions à fin de reprise des relations contractuelles ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ADS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société ADS, partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la commune de Béziers et de condamner la société ADS à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société ADS est rejetée.

Article 2 : La société ADS versera la somme de 2 000 (deux mille) euros à la commune de Béziers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Auto Dépannage Service et à la commune de Béziers.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2015, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2015.

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N° 14MA01921


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01921
Date de la décision : 26/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Moyens d'ordre public à soulever d'office - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : POITOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-26;14ma01921 ?
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