Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 7 juin 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation de quitter le territoire français.
Par un jugement n° 1302750 du 31 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M.A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 6 décembre 2013, M.A..., représenté par Me Morizur, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice en date du 31 octobre 2013 ;
2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me Morizur, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient :
- que la décision de refus de séjour n'est pas suffisamment motivée au regard de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
- qu'il s'est installé durablement en France ; que son couple dispose de revenus suffisants ; qu'il répond à toutes les considérations posées par le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que cette décision est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête de M. A...a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Par une décision en date du 16 avril 2014, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a admis M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25 %.
Par ordonnance du 25 février 2015, la clôture a été fixée au 20 mars 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Sur sa proposition, le rapporteur public, désigné par le président de la cour en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du même code par le président de la formation de jugement.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Markarian.
1. Considérant que M.A..., de nationalité philippine et né le 27 septembre 1982, a présenté, le 19 décembre 2012, une demande de titre de séjour ; que sa demande a été rejetée par un arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 7 juin 2013 ; que M. A...relève appel du jugement du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
3. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
4. Considérant que M. A...justifie de sa présence sur le territoire français depuis 2005, de la présentation antérieure en 2007 d'une demande de titre de séjour et d'attestations d'employeurs ; qu'il s'est marié le 18 février 2012 à Nice avec une ressortissante philippine, titulaire d'une carte de résidente, avec laquelle il a une fille née le 24 avril 2012 ; qu'ainsi, compte tenu de la réalité de la vie commune du couple qui n'est pas contestée, et alors même que l'intéressé entre dans les catégories ouvrant droit au bénéfice du regroupement familial, l'arrêté litigieux porte une atteinte excessive au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale tel que reconnu par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son annulation entraîne, par voie de conséquence, celle de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, la délivrance du titre de séjour sollicité par M. A...; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date du présent arrêt, des éléments de droit ou de fait nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose à la demande du requérant une nouvelle décision de refus ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. " ;
8. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 25 % par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille en date du 16 avril 2014 ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Morizur, avocat de M.A..., renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1302750 du tribunal administratif de Nice en date du 31 octobre 2013 ainsi que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 7 juin 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Morizur la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Me Morizur et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré à l'issue de l'audience du 17 septembre 2015, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.
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N° 13MA04787 2