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29/09/2015 | FRANCE | N°13MA04752

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2015, 13MA04752


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les arrêtés du 6 novembre 2013 par lesquels le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français à destination de son pays d'origine et a ordonné son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Par un jugement n° 1302955 du 11 novembre 2013, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes a annulé ces arrêtés.

Procédure devan

t la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2013 le préfet de l'Isère demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les arrêtés du 6 novembre 2013 par lesquels le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français à destination de son pays d'origine et a ordonné son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Par un jugement n° 1302955 du 11 novembre 2013, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes a annulé ces arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2013 le préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de rejeter les conclusions de Mme A...devant les premiers juges.

Il soutient que :

- Mme A...renouvelle les séjours de moins de trois mois afin de remplir artificiellement les conditions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle ne remplit pas les conditions requises pour un séjour supérieur à trois mois ;

- son séjour est constitutif d'un abus de droit.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le traité signé le 25 avril 2005, relatif à l'adhésion de la République de Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne, notamment l'annexe VII du protocole relatif aux conditions et modalités d'admission de la République de Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne, ensemble la loi n° 2006-1254 du 13 octobre 2006 en autorisant la ratification ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C...a été entendu au cours de l'audience publique :

1. Considérant que, par un arrêté du 6 novembre 2013, le préfet de l'Isère a fait obligation à Mme B...A..., de nationalité roumaine, de quitter sans délai le territoire français sur le fondement du 2° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a, par un arrêté du même jour, placé l'intéressée en rétention administrative sur le fondement du 6° de l'article L. 551-1 du même code ; que Mme A...a contesté ces décisions devant la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes qui, par un jugement du 11 novembre 2013, a fait droit à sa demande ; que le préfet de l'Isère relève appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : (...) 2° Ou que son séjour est constitutif d'un abus de droit. Constitue un abus de droit le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies. Constitue également un abus de droit le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d'assistance sociale (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 121-1 de ce même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) " ; que pour l'application du 1° de cet article, l'activité de prostitution peut être considérée comme constituant une activité professionnelle exercée en France à condition qu'il soit établi qu'elle est exercée, par la personne qui s'y livre, hors de tout lien de subordination en ce qui concerne le choix de cette activité, les conditions de travail et de rémunération, sous sa propre responsabilité, et contre une rémunération qui lui est intégralement et directement versée ;

4. Considérant que pour annuler les arrêtés litigieux, la magistrate désignée a estimé que l'intention de contourner les conditions posées par la réglementation nationale relative au séjour d'une durée supérieure à trois mois n'était pas caractérisée ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des déclarations de Mme A... recueillies par les services de gendarmerie le 6 novembre 2013, que l'intéressée, entrée sur le territoire français pour la dernière fois le 9 octobre précédent, vit en France depuis 2011 et multiplie depuis les allers et retours entre la France, pays où elle se prostitue, et la Roumanie, pays dans lequel vivent ses trois enfants, effectuant des séjours d'un mois dans chaque pays selon ses déclarations ; qu'elle ne dispose pas d'une assurance maladie et ne remplit pas la condition prévue au 2° de l'article L. 121-1 du code ; qu'elle n'a pas déclaré d'activité professionnelle ; que si elle a indiqué vivre de la prostitution, il n'est pas établi ni même soutenu qu'elle se livre à cette activité à titre indépendant, de sorte qu'elle ne remplit pas davantage la condition prévue au 1° de l'article L. 121-1 du code ; qu'il est par ailleurs constant que Mme A... ne remplissait pas les conditions posées aux 3° à 5° du même article ; qu'ainsi elle ne remplissait pas les conditions requises pour séjourner plus de trois mois en France, bien qu'elle ait indiqué y vivre depuis 2011 ; qu'il ressort également des pièces du dossier qu'indépendamment de ses déplacements spontanés, Mme A...a fait l'objet de mesures d'éloignement les 31 octobre 2011, 3 avril, 27 août et 24 septembre 2013 et ne pouvait ignorer qu'elle ne remplissait pas les conditions pour un séjour en France supérieur à trois mois ; que, dans ce contexte, le préfet de l'Isère a pu légalement estimer que l'ancienneté et le caractère systématique de la pratique de séjours rapprochés en France de Mme A... révélaient, en réalité, la volonté de l'intéressée de se maintenir sur le territoire français alors qu'elle ne remplissait pas les conditions requises pour un séjour prolongé et en conclure que le séjour en France de l'intéressée était constitutif d'un abus de droit entrant dans le champ d'application du 2° précité de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes a estimé que la démonstration de l'élément intentionnel propre à l'abus de droit n'était pas rapportée ;

6. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les autres moyens de la demande de MmeA... ;

Sur la mesure d'éloignement :

7. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 18 octobre 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Isère n° 65 d'octobre 2013, MmeD..., sous-préfète chargée de mission auprès du préfet, secrétaire générale adjointe, a reçu délégation de signature à l'effet de signer " tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département " à l'exception de certaines matières dont ne relèvent pas le séjour et l'éloignement des étrangers en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, non contestés en l'espèce ; que le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte doit ainsi être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de la lecture de l'arrêté contesté qu'il mentionne les considérations de fait et de droit qui ont conduit le préfet de l'Isère à obliger Mme A... à quitter le territoire sans délai ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que si la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne indique, à son article 45, que " tout citoyen ou toute citoyenne de l'Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ", elle précise la portée de ce droit à son article 52 en ajoutant que " les droits reconnus par la présente charte qui trouvent leur fondement dans les traités communautaires ou dans le traité sur l'Union européenne s'exercent dans les conditions et limites définies par ceux-ci " et en rappelant également à son article 54, l'interdiction des abus de droit ; que le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne énonce, aux articles 20 et 21, que le droit des citoyens de l'Union européenne de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres s'exerce dans les conditions et limites définies par les traités et par les mesures adoptées en application de ceux-ci ; que la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 indique, dans son préambule, que " les Etats membres devraient pouvoir adopter les mesures nécessaires pour se préserver de l'abus de droit ou de la fraude, en particulier des mariages blancs ou de toute autre forme d'unions contractées uniquement en vue de bénéficier de la liberté de circulation et de séjour. " et énonce, à son article 35, que " les Etats membres peuvent adopter les mesures nécessaires pour refuser, annuler ou retirer tout droit conféré par la présente directive en cas d'abus de droit ou de fraude, tels que les mariages de complaisance. " ; qu'il résulte de ces dispositions communautaires que la liberté de circulation et de séjour des citoyens de l'Union européenne sur le territoire des Etats membres n'est pas absolue et peut notamment être refusée ou retirée en cas d'abus de droit ou de fraude, dont les mariages de complaisance ne constituent qu'un exemple, la directive laissant aux Etats le soin de définir les autres cas de fraude ou d'abus de droit susceptibles de faire obstacle à la liberté de circulation et de séjour ; qu'il résulte également expressément des dispositions combinées des articles 6 et 14 de la directive 2004/38/CE que le droit des citoyens de l'Union de séjourner sur le territoire d'un autre Etat membre pour une période allant jusqu'à trois mois est subordonné au fait qu'ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale de l'Etat membre d'accueil ; qu'ainsi, les dispositions du 2° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la possibilité, pour l'autorité administrative compétente, d'obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne à quitter le territoire français lorsque son séjour est constitutif d'un abus de droit et qui définissent précisément deux hypothèses d'abus de droit tenant, pour la première, au fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies et, pour la seconde, au séjour en France effectué dans le but essentiel de bénéficier du système d'assistance sociale, ne sont pas incompatibles avec les objectifs fixés à l'article 6 et aux 1 et 2 de l'article 27 ainsi qu'à l'article 35 de la directive 2004/38/CE et ne méconnaissent ni les stipulations susmentionnées du 2 de l'article 20 et du 1 de l'article 21 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ni celles de l'article 45 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni encore, par voie de conséquence, le principe de liberté de circulation et de séjour des ressortissants communautaires sur le territoire des Etats membres de l'Union européenne ; que dès lors le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions du 2° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec le principe de liberté de circulation des citoyens de l'Union européenne, pris en ses différentes branches, ne peut être accueilli ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes raisons, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement porterait atteinte au principe de liberté de circulation des citoyens de l'Union européenne doit également être écarté en ses différentes branches, étant d'ailleurs observé que Mme A...ne peut utilement invoquer à l'encontre de la décision contestée une violation de différents articles de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 dont les dispositions ont été transposées en droit interne par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007 ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que les dispositions du 2° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont précisément pour objet de permettre l'éloignement de citoyens de l'Union dont le séjour, quelle qu'en soit la durée, est constitutif d'un abus de droit ; que dès lors que Mme A...entre dans les prévisions de ces dispositions, elle ne peut se prévaloir utilement du fait que l'article L. 121-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permette, sous certaines conditions, aux citoyens de l'Union de se maintenir pour une durée de trois mois en France, sans formalités autres que celles prévues pour y rentrer ; que la circonstance, à la supposer établie, que l'intéressée n'entre pas dans les prévision du 3° de l'article L. 511-3-1 du code est sans influence sur le bien-fondé de l'arrêté préfectoral, fondé sur le 2° de cet article ;

Sur le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

12. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté pour les motifs qui ont été exposés au point 7 ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que la contestation de l'obligation de quitter le territoire devant être écartée pour les raisons exposées ci-dessus, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le refus de lui accorder un délai de départ volontaire devrait être annulé par voie de conséquence ou parce qu'il reposerait sur une mesure d'éloignement illégale ;

14. Considérant, en troisième lieu, que, selon les dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. A titre exceptionnel, l'autorité administrative peut accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...a été interpellée le 6 novembre 2013, lors d'un contrôle d'identité effectué par les services de gendarmerie le long de la RD 11, motivé par la recrudescence récurrente d'individus présents sur le site, où plusieurs personnes de nationalité roumaine se livrent à la prostitution, après que plusieurs opérations judiciaires ont été menées et ont mis à jour en 2011, 2012 et 2013 l'infraction de " travail illégal par dissimulation d'activité " commise par des personnes se livrant à la prostitution ; qu'elle a précédemment fait l'objet de mesures d'éloignement les 31 octobre 2011, 3 avril, 27 août et 24 septembre 2013 ; que les documents produits par le préfet démontrent que cette activité à laquelle participe Mme A...est à l'origine de tensions très vives au sein de la population locale ; que des arrêtés municipaux ont été pris en vue d'interdire le racolage et la prostitution sur le secteur dénommé " le Bois français ", qui correspond à celui sur lequel Mme A... exerce son activité, traduits en langue roumaine et remis aux personnes contrôlées durant la période de validité de ces arrêtés ; qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, le préfet de l'Isère a pu décider qu'il y avait urgence à éloigner l'intéressée du territoire français ; que dès lors, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de délai de départ volontaire méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant placement en rétention administrative :

16. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté pour les motifs qui ont été exposés au point 7 ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que la contestation de l'obligation de quitter le territoire sans délai devant être écartée pour les raisons exposées ci-dessus, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision la plaçant en rétention devrait être annulée par voie de conséquence ou parce qu'elle reposerait sur une mesure d'éloignement illégale ;

18. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence (...) l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code précité : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1 l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation " ; qu'aux termes du II de l' article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (... ) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

19. Considérant qu'au sens de l'article L. 561-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notion de garanties de représentation effectives suffisantes pour prévenir un risque de fuite, doit être appréciée au regard des conditions de résidence et de logement de l'étranger, et aussi au regard, notamment, de la possession ou non de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ou encore du respect ou non, par l'étranger, des décisions prises à son encontre et des obligations lui incombant ; qu'en l'espèce, si Mme A...était titulaire d'un document d'identité, il ressort en revanche des pièces du dossier qu'elle ne justifiait d'aucun domicile stable à la date de son placement en rétention, indiquant vivre dans un squat ; que, par suite, le préfet de l'Isère a pu à bon droit estimer que l'intéressée ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes au sens du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des articles L. 551-1 et L. 561-2 du même code doit, dans ces conditions, être écarté ; que, pour les mêmes motifs, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Isère aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne l'assignant pas à résidence ;

20. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que si Mme A...soutient que la décision de placement en rétention dont elle a fait l'objet méconnaît les dispositions de l'article 15 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, cette directive, d'ailleurs relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des seuls ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, a été entièrement transposée en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 codifiée aux articles précités du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, l'intéressée ne saurait en toute hypothèse se prévaloir des dispositions de cette directive ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes a annulé ses décisions du 6 novembre 2013 par lesquelles il a obligé Mme A...à quitter le territoire français sans délai et a ordonné le placement en rétention de l'intéressée ; que l'ensemble des conclusions de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nîmes doit, par suite, être rejeté ;

D É C I D E

Article 1er : Le jugement de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nîmes du 11 novembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B...A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

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N° 13MA04752

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04752
Date de la décision : 29/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables - Libertés de circulation - Libre circulation des personnes.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CHABBERT MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-29;13ma04752 ?
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